Derek Ridgers a passé sa vie à photographier les kids de Londres
The George, 1977. The above image is a crop, view original image here

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Derek Ridgers a passé sa vie à photographier les kids de Londres

L'artiste londonien nous a reçus pour parler contre-culture et discothèques fétichistes.

Londres est une ville connue pour pas mal de trucs chiants – les fish and chips, les pièges à touristes, les restaurants indiens, et j'en passe. Mais Londres restera la capitale de la vie nocturne débridée, faite de beuveries généralisées et de nuits passées dans des clubs plutôt glauques. Certes, les boîtes ferment les unes après les autres, mais la capitale britannique demeure l'une des meilleures villes pour faire la fête.

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Derek Ridgers, que l'on connaît notamment pour sa série photo Skinheads : 1979-1984 et ses clichés d'Ibiza d'avant la génération rave, a capturé les kids des différents clubs de la ville pendant cinq décennies. Si musiques et styles vestimentaires se sont succédé, l'engouement des fêtards de Londres est resté le même.

En novembre prochain, Derek publiera une série photo intitulée The Dark Carnival : Portraits from the Endless Night. Je suis passé le voir pour qu'il me parle de lui, de sa vie et de ses photos.

VICE : Salut Derek. Comment vous est venue cette passion pour les portraits de jeunes en train de faire la fête ?
Derek Ridgers : En fait, j'ai toujours été fan de musique. J'apportais mon appareil photo lors des concerts et me plaçais dans les premiers rangs. Je me faisais passer pour un pro pour qu'on me laisse approcher mes groupes préférés. En 1976, le punk est arrivé, et j'ai remarqué que le public n'était plus le même. J'ai donc simplement eu l'idée de me retourner et de prendre en photo les spectateurs.

De quand datent les photos de The Dark Carnival ?
La première photo a été prise le jour de l'ouverture du premier club punk de Londres, le Roxy, en décembre 1976. Les dernières images datent du début d'année. Elles ont été prises au Torture Garden.

Kate and Lesley, Bridge House, 1979

Vous venez de Londres ?
Oui. J'ai grandi à Chiswick, dans l'ouest de Londres. Quand j'étais gamin, ma mère m'emmenait à Piccadilly ou à Soho. Dès mes douze ans, j'y allais tout seul, je fouinais, à la recherche de CDs et de livres d'occasion. Je me promène toujours dans ces quartiers-là.

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Hormis le Roxy, quel autre club vous a marqué ?
Le Vortex. Si ces deux clubs n'avaient pas existé, je n'aurais jamais choisi de devenir photographe. Ils étaient toujours remplis, et l'atmosphère était incroyable. Ces clubs, punks avant l'heure, étaient parfaitement adaptés à une immersion totale.

À partir des années 1980, le Taboo est devenu le meilleur club. Si vous aviez organisé un attentat en posant une bombe au Taboo, vous vous seriez débarrassé des meilleurs photographes de mode de l'époque ; ils traînaient tous là-bas. L'hypothèse n'est pas si ridicule d'ailleurs – une bombe avait explosé au Café De Paris, à quelques mètres de là.

Dans les années 1990, les meilleures boîtes dans lesquelles j'ai mis les piedsétaient les clubs fétichistes : le Submission et le Torture Garden. Les tenues étaient très recherchées. Aujourd'hui, si les gens veulent aller dans un club fétichiste, ils peuvent acheter un costume en ligne. À l'époque, ce n'était pas si facile, alors les clients redoublaient d'efforts. Le Torture Garden existe toujours, mais ce n'est plus ce que c'était.

Julia, Blitz, 1979

Parmi toutes les contre-cultures que vous avez photographiées, laquelle est votre préférée ?
Je ne crois pas avoir eu d'affinité particulière avec une contre-culture spécifique. Je suis grand et j'ai un physique assez bizarre, donc j'aurais fait un piètre New Romantic. Quand la mouvance mod est apparue, j'étais encore trop jeune pour en faire partie. J'ai été skinhead pendant un moment, mais je faisais peine à voir – je n'avais pas la thune pour acheter les fringues et je n'aimais pas me battre.

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Quel regard portez-vous sur les représentations des différentes contre-cultures à l'écran ?
Pour être honnête, je trouve que les représentations de la youth culture à la télé et dans les films sont nulles. En revanche, jamais je ne me permettrais de critiquer This Is England, pour la simple et bonne raison que je ne l'ai pas regardé. Ces films ne s'adressent pas à des gens comme moi. J'ai passé 50 années aux côtés des jeunes. Ces films sont faits pour des gens qui n'ont pas connu ces mouvances et qui veulent en savoir plus.

Que pensez-vous des contre-cultures contemporaines, qui naissent plus souvent en ligne que dans les rues ?
Je ne fais pas partie de ces gens qui pensent que c'était mieux avant. Les gens sont plus intéressants et plus libres aujourd'hui que par le passé.

Jessica, Wag Club, 1983

Vous avez assisté à la fermeture de nombreuses boîtes de nuit. Vous le vivez comment ?
Londres est un organisme vivant, qui évolue constamment. Des éléments naissances et d'autres meurent c'est la vie. Il ne reste pas beaucoup de clubs aujourd'hui, mais qui sait ce que se passera dans l'avenir ?

Pour finir : qu'est-ce qui vous plaît tant dans la photo de boîtes de nuit ?
J'adore l'énergie du lieu, la façon dont les jeunes gens s'expriment à travers ce qu'ils portent. Prenez Leigh Bowery, par exemple. Il était vraiment excentrique et photogénique. Évidemment, on ne trouve pas des mecs comme lui à tous les coins de rue, mais la même énergie est présente en chacun de nous.

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Merci Derek.

The Dark Carnival : Portraits from the Endless Night de Derek Ridgers sortira en novembre.

Jak Hutchcraft est sur Twitter.

Plus de photos ci-dessous :

Kitty K, Sub, 1995

Canie, 1996

Lucy, Torture Garden, 1997

Kashpoint, 2004

Lisa, Torture Garden, 2015

Paul, Palace, 1982