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Le guide VICE de l'Euro 2012

Oubliez tout pour les 30 prochains jours : c'est la mite du football

L'Euro 2012 commence ce vendredi 8 juin, et tout le monde est hyper content, à part peut-être les rates, les enfants à barbe qui révisent le bac et les enfoirés qui préfèrent le rugby. De notre côté, on s'est acheté des chapeaux farceurs, des bières et une télé beaucoup trop grosse, et on a présomptueusement signifié à l'ensemble de nos interlocuteurs qu'on n'en aurait désormais plus rien à foutre de leurs récriminations et de leurs p'tits mails passé 18h.

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Vu qu'on n'en pouvait vraiment plus d'attendre cette compétition qu'on a déjà tendance à confondre avec nos vacances, on a préparé un petit guide du tournoi, pour vous permettre, par les pouvoirs de journalistes qui nous sont conférés, de ne rien manquer de la compétition. Ça nous a permis de passer le temps, de nous remémorer la pratique ancestrale du calendrier de l'Avent et de collecter un nombre de faits à peu près suffisant pour pouvoir aborder sereinement la perspective d'aller regarder des joueurs qu'on connaît pas tant que ça marquer des buts dans des bars, et ça devrait vous permettre de rivaliser d'érudition avec n'importe quel mec bourré les soirs de prolongations.

C'est en Pologne et en Ukraine, ça commence ce soir, ça finit le 1er juillet, et entre temps, vous aurez liké la fanpage de Jérémy Ménez.

Groupe A

POLOGNE – GRÈCE – RUSSIE – RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

Qu'est-ce que c'est que cette mascarade ? Personne n'y croit, à ce groupe. Quelques journalistes essaient comme ils peuvent de le rendre narratif en le présentant comme le groupe le plus « ouvert » de la compétition, mais à vrai dire, on s'en tape. Alors évidemment il y a dans ce groupe un ou deux talents émergents de type Robert Lewandowski, et des génies aux destins presque français de type Thomas Rosicky, mais on sait très bien comment ça se passe quand on se met à parler de ce genre de joueurs : au bout de deux minutes, on en est à vanter les mérites de la Bundesliga et des classes européennes allemand-latin, au bout de cinq on voit son passé de crate-digger revenir d'entre les morts sous la forme du mot « pépite », et, avant même que la conversation ne soit terminée, on se retrouve rue du Faubourg Saint-Denis à aider ce gros bourge de Vikash Dhorasoo à terminer son bagel.

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Groupe B

ALLEMAGNE – PAYS-BAS – PORTUGAL – DANEMARK

Calendrier

9 juin :
18h : Pays-Bas/Danemark
20h45 : Allemagne/Portugal

13 juin :
18h : Danemark/Portugal
20h45 : Pays-Bas/Allemagne

17 juin :
20h45 : Portugal/Pays-Bas
20h45 : Danemark/Allemagne

ALLEMAGNE

L'Allemagne a gagné tous ses matches de qualification, et cette attitude de premier de la classe touche l'enseignant démissionnaire qui sommeille en moi et se réveille à 6h30 quatre fois par semaine tandis que sa conviction reste au lit un peu plus longtemps. Cette équipe qu'on aime appeler « la Mannschaft » pour se faire mousser à peu de frais passe son temps à jouer hyper bien au foot depuis la Coupe du monde 2006, à tel point qu'on est tous à deux doigts d'en devenir de fervents supporters. Heureusement, l'entraîneur Joachim Löw et ses adjoints entrent sur tous les bancs de touche d'Europe dans un concert de pulls à col en V assortis et harmoniquement portés à même le torse, et cette curieuse coutume nous rappelle à notre devoir de mémoire et nous aide à ne pas oublier de détester les Allemands.

Coup de projecteur sur : Mesut Özil

L'Allemagne compte sur Schweinsteiger, Khedira et Thomas Müller pour mettre un terme au règne des Espagnols que j'appellerais volontiers les « Ibères » pour les faire chier un peu, mais à notre avis, c'est surtout Özil qui va faire la différence, parce que d'après les chiffres de la FIFA, ça fait deux ans que le pied gauche de ce démon de la passe permet au Real Madrid de passer de sa moitié des terrain à la surface de réparation adverse en moins de six secondes, et que d'après nos propres statistiques, ça fait à peu près autant de temps qu'on a perdu tout sens des réalités pour plonger nos corps et nos toutes petites âmes dans les yeux globuleux et fascinants de ce sautillante dribbleur à tête de grenouille.

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Pronostic : 

PAYS-BAS

Les Pays-Bas ont contrarié tout le monde en battant le Brésil contre le cours du jeu en 2010, mais à vrai dire ça n'aurait pas dû nous étonner tant que ça, venant d'un pays qui se bat contre le cours de l'histoire depuis bientôt quatre siècles. C'est à peu près la même équipe qu'il y a deux ans, à ceci près que le brassard de capitaine a migré du bras noblement indonésien de Giovanni van Bronckhorst au biceps crapuleux de Mark van Bommel, et que, malgré leurs neufs victoires en dix rencontres de qualifications, on n'est toujours pas sûr que les Hollandais sachent vraiment quoi faire de l'espace laissé vacant par les cuisses célestes et colossales de Clarence Seedorf

Coup de projecteur sur L'opinion publique

Le sélectionneur hollandais Bert van Marwijk a pris l'habitude de dissimuler son nom compliqué derrière un 4-5-1 qu'il porte sans cesse sur lui, et au sein duquel, en tant que fin observateur de la vie politique, il se refuse à faire cohabiter deux attaquants. Du coup, pendant que Robin van Persie se pavane en compagnie de sa technique irréprochable et de son sens du beau but, Klaas-Jan Huntelaar, meilleur buteur du dernier championnat d'Allemagne, est quant à lui contraint de rester sur le banc, ce qui fait scandale en Hollande, parce que l'opinion publique préfère la modestie capillaire d'Huntelaar à la gomina fanfaronne de Robin van Persie.

Pronostic : 

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PORTUGAL

Le Portugal est passé par les barrages pour se qualifier à l'Euro, mais à vrai dire ils n'ont rien branlé en matches de groupes parce que ça les gonflait de jouer sans cesse contre des pays plus ou moins scandinaves. Là c'est différent, et on peut compter sur Cristiano Ronaldo, Pépé, Nani et les autres pour témoigner à leurs adversaires le respect qu'ils ne s'embarrassent visiblement pas de témoigner à la notion de nom de famille. Quant à Raul Meireles, c'est probablement le seul Portugais à avoir jamais croisé la route du shoegaze, et ça suffit largement à faire de lui notre nouveau joueur préféré.

Coup de projecteur sur : Ricardo Quaresma

L'Euro commence à peine et on est d'ores et déjà ravi d'avoir trouvé un frère en la personne du sélectionneur Paulo Bento, nous qui pensions être les derniers européens à croire encore en la possible éclosion de Ricardo Quaresma. Ô fleur éternellement hibernante, jeune espoir de 29 ans, vas-tu enfin t'épanouir, toi dont le souffle a déjà éteint plus de dix bougies sur le gâteau rassi de nos espoirs déçus ?

Pronostic : 

DANEMARK

« Filme la Danemark. Grande dédicace à tous les Danemarks. »

Pronostic :

GROUPE C

ESPAGNE – ITALIE – CROATIE – IRLANDE

Calendrier :

10 juin :
18h : Espagne/Italie
20h45 : Eire/Croatie

14 juin :
18h : Italie/Croatie
20h45 : Espagne/Irlande

18 juin :
20h45 : Croatie/Espagne
20h45 : Italie/Irlande

ESPAGNE

Ça fait quelques années que l'Espagne s'est mise à gagner à tout propos, et en principe ça devrait nous faire râler, et nous conduire à tenir des discours résolument peu mesurés à propos des ondulations insolantes de son tilde, de la ville de Marbella et de son agaçante manie d'utiliser des signes de ponctuation à l'envers. Mais le plan, c'est que ça fait depuis 2008 qu'on a nous-mêmes abandonné nos certitudes et rejoint les enfants d'Hamelin pour suivre l'émergence de cette génération géniale qui passe son temps à écouter ses adversaires expirer sous le garrot enchanteur de ses passes redoublées. On soutient la France à fond, mais on serait pas les derniers à se réjouir s'il y avait une finale Espagne-Allemagne, et on finirait peut-être même par tenir dans un élan d'enthousiasme des discours hypocrites sur Jean Monnet, l'identité européenne et les bienfaits de la CECA.

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Coup de projecteur sur : L'Histoire, cette hystérie

Aucune équipe n'a jamais réussi à remporter l'Euro deux fois de suite, mais comme on vous le rappelle si jamais vous êtes en train de réviser le bac, l'histoire humaine est un récit raconté par un idiot, plein de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien, et où tout le monde cite tout le temps des auteurs qu'il n'a jamais lus. Du coup on peut s'attendre à tout de la part des Espagnols, d'autant que Fernando Torres se remet à marquer des buts, et que si tout le monde s'accorde à parler du côté Dostoïevski de Madame de Sévigné, les arbitres, eux, continuent à fermer les yeux sur le côté Gattuso de l'ignoble Sergio Busquets.

Notre pronostic : 

ITALIE

C'est mal barré pour la Squadra dite Azzura, qui nage en plein scandale des matches truqués, a perdu 3-0 face à la Russie son unique match de préparation, et vient d'enregistrer le forfait de Roberto Baggio. Sans compter que sans la contribution amicale du chronomètre de Robert Duverne, l'Italie serait sortie de la Coupe du monde 2010 coiffée du titre honorifique de pipe de la soirée. Heureusement pour eux, les Italiens peuvent compter sur Andrea Pirlo qui a montré cette saison que malgré ses 33 ans il n'avait pas l'intention de renoncer à sa célèbre blague consistant à se transformer en métronome humain chaque fois qu'il entre sur un terrain.

Coup de projecteur sur : Mario Balotelli, évidemment

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Cette année Mario Balotelli a passé son temps à mettre le feu à sa maison en y jouant avec des feux d'artifice, à s'arrêter en voiture pour aller chier dans un lycée, à essayer de casser la jambe d'Alexandre Song, à sortir du champ du logos, à déconner avec son chasuble, à demander pourquoi toujours lui, et à permettre à son équipe de remporter le championnat d'Angleterre. Les Italiens n'ont plus rien à perdre, et dans la mesure où le pays subit chaque jour une nouvelle œuvre d'art nulle visant à dénoncer la politique de Berlusconi, le sélectionneur pourrait bien décider d'associer Balotelli à Cassano et en profiter pour confier à son attaque 100% frappado les clés d'un retour en grâce de la pensée rossetienne dans ce pays en forme de botte.

Notre pronostic :

CROATIE

On sait plus quoi penser de la Croatie depuis que Davor Suker a été remplacé par un attaquant brésilien. En tout cas, nous on a toujours respecté à fond son maillot à damier, son entraîneur plus rusé que le nôtre, et ses frontières encore susceptibles de bouger.

Coup de projecteur sur : Luka Modrić

Luka Modrić est tellement fort que Laurent Blanc le compare à Cruyff, que nous on le compare à Zvonimir Boban, et que si on continue sur cette pente pour se dire que chacun le compare au héros de son enfance, alors probablement faut-il penser que les jeunes d'aujourd'hui le comparent à Marine Le Pen. Il faisait partie du 11-type élu à l'issue de l'Euro 2008, il ne devrait pas tarder à jouer sous les ordres d'un Ecossais bourré, et son pied gauche si caressant pourrait bien être à l'origine de la plus grosse défaite enregistrée par l'Italie face à des Slaves depuis le Traité de Versailles.

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Notre pronostic : 

IRLANDE

L'Irlande s'est dignement relevée de sa défaite en barrages pour la Coupe du monde 2010, et s'est brillamment qualifiée pour l'Euro 2012, mais comme on le savait pas, et qu'en ces temps troublés on peut plus passer deux jours tranquille sans tomber sur un catholique, on a décidé de ne pas trop en parler.

Notre jugement de valeur : 

GROUPE D

FRANCE – ANGLETERRE – UKRAINE – SUEDE

Calendrier :

11 juin :
18h : France/Angleterre
20h45 : Ukraine/Suède

15 juin :
18h : Ukraine/France
20h45 : Suède/Angleterre

19 juin
20h45 : Angleterre/Ukraine
20h45 : Suède/France

FRANCE

Les Bleus ont fait bonne impression lors de leurs deux derniers matches de préparation, et ils ont visiblement l'intention de frapper un gros coup afin de réparer le contexte qu'ils avaient fait exploser y a quelques temps. Notre attaque de cailleras est hyper en forme et, après le premier doublé de Benzema, on va peut-être enfin voir expirer le discours infernal et insidieusement raciste sur le rugby et ses valeurs. Allez les Bleus.

Coup de projecteur sur : L'adverbe de modalisation peut-être

L'adverbe de modalisation peut-être sous sa forme syncopée ptetre est la grande vedette des réponses des joueurs de l'équipe de France chaque fois qu'il est question pour eux d'avoir à parler à des journalistes. Ça donne évidemment lieu à plein de discours condescendants de la part des ironistes de droite qui passent leur temps à prendre leurs certitudes et leurs sapes Kitsuné pour un lieu sûr et qui captent rien à ce surprenant tournant pyrrhonien pris par l'équipe de France. La vérité, c'est que Benzema, Nasri, Menez, Ben Arfa et les autres ont raison de saisir toutes les occasions qui leur sont données d'envoyer chier tous les connards de journalistes et de libre-penseurs nuls qui passent leur temps à leur infliger des leçons de morale et à émettre des jugements sur la façon dont leurs parents les ont éduqués. Nous on adresse un grand bravo aux Bleus et on se félicite de l'influence durable exercée par la Fonky Family sur toute la génération quatre-vingt-ptetre.

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Notre pronostic : 

ANGLETERRE

Ça fait depuis 1996 que l'Angleterre n'a pas dépassé les quarts de finale d'une compétition et tout le monde en a marre parce que c'est quand même toujours cool un tournoi dans lequel l'Angleterre va loin. Du coup on compte sur eux pour aller un peu loin cette année, d'autant que c'est peut-être la dernière de Steven Gerrard, et qu'on sera méga triste quand il aura quitté les terrains pour aller rejoindre Léonard de Vinci, Leibniz, Jacques Attali et les autres grands noms de la Renaissance au panthéon des hommes qui savaient tout faire. Mais trêve d'hypocrisie, on serait pas si mécontent si c'était eux plutôt que nous qui se tapaient l'Espagne en quarts.

Coup de projecteur sur : Fortuna, déesse allégorique romaine

« Les projets dont on a mal délibéré connaissent aussi le succès ; la prudence est trompeuse, et la fortune n'approuve ni ne soutient les causes qui le méritent : mais elle erre à l'aveuglette, au milieu des uns comme des autres. Sans aucun doute il y a une puissance supérieure qui nous pousse et nous régit, et qui dirige les affaires mortelles selon ses lois propres. » (Astronomiques, IV, 95-99)

Depuis quelques semaines, les joueurs de l'équipe d'Angleterre n'arrêtent plus de se blesser sans raison, et le sélectionneur Roy Hodgson, qui va devoir se passer de Franck Lampard, Gareth Barry et Gary Cahill, multiplie les bravades au destin en prenant des décisions pourries comme celle de ne pas sélectionner Rio Ferdinand. On pourrait donc penser l'équipe d'Angleterre affaiblie, mais si l'on en croit notre consultant fataliste Marcus Manilius, nous ne sommes que des Modernes à la pensée cartésiennement corrompue qui oublient trop vite que la déesse Fortune a fait le voyage en Ukraine, et que c'est cette grosse ramasse qui décidera en dernier lieu du sens dans lequel elle décidera de faire tourner sa fatidique roue.

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Notre pronostic : 

UKRAINE

Personne ne sait trop ce que va donner cet Euro, parce que ça se passe en Ukraine, et que c'est la première fois que l'Ukraine organise un truc, mais ce que tout le monde ignore encore plus, c'est qu'Andrei Chevtchenko joue toujours au foot, et qu'il s'apprête courageusement à être l'unique arme offensive de son équipe pour la dix-septième année consécutive. Je suis hyper content de pouvoir le regarder jouer une dernière fois ce buteur tout de sang froid vêtu, et d'avoir l'occasion de me remémorer ses appels foudroyants, dont on se souviendra qu'ils ont ouvert au début des années 2000 le chemin des filets aux timides du monde entier.

Coup de projecteur sur : Ioulia Timochenko

Bon à vrai dire je m'intéresse pas tellement aux à côtés de cet Euro, mais mon oncle progressiste et connecté lit tous mes articles, et je sais très bien que si je mentionne pas le cas Timochenko, je vais recevoir trois mails à accusés de réception et plusieurs liens hypertexte vers des pétitions en ligne d'ici le premier match des Bleus.

Notre pronostic : 

SUÈDE

La Suède est à la recherche de sa première campagne victorieuse depuis la guerre de Scanie, et évidemment on a du mal à imaginer que le miracle puisse avoir lieu, mais d'un autre côté, les Suédois arrêtent pas de se draper dans leur protection sociale parfaite et leurs petits accents anglais maîtrisés, alors qu'ils s'étonnent pas d'être un peu nuls dans un sport où le succès repose quand même à 50 % sur la capacité d'une équipe à adopter collectivement la droiture morale d'une petite frappe méditerranéenne.

Coup de projecteur sur : Ibracadabra

Zlatan Ibrahimovic a été trop fort toute la saison et il n'a pas arrêté de faire plier toutes les défenses de Série A à coup de passes décisives et de reprises de volée, et si certains physiologistes avancent que son secret réside dans la disproportion de ses jambes par rapport à son bassin, les vrais observateurs savent que son véritable atout, c'est ce catogan sardonique à l'aide duquel il contrarie systématiquement les défenseurs adverses.

Notre pronostic : 

Bon, en tout cas, on est hyper content que ça commence, et notre seul regret, c'est que l'Uruguay ne se soit pas qualifié.