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Culture

La Reine Margot et Anchorman 2 sont les seuls films que vous devriez acheter ce mois-ci

Les mecs du Cinéma est Mort commentent les sorties DVD du mois de mai.

Antonin et Étienne sont les fondateurs et présentateurs du Cinéma est mort, la meilleure émission de cinéma sur les radios françaises, diffusée sur Canal B. Ils parleront chaque mois sur VICE.com des sorties DVD et Blu-Ray qu'ils adorent et des sorties DVD et Blu-Ray « que c'est pas la peine ».

La Reine Margot est le plus grand film d'horreur français jamais tourné. Si l'on prend comme critères les hectolitres de sang versé et le nombre de cadavres, cet argument se défend pas mal, bien aidé par l'Histoire elle-même qui fournit à ce récit un background de choix via la Saint-Barthélemy, grand bizutage des catholiques sur les protestants dans un Paris d'avant le tout-à-l'égout.

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Ce qui fascine toujours avec ce film, 20 ans après sa sortie, c'est l'absolue débauche de moyens financiers au service d'une vision complaisamment hyper violente et exagérément sulfureuse d'un épisode marquant de l'histoire de France. D'habitude (et c'est toujours le cas aujourd'hui) lorsque ce genre de grande production patrimoniale est mise en chantier, ça donne ce genre de films aseptisés et consensuels que l'on ne va même pas voir pour rigoler – et qui, en général, durent 3 heures. Dans La Reine Margot, tous les pires ingrédients du roman historique décliné en version film sont réunis : faste des décors, acteurs-stars, costumes en veux-tu en voilà, thématique ronflante de la tolérance et ombre d'Alexandre Dumas, auteur prestigieux. Et pourtant c'est comme si Patrice Chéreau, dans sa peur panique de l'académisme, avait voulu rendre ça le plus dégueulasse et décadent possible, rendant le tout plus proche du cinéma de Mel Gibson que de celui de Robert Hossein.

Passé une première scène opératique réellement impressionnante et qui remplit le contrat de départ – film historique ! – on se retrouve dans une fiesta au Louvre avec constitution de fuck-list par Dominique Blanc et Adjani, free-fight entre deux amants rivaux (dont l'un est également frangin de l'enjeu du combat, une Isabelle Adjani pas encore tout à fait ravagée par le Botox) et les beaux costumes que l'on a bien admirés durant la première séquence sont désormais taché de pinard, de boustifaille royale et bien enduit de transpiration et autres liquides séminaux. Et ça se termine comment ? En partouze.

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Alors oui le film est très poussif dans sa peinture d'un « univers décadent » (mais par exemple, beaucoup plus habité qu'un Game of Thrones qui s'en inspire largement), de même les bonus des disques où les protagonistes justifient la violence du film en revenant sur l'actualité d'époque, à savoir le conflit ethnique en ex-Yougoslavie, font doucement rigoler, mais si on prend le film pour ce qu'il est, c'est-à-dire un film d'horreur en alexandrins, il s'agit d'une claque d'une puissance infinie.

La suite du génial Ron Burgundy, présentateur vedette est sortie au ciné cet été aux États-Unis, son édition vidéo est disponible depuis le mois dernier aux US et le film sort pourtant en salles en France le 18 juin prochain. Les plus perspicaces et malhonnêtes d'entre vous auront déjà tiré leur conclusion, c'est un véritable suicide commercial doublé d'une véritable aubaine pour tous les fans de comédie américaine en général et de Will Ferrell en particulier.

C'est accessoirement une preuve de plus pour les plus conspirationnistes d'entre vous de l'existence d'un complot ourdi par les responsables – réalisateurs, producteurs, la Troupe du Splendid – des comédies françaises toutes moisies. Il existe en effet une main invisible qui fait en sorte de saccager systématiquement la diffusion de la comédie américaine depuis dix ans en France, de peur qu'elles rappellent au public que les comédies sont faites pour rigoler.

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Alors bonne surprise, Anchorman 2 est une authentique réussite. Bonne surprise car il fallait s'y attendre, le nouvel âge d'or de la comédie américaine débuté au début du XXIe siècle s'essouffle considérablement. Judd Apatow a livré l'année dernière un film tout pourri (qui, pour une fois, méritait bien son titre français : 40 ans, mode d'emploi), et ses poulains ont livré un film nouveau riche qui fait peine à voir (This Is The End). Or Légendes vivantes (c'est le titre français) est superbe : Ferrell y déploie tout son génie comique, cette sorte de raideur sur la corde toujours prompte à exploser dans un déluge de fureur débilitante. L'argument de cette suite est génial et d'une férocité inouïe, à ce point qu'on vous laisse choper le DVD et qu'on n'en dira pas plus. Pour l'instant, l'un des meilleurs films de l'année, mais on n'a pas encore vu Supercondriaque, hein.

Du sang et des larmes va très loin dans cette petite hypocrisie qui préside à l'industrie des films de guerre, celle qui veut que les films de guerre soient contre la guerre : les gradés, pas cools / la violence, pas bien / les jeunes sacrifiés, pas chouette. Mais le truc, c'est que tous les gens qui vont voir ce genre de films en salles ont quand même envie d'en avoir pour leur pognon et en conséquence, que ça défouraille un maximum. Du sang et des larmes est donc, en ce sens, un cas d'école, car déguisé derrière les oripeaux du film hommage : tiré d'une histoire vraie, aidé par de vrais conseillers militaires sur le tournage, plus une aide logistique de l'armée, plus un générique sur fond de musique militaire funèbre avec les photos des vrais protagonistes, fronçage de sourcil généralisé pour les acteurs lors de la promo du film (ambiance j'aurais pu faire ce film gratos pour ces p'tits gars…).

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Seulement, derrière ce programme un peu chiant (une majeure partie du film est d'ailleurs assez pénible) s'en cache un autre, bien taré. Le film met en scène des Navy Seals, et s'ouvre sur des scènes d'entraînement montrant des petits gars du pays s'entraînant non pas à devenir des machines à tuer, mais bien des machines à endurer la douleur. S'ensuit le récit du fait divers de guerre à proprement dit et c'est rapidement plié, les mecs sont dans la merde et seule cette endurance à la douleur récemment acquise sera à même de les sauver, car ils n'ont pas d'autre choix que celui de fuir. Et fuir avec cinq balles de Kalachnikov dans le corps, un bras cassé, une clavicule perforée, et une oreille qui pisse le sang, c'est pas simple, surtout en dévalant des montagnes rocailleuses la tête la première. La résistance à la douleur des personnages de ce film est tellement improbable (c'est peut-être vrai d'ailleurs, mais on n'y croit pas), que l'on a parfois l'impression d'être devant une adaptation d'un doom-like où la durée de la partie est inféodée à une barre de niveau de vie ; vous pouvez jouer tant qu'il en reste, même si vous ressemblez à un steak haché. Du sang et des larmes pousse ce principe tellement loin qu'il en devient fascinant. C'est très drôle, mais n'oubliez pas que la guerre, c'est pas bien.

En prenant les ingrédients de ce film un par un, on pouvait croire que l'on tenait le film de l'année. Un casting composé de Woody Harrelson, Sam Shepard, Willem Dafoe, Casey Affleck, et Christian Bale (qui par ailleurs joue de mieux en mieux Christian Bale qui joue), une thématique adulte et noire quand la mode est au fun et au cool, une ambiance moite et rugueuse quand la mode est à l'aseptisé, plus un ancrage dans une Amérique rurale et dévastée rarement filmée.

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Devant l'ahurissant manque de cohérence du métrage (chronique sociale dans sa première moitié, vigilante movie dans l'autre) on se dit que l'on a pas affaire à du cinéma mais bien à une forme de décoration d'intérieur, pas super feng shui, où tous les éléments auraient été pensés et étudiés par un cerveau humain lyophilisé congelé puis reconstitué uniquement à partir de particules bio. Si l'on ajoute à ça un hommage excessivement lourd au chef-d'œuvre de Michael Cimino Voyage au bout de l'enfer sous la forme d'un montage parallèle absolument injustifié, on tient là la plus grosse baudruche de l'année.

À présent que la pornographie est accessible à tous et que son imagerie a été digérée par toutes les strates du cinéma mainstream, il est émouvant de se rappeler que durant les années 1990, il a existé dans le sillage de Basic Instinct une vogue de thrillers sexy tous plus nuls les uns que les autres. Ceux-ci étaient en réalité des prétextes servant à afficher des acteurs célèbres mettre leur zigounette dans le pilou-pilou d'actrices célèbres (très souvent Sharon Stone) sans que l'on ne voit ni zigounette, ni pilou-pilou. En a donc résulté une masse de films où l'orgasme féminin advenait au bout de 30 secondes de langoureux coups de butoir filmés à travers des stores vénitiens : Sliver, Harcèlement, Color of Night, etc. Une tripotée de films nuls donc, mais qui représentaient pour l'adolescent que j'étais en ces temps pré-Youporn une des seules opportunités de m'appuyer sur un support visuel pour m'aider à me délester d'une partie de ma débordante énergie sexuelle. Les cassettes circulaient donc pas mal dans la cour de récré. Je me remémore d'ailleurs avec douleur le moment où le pote qui m'avait refilé son enregistrement de Last Seduction m'avait gentiment fait remarqué que la bande semblait « un peu abîmée » à certains endroits. Entre autres sentiments, je me suis alors dit que le support magnétique des VHS était loin de représenter une option envisageable pour la conservation du patrimoine cinématographique.

Last Seduction ressort ce mois-ci en DVD et c'est l'un des rares films de cette vague de thriller sexy absolument réussi, vénéneux, élégant et pas complètement sexiste, et Linda Fiorentino, sa star, y livre une prestation tout à fait convaincante – sérieux, QUE DEVIENS-TU, LINDA ??!