À la recherche des « meilleurs soldats »

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reportage

À la recherche des « meilleurs soldats »

Le Cambodge compte un nombre terrifiant de mines antipersonnel enfouies sous ses terres. L’année dernière, un rapport émanant du Centre cambodgien d’information sur les mines et autres objets explosifs déclarait que plus de 250 personnes avaient péri...

Le Cambodge compte un nombre terrifiant de mines antipersonnel enfouies sous ses terres. L’année dernière, un rapport émanant du Centre cambodgien d’information sur les mines et autres objets explosifs déclarait que plus de 250 personnes avaient péri – ou été grièvement blessées – en marchant sur une mine pour la seule année 2012. Durant la guerre qui s’est étalée de la fin du début des années 1970 à 1999, les deux camps en utilisaient ; durant la guerre froide, elles étaient manufacturées dans les pays communistes – Chine, URSS ou Vietnam – mais aussi aux États-Unis. Pol Pot, dictateur rouge responsable de la mort de quelque 1,7 millions de Cambodgiens, avait même donné un nom aux mines que ses militaires disséminaient partout dans le pays : « Ce sont mes meilleurs soldats » avait-il reconnu.

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Il est encore aujourd’hui difficile de connaître précisément le nombre de mines endormies et potentiellement actives dans le pays. Certains rapports prétendent que le nombre varierait entre 4 et 6 millions. D’autres situent le chiffre aux alentours de 10 millions.

Vivant moi-même au Cambodge, j’ai rencontré plusieurs personnes handicapées ayant survécu à l’explosion d’une mine antipersonnel. C’est chose courante, ici. Parmi les organisations aidant ces personnes, on compte le Centre d’action anti-mine cambodgien (CAAC), créé en 1992. Ce groupe emploie 1 700 hommes et femmes œuvrant à la neutralisation des mines et aux soins des personnes blessées par des mines via différents bureaux dans le pays.

L’armée nord-Vietnamienne communiste a commencé à utiliser des mines antipersonnel à partir de 1967 et durant toute la longueur du conflit vietnamien ; elle les disposait sur les routes et les voies d’accès, jusqu’à la frontière cambodgienne. L’armée américaine, en réponse, s’est mise à larguer du napalm et disséminé des milliers de mines partout dans la jungle, jusqu’au niveau de la frontière, puis par-delà la frontière, sur le territoire cambodgien – alors pays neutre.

Cette utilisation des mines s’est perpétuée durant le conflit cambodgien des années 1970 qui opposait le général Lon Nol – soutenu par les États-Unis – aux Khmers Rouges. À ce point que, lorsque les Khmers s’emparèrent du pouvoir en 1975, le pays était devenu « une prison sans murs » – Pol Pot s’en était réjoui. Après la guérilla de 1979 et jusque dans le courant des années 1990, les mines ont servi aux multiples groupes armés du pays à protéger leur territoire et à démoraliser leurs adversaires. Lors du Programme de circonscription K5 de 1985, plusieurs millions de mines ont été déployées par des milliers de travailleurs de l’État sur une surface de 600 kilomètres, tout au long de la frontière thaïlandaise, afin de repousser les derniers guerriers rebelles.

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Ces deux dernières années, j’ai pris en photo les travailleurs du CAAC et ai documenté le travail extrêmement dangereux qu’ils fournissent pour le bien de la population en échange d’un salaire ridiculement faible. Elles sont disponibles en haut de cet article.

Vous pouvez voir plus de boulots de George sur son site