Dans l’intimité des garçons « genderfuck » de Toulouse

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Dans l’intimité des garçons « genderfuck » de Toulouse

Voici à quoi ressemblent les soirées des jeunes gens queer et gender bender de la ville rose.

Cette série photo, que j'ai intitulée « Bang Bang Malamour », a été réalisée à Toulouse sur une période de deux ans. Elle illustre les soirées de garçons « genderfuck » rencontrés sur les réseaux sociaux. Donner une définition bien arrêtée de ce que signifie être « genderfuck » serait bien hasardeux, tant chacun entretient un rapport unique à cette pratique. Néanmoins, j'ai pu observer chez chaque garçon que j'ai photographié une défiance envers le cloisonnement des genres, et une volonté d'afficher sa liberté d'être soi-même, en dépit des normes et des conventions. Ils ont ainsi conscience de bousculer à leur manière l'ordre établi, en adoptant simultanément des codes féminins et masculins dans leurs styles vestimentaires.

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Féministes et engagés, ces garçons qui appartiennent au milieu queer toulousain ont accepté de m'emmener avec eux dans leurs soirées extravagantes, qui se déroulent ponctuellement dans les caves de bars gay friendly. On y revient aux fondamentaux de la culture club gay : des morceaux pointus sont mixés à des sons plus mainstream issus de la culture pop et les participants dansent avec des mouvements inspirés du voguing et du twerking. Dans ces soirées, tout est fait pour créer des espaces sûrs, dans lesquels on peut être soi-même, sans craindre les jugements extérieurs. Souvent, ce sont des filles qui jouent les gros bras pour mettre dehors les lourdauds qui s'y égarent. Rien à voir donc avec les soirées classiques des clubs hétéros, dans lesquelles les filles doivent être les plus sexy du dancefloor et les garçons sont en rut. Ici, quand on est un mec, on n'hésite pas à s'afficher en crop top et mini short pour en mettre plein les yeux. Les looks sont travaillés et réalisés à peu de frais grâce à des pièces 80s, 90s et années 2000 chinées dans des friperies.

Ces petites bulles de liberté restent néanmoins rares. Peu nombreux à Toulouse et en France, les « genderfuck » sont en effet marginalisés au sein même de la communauté gay à laquelle ils appartiennent. Certains m'ont ainsi dit assister à une forme de repli sur soi de la communauté gay, qui tend de plus en plus à se diluer et s'effacer dans la norme hétérosexuelle dominante, où il ne faut pas faire tâche et où s'effacent peu à peu les signes distinctifs et parfois stigmatisants de la culture gay.

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Au fil de nos soirées, des liens d'amitié se sont tissés entre nous, me permettant de rentrer dans l'intimité de leurs appartements. Rapidement, ces moments que je photographiais se sont mêlés à ma propre vie. Or, cette période au cours de laquelle j'ai réalisé ces images a également été pour moi le temps d'une relation amoureuse passionnelle, dévorante et finalement déchirante. Différents motifs constituent ainsi la trame de cette série d'images : entre passion et amitié, féminité et masculinité, affirmation de soi et disparition.

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