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Musique

Bloodclot !

John était le chanteur des Cro-Mags, les auteurs de Age of Quarrel, soit le meilleur album hardcore de tous les temps. Au fil des années, j’ai entendu beaucoup d’histoires incroyables à son sujet mais je n’ai jamais eu les couilles de lui demander ce...

Photo : Richard Kern

Un matin, sur le chemin du travail et la tête dans le cul, je suis tombé sur John Joseph, que je connaissais un petit peu de la scène hardcore de New York. John était le chanteur des Cro-Mags, les auteurs de Age of Quarrel, soit le meilleur album hardcore de tous les temps. Au fil des années, j’ai entendu beaucoup d’histoires incroyables à son sujet mais je n’ai jamais eu les couilles de lui demander ce qui était vrai et ce qui ne l’était pas. Maintenant que j’ai lu son autobiographie, je sais que tout ce que j’ai entendu sur lui – et bien plus encore – est effectivement vrai. Oui, il a fugué à l’âge de 14 ans pour traîner dans la péninsule de Rockaway, dans le Queens. Oui, il vendait du faux LSD au Madison Square Garden. Oui, il a rejoint la Marine puis a déserté. Oui, il a joué avec les Bad Brains et a passé du temps auprès des Hare Krishnas à New York et à Hawaï.

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Enfin bref, je m’emballe. Donc j’étais vraiment pas frais et je suis tombé sur John. Je l’ai salué et il a dit : « Quoi de neuf, mec ? T’as pas l’air bien. » J’ai dit que je me sentais mal. Il m’a pris par l’épaule, m’a emmené dans un bar à jus, m’a commandé une combinaison de trucs dont je n’avais jamais entendu parler et m’a donné une bouteille de liquide médicinal naturel en disant : « Ça devrait te faire du bien. » Il portait des sacs de courses avec lui et je lui ai demandé pourquoi. Il a dit que c’étaient des repas pour des sans-abri. Quoi !? Ce moment m’a vraiment frappé. Je me suis senti con – quelque chose m’échappait. Non seulement John Joseph aide les mecs qui ont la tête dans le cul mais en plus de ça, il aide les sans-abri !? En plus il jouait pour les Cro-Mags et il vient d’écrire l’un des livres les plus intenses que j’aie jamais lus. Qu’est-ce qui s’est passé, John ?

VICE : C’est un pavé ton livre. Plutôt costaud !
John Joseph :Ha, c’est ce qu’a dit mon oncle : « Bordel de Dieu, je pourrais m’en servir comme d’une arme. » Récemment, je suis allé au restaurant Caravan of Dreams avec Googie des Misfits, et un mec est venu me voir pour me dire qu’il avait acheté le livre et qu’il le trouvait incroyable. Les filles assises avec nous ont dit : « Oh, tu as écrit un livre ? » J’ai commencé à leur raconter des histoires sur le Lower East Side – un truc de dingue. Elles ont demandé à Googie s’il avait lu le livre et il a répondu : « Je n’ai pas besoin. J’ai déjà entendu ces histoires des millions de fois. »

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Il est mentionné dans le livre, non ?
Ouais, parce que quand j’étais gosse, il m’a vu sur un vélo de junkie sur Rockaway et il s’est dit : « Mais que fout ce gamin ? » Rockaway était un peu comme l’Irish Riviera à l’époque. Tous les Irlandais des classes ouvrières avaient un bungalow d’été là-bas et sa famille en avait un.

Tu vivais dans la rue à l’âge de 14 ans ?
Ouais. Je servais de mule à héroïne pour les accros.

T’étais impliqué dans le marché de la drogue sans y toucher ?
Si, j’y ai déjà touché. J’ai essayé l’héroïne en me l’injectant sous la peau, et ça m’a fait gerber. C’était la première et dernière fois. Je préférais les drogues hallucinogènes comme la mescaline, le LSD, l’acide. Le cannabis aussi – je fumais de la merde mais j’en fumais beaucoup.

Union Square était un lieu connu pour choper de la drogue dans les années 1970, non ?
Les gens ne sont plus au courant aujourd’hui, mais la 14e rue et Union Square Park étaient de vrais supermarchés pour la drogue. On trouvait ce qu’on voulait. Il y avait des prostituées aussi. Un jour, mon pote Dave Dolan, un vrai taré, et moi-même avons acheté du Placidyl et on est allés chez Max’ Kansas City. C’était ma première fois dans cette boîte.

C’est quoi les Placidyl ?
Ils appelaient ça les « jellybeans » [des sortes de Dragibus]. C’est un tranquillisant pour chevaux de la taille d’une cartouche .50BMG.

Et ça fait quoi comme effet ?
Ça a un effet relaxant. Il y avait aussi du Tuinal et du Seconal – des barbituriques. Je dois avoir un bon système immunitaire parce qu’avec toutes les merdes que j’ai prises, je cours encore des marathons et des triathlons. Je peux courir 30 km sans problème.

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Enfin bref, ce soir-là chez Max, on s’est fait défoncer. Je me suis endormi à l’extérieur devant l’entrée et mon pote Dave a volé de l’argent à quelques mecs au bar. J’avais 14 ans et j’étais là, dehors, en train de me baver dessus. Soudain, je vois mon pote en train de se faire casser la gueule. Les punks de l’époque avaient des chaussures pointues et ceux de chez Max étaient des casseurs de gueules. Pas comme ces crétins de punks aujourd’hui. Comme j’ai dit dans le livre, ils pouvaient te planter une bouteille vingt fois dans la face juste parce qu’ils en avaient envie. En plus il y avait moins de risques de se faire choper à l’époque. Je regardais donc mon pote se faire défoncer jusqu’à ce qu’il me lance : « Hé, John, aide-moi. » Les autres m’ont regardé : « Ah, t’es avec lui ? » Et… Bam !

Tu te considérais comme un punk à l’époque ?
Je ne sais pas. C’est pas comme si je disais : « Hé, je suis un punk ! » Je ne me définissais pas vraiment. Je me voyais comme un raté, tu vois ce que je veux dire ? Puis j’ai rencontré Nancy et elle m’a appris plein de choses. Elle m’a emmené au CBGB,au Stickballs et dans d’autres boîtes de punk rock. J’aimais l’énergie et la folie qui se dégageaient de ces endroits.

À cette époque, tu étaisdans la rue ou dans un foyer ?
J’étais déjà dans la rue. J’ai passé un peu de temps dans le foyer de garçons de Saint John mais ça ne me convenait pas du tout.

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Comment t’es-tu intéressé à la spiritualité ? D’après ce quej’ai compris dans le livre, tu étais intrigué par le pouvoir supérieur de HR des Bad Brains.
Deux mecs m’ont beaucoup influencé et l’un d’entre eux est indiscutablement HR. C’est un vrai frère. Il m’a mis un micro dans les mains et m’a dit « bouge ton cul et va chanter », alors que j’essayais d’être un batteur.

Donc il y avait HR mais aussi Jerry Williams, qui a énormément participé au premier album des Bad Brains. Il l’a produit, enregistré dans son studio, et c’est d’ailleurs l’homme qui a lancé les Bad Brains. Sans lui, l’album n’aurait jamais vu le jour. Il m’a aussi initié à la nourriture crue. Un jour, HR m’a emmené manger végétarien et m’a commandé un « bol du dragon ». Je me suis dit : « OK, et où est la viande de dragon, bande d’enfoirés ? » C’étaient des algues et j’avais un peu de mal avec ça. J’adorais HR mais j’ai pas pu m’empêcher de courir au coin de la rue pour me choper un hamburger. Puis il m’a emmené au Vegetarian Paradise et au Cauldron sur la 6ème rue. Finalement c’était pas si mauvais. Plus tard, j’ai trouvé un job chez Prana Foods où je bouffais gratuitement.

Tu filais de la bouffe gratuite aux mecs des Bad Brains aussi ?
Oh oui, ils venaient souvent. Je leur faisais des sacs de 100 $ de sandwiches.

J’essaie de t’imaginer travaillant chez Prana avec tous ces clients hyper menaçants qui venaient.
La vitrine ressemblait un peu à celle-ci (celle du bar à jus). Soudain, cinq types louches débarquaient et je leur disais : « Alors, il vous faut quoi les gars ? »

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J’aime bien ta manière de décrire la première fois qu’un mec, dans un club en Virginie, t’a parlé des Bad Brains.
J’étais la plus vénère des recrues, mec. J’ai pris et vendu des drogues, je faisais tout ce que je voulais.

Donc t’étais dans l’Armée – tu faisais encore partie de l’US Navy ?
Ouais. Je quittais la base pour aller boire des coups. J’enlevais mon uniforme, je mettais ma veste en cuir et j’allais voir des groupes. J’ai vu les Teen Idles et les Untouchables au Taj Majal. Un jour, Doug, le propriétaire, est sorti en courant et a gueulé : « Mec, faut que tu viennes voir ce putain de groupe. » J’ai répondu : « Cool, OK, j’irai les voir. » Il a dit : « Non, non, tu comprends pas. » On aurait dit qu’il venait de voir vingt personnes se faire tirer dessus par un terroriste. Il était complètement bluffé. Je suis monté voir et ces enfoirés m’ont fait halluciner dès la première chanson.

Ça a dû être dingue de les voir si tôt.
Tu sais, je me fous bien de savoir dans quel trip il est maintenant, je lui dois tellement que jamais je ne pourrais lui manquer de respect. C’est un génie et un être humain exceptionnel. On a tous nos problèmes et c’est normal. Tu sais, les Bad Brains ont changé le cours des choses, mec. C’est pour ça que lorsque je demande à des jeunes s’ils ont déjà entendu parler des Bad Brains et qu’ils me répondent « non », je leur dis : « Alors va acheter leur putain de CD. Va acheter le DVD de leur concert au CBGB en 1982. Fais tes devoirs et va t’instruire sur ce groupe. »

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Aujourd’hui, je ne connais pas de groupes de punk rock qui arrivent à la cheville des Bad Brains. Personne n’innove.
Personne. Ce sont juste de gros cons avec du maquillage et c’est franchement dégueulasse.

Est-ce que t’es le genre de mec qui préférait le New York d’avant ? La belle époque te manque ?
Disons que maintenant, ma mère peut marcher dans la rue sans se faire agresser. Mais d’un autre côté, je pense qu’on verrait beaucoup moins de blaireaux si c’était toujours aussi dangereux. À l’époque, c’était chaud d’aller à Alphabet City. L’avenue A était pour les audacieux, B pour les intrépides, C pour les tarés et D pour les morts. Et puis je paie tellement cher pour mon appartement aujourd’hui. D’ailleurs, j’ai écrit une chanson appelée « Seeds of Destruction ». On a planté ces graines il y a bien longtemps. Aucun empire ne dure longtemps, et les États-Unis sont les prochains sur la liste.

Tout ça n’est rien à côté de la vie de John. Si le punk rock ou les « outsider qui réussissent » vous intéressent, lisez The Evolution of a Cro-Magnon de John Joseph.

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