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Sexe

23 ans jamais d’orgasme

Pour moi, l'orgasme reste un mystère. Tout comme le boson de Higgs, son existence reste encore à prouver.
Photo : Weronika Izdebska

Étendue sur mon lit, jambes écartées, je regarde deux femmes s'embrasser sur mon écran de télévision. L'une se fait lentement pénétrer par un homme derrière elle. Une bougie Ikea senteur vanille embaume ma chambre – je décide alors de me donner une nouvelle chance d'atteindre l'orgasme. En vain. Je me sens complètement déboussolée, comme si je n'étais pas taillée pour la jouissance.

16 minutes et 38 secondes plus tard, j'abandonne le temps de me faire une tasse de thé. J'ai 23 ans, et je n'ai jamais eu d'orgasme. Je me suis lassé de la masturbation assez vite. Je n'ai jamais rien ressenti, même quand je m'allongeais seule dans mon lit. Je me suis longtemps demandé ce qui clochait chez moi, mais j'ai fini par me faire une raison.

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Si j'aime regarder du porno, c'est surtout pour son côté esthétique. Ça ne m'excite pas pour autant. Bien entendu, je n'applique pas ce jugement à tous les films porno, mais heureusement, l'industrie connaît une évolution prometteuse.En général, je trouve que les femmes sont plus belles que les hommes. À l'écran, je trouve leurs seins particulièrement attirants. Leur sexe, aussi. Les pénis m'agacent un peu. Avec les mecs, c'est un peu comme le jeu de la roulette : on ne sait jamais ce qui va surgir de leur pantalon.

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Pour moi, l'orgasme reste un mystère. Tout comme le boson de Higgs, son existence reste encore à prouver. On ne peut pas passer à côté d'une sensation nouvelle, et malheureusement, la plupart de mes partenaires sexuels ne l'ont pas compris. C'est la raison pour laquelle je me suis mise à simuler. J'ai si bien simulé que jusqu'à maintenant, toutes les personnes avec qui j'ai couché se prenaient pour de véritables étalons.

Je dois admettre que certains d'entre eux étaient vraiment très doués, du moins pour tout ce qui va avec l'acte sexuel – les baisers, les petits moments d'hésitation, les cœurs qui s'emballent, les mots crus. J'adore baiser, mais je suis incapable de jouir. Ça me paraît complètement impossible.

Je me contente de gigoter et de gémir parce que ça donne du plaisir aux hommes. Un jour, j'ai raconté mon problème à un mec avec qui j'avais un rancard. Deux verres de vin avaient suffi pour m'émécher et ralentir la communication entre mes synapses. Il était bel homme, plus vieux et traînait un lourd passif, mais ça ne me dérangeait pas vraiment. Je me suis dit que ça pourrait être une expérience intéressante : je voulais voir comment il allait réagir et agir après ma confession. Au début, il semblait découragé, voire un peu mal à l'aise. Il m'a conseillé de bien me caler sur un oreiller et a désespérément frotté mon clitoris. Je me suis contentée de rester immobile, insensible, étendue sur ma couverture couleur pêche.

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Abstraction faite des pistaches qui m'avaient donné des maux de ventre un peu plus tôt, c'était le pire moment de la soirée. Disons que certaines personnes ne sont pas physiquement compatibles. Malgré ses nombreux efforts, et par pitié pour lui, j'ai voulu apaiser la tension en simulant un orgasme. Ensuite, je me suis tournée vers lui. Il avait l'air vraiment fier.

Je pense que c'est une bonne chose qu'il ait pris cet orgasme au sérieux. Je ne pouvais ignorer ni son altruisme, ni sa générosité. Cette expérience aurait pu être drôle, mais sa véhémence avait rendu tout ça trop psychologique. Il me faisait penser à un chien en train de courir après une récompense, et se concentrait moins sur le déroulement que sur l'objectif final.

Si on se focalisait moins sur ma difficulté à avoir un orgasme, peut être que je pourrais vraiment me laisser aller et connaître un jour ce sentiment d'apogée sexuelle.

J'en ai assez de m'inquiéter de mon incapacité à atteindre l'orgasme. Elle menace toutes mes relations, telle une épée de Damoclès. Et je suis intimement persuadée que c'est cette pression qui m'empêche de savoir ce que ça fait.

Mais j'ai un message à faire passer à tous les hommes de ce monde : même sans orgasme, le sexe peut être merveilleux. Pour moi, c'est juste la cerise sur le gâteau. Toute relation sexuelle avec un bon partenaire est aussi excitante qu'épanouissante. Tout ce qui précède et succède à une relation sexuelle m'est agréable. Rendre les gens heureux me rend heureuse, et atteindre l'orgasme n'est simplement pas ma priorité. Si j'arrive à le connaître un jour, ce sera formidable, mais on a tous besoin de lâcher prise avant que ça arrive.