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LE NUMÉRO « IL FAUT SAUVER LE SUD-SOUDAN »

Les barons des marais

La lente et inexorable descente aux enfers du Sud-Soudan a commencé avec de mauvais choix géopolitiques.

DE GAUCHE À DROITE : Le président ougandais Yoweri Museveni, le vice-président sud-soudanais Riek Machar, le président sud-soudanais Salva Kiir, le président de l’Assemblée nationale James Wani Igga et le vice-président de l’Assemblée nationale Daniel Awet Akot en train de se recueillir devant la tombe de l’ancien chef rebelle du Sud-Soudan John Garang, à Djouba, Sud-Soudan, le 21 mai 2010. AP Photo/Pete Muller

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Autrefois, on appelait la moitié inférieure du Sud-Soudan l’Equatoria. Ses frontières, qui n’ont presque pas varié au cours de l’histoire, sont en partie matérialisées par le grand marais Sudd – qui signifie « barrière ». Il faut près d’un an à l’eau du Nil Blanc pour inonder ces plaines et donner naissance à des marécages qui, durant la saison des pluies, recouvrent une surface équivalente à celle de la France. C’est près de ces étangs que l’on trouve la plus grande concentration d’animaux migrateurs d’Afrique : crocodiles, girafes, hippopotames, éléphants, ainsi que plus de 400 espèces d’oiseaux.

À la saison des pluies, les habitants de la région se réfugient aussi sur les îles marécageuses. Ces bergers se déplacent au gré des saisons ; ils suivent l’eau quand la pluie laisse la place à un temps plus sec et retournent vers leurs villages sur les hauteurs à l’approche de la saison des pluies suivante. Ces petites unités familiales vivent de la pêche, de la culture de la terre et de la chasse. Ils font partie des 250 millions d’Africains peuplant la savane guinéenne, zone s’étalant sur 600 millions d’hectares et 25 pays – écosystème qui recouvrirait plus de la moitié des États-Unis.

L’histoire l’a prouvé : ce mode de vie a tendance à attirer un certain type d’étrangers. Depuis sa « découverte », un paquet de types louches aux revendications diverses ont essayé de « libérer » le Sud-Soudan.

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Les Dinkas et les Nuers ont composé le gros des groupes rebelles actifs dans la région depuis la première guerre civile soudanaise, dans les années 1950. À la fin des années 1970, après un cessez-le-feu de onze ans, la deuxième guerre civile a éclaté, pour les mêmes raisons que la précédente. Mais cette fois, tous les problèmes avaient été dopés aux hormones. Au milieu des années 2000, des conflits sanglants opposaient toujours les deux camps.

Lorsque George W. Bush est arrivé au pouvoir aux États-Unis, le Soudan était un bourbier géopolitique. La crise du Darfour était sur le point d’éclater et les violences risquaient de s’étendre à l’ensemble du pays. Des années plus tôt, la droite évangélique avait sensibilisé Bush à la situation des habitants du Sud du Soudan. Certains souhaitaient armer les chrétiens du Sud pour les protéger du gouvernement musulman soudanais. Bush a donc dépêché un émissaire spécial sur place fin 2001, dont le rôle était de participer à l’élaboration d’une solution à la « guerre brutale et honteuse » que le gouvernement soudanais menait « contre son propre peuple ». L’accord de paix de 2005 fut une preuve du succès retentissant de cette mission diplomatique.

Selon The Atlantic, il s’agissait d’une simple formalité pour Bush, un « problème légué par ses prédécesseurs » sur la liste des choses à faire en matière de politique étrangère. Mais pour le groupe de parlementaires républicains et démocrates connu sous le nom de « Caucus du Soudan », le succès de 2005 venait récompenser plus de vingt ans passés à tenter de convaincre trois administrations successives de prendre les problèmes du Soudan au sérieux. Ce long travail de fond permettait enfin d’envisager l’indépendance du Sud-Soudan, dont les frontières engloberaient 75 % des réserves pétrolières totales du pays.

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L’approche diplomatique de Bush contrastait avec la ligne dure de Bill Clinton vis-à-vis du Soudan, pays qui avait abrité Oussama Ben Laden et plusieurs autres djihadistes à Khartoum. En 1996, un an après que Ben Laden et sa bande ne tentent d’assassiner le président égyptien Hosni Moubarak, le gouvernement soudanais a cédé à la pression internationale et chassé le réseau terroriste. Le groupe de Ben Laden a relocalisé ses opérations en Afghanistan et au Pakistan – avec les conséquences que l’on sait.

John Garang, qui avait passé deux décennies à diriger les troupes rebelles du Sud avec son Armée populaire de libération du Soudan (APLS) a également joué un rôle décisif dans l’élaboration de l’accord de paix de 2005. Mais deux semaines après la signature de l’accord qui faisait de lui le président de la région désormais autonome du Sud-Soudan, il est mort dans un crash d’hélicoptère. L’engin s’est officiellement écrasé suite aux mauvaises conditions météo, mais diverses théories conspirationnistes ont circulé.

À la mort de Garang, Salva Kiir a pris la tête de l’APLS. Ce Dinka originaire du Warab avait combattu dans l’armée séparatiste Anyanya lors de la première guerre civile. Plus récemment, il était devenu le fidèle second de Garang au sein de l’APLS. Élu en 2010 avec 93 % des suffrages, il a mené le Sud-Soudan au référendum qui devait avoir lieu l’année suivante et lors duquel 98,8 % des voix ont décidé de la sécession. Le plébiscite fut total. Kiir a insufflé une dimension religieuse à son leadership, comparant le rêve de Garang qu’il venait de réaliser au « Josué de la Bible, qui, succédant à Moïse dans la conduite du peuple hébreu lorsque celui-ci s’apprêtait à entrer dans le pays de Canaan, permit aux fugitifs de s’établir sur la Terre Promise ».

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Kiir, colosse à forte personnalité, est fier de son passé militaire et de ses vingt-deux années de combat. Lors d’une visite à la Maison Blanche en 2006, Bush lui a offert un chapeau de cow-boy, qu’il ne semble pas avoir quitté depuis. Son Stetson le suit dans toutes ses visites officielles, et il le portait même quand il a signé la déclaration d’indépendance du Sud-Soudan.

Ses détracteurs disent qu’il aime boire et qu’il est sujet à des accès de colère – défauts qui s’expliquent par ses années passées à la tête de groupes tribaux ultra-violents. Mais ce comportement est profondément problématique chez un homme politique dont le rôle est d’unifier un pays gangrené par la guerre.

Le Sud-Soudan est officiellement devenu un État-nation le 9 juillet 2011, suite à la ratification de sa constitution intérimaire. Kiir et son vice-président Riek Machar, camarade de l’APLS, ont défilé côte à côte devant un parterre de chefs d’États africains. Parmi eux, le président ougandais Yoweri Museveni ; le Zimbabwéen Robert Mugabe, plus ancien dirigeant en exercice du continent ; le président sud-africain Jacob Zuma ; le Premier ministre d’Éthiopie Meles Zenawi ; Teodoro Nguema Obiang Mangue, l’homme fort de la Guinée équatoriale, riche en réserves pétrolières et le Soudanais Omar el-Béchir, accusé de génocide par la Cour pénale internationale en 2010.

Mais l’état de grâce a vite cédé la place aux problèmes logistiques, comme la nécessité de nourrir le peuple et d’imprimer des timbres (ce que le gouvernement du Sud-Soudan a foiré à plusieurs reprises). D’après L’ONU, il a fallu 763 millions de dollars d’aide pour maintenir le pays à flot en 2012. USAID a apporté une aide supplémentaire de 323 millions de dollars en 2013, mais a éprouvé des difficultés à opérer liées « à l’insécurité, au harcèlement des organisations humanitaires et aux restrictions imposées par le gouvernement du Sud-Soudan ». Une déferlante d’intentions charitables et de dons a inondé le Sud-Soudan, à l’image des eaux du Nil Blanc, mais la situation semblait perdue d’avance.

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Les 22 agences de l’ONU disposant d’un mandat au Sud-Soudan avaient beau avoir un milliard de dollars à dépenser, elles eurent du mal à s’ancrer dans la région et soulignèrent que « les défis que doit relever le plus jeune État du monde sont insurmontables, tant par leur taille que par leur complexité. Les structures étatiques viennent juste d’être mises en place et le système de livraison entre les différents secteurs est soit inexistant, soit défectueux. La corruption touche le gouvernement à tous les niveaux et les mécanismes de contrôle, quand ils existent, se sont révélés inefficaces. En l’absence de mécanismes politiques et socioculturels, les conflits violents demeurent un problème quotidien. »

En 2014, l’ONU a affecté 924 426 000 dollars à la gestion des problèmes du Sud-Soudan. C’est ce que coûtent tous les ans 8 000 policiers et soldats en uniforme, les différents échelons gouvernementaux et les hommes chargés de prévenir les catastrophes humanitaires frappant régulièrement le nouveau pays. En mars 2014, l’ONU a lancé un appel aux dons avec pour objectif 1,27 milliard de dollars à récolter d’ici juin, dans l’espoir de circonscrire le chaos régional endémique qui s’étend du Sud-Soudan à la République centrafricaine. L’ONU estime que 3,2 millions de Soudanais requéraient une aide d’urgence, ce qui laisse présager de graves conséquences pour les pays voisins.

George W. Bush et Salva Kiir dans les bureaux du président américain, le 5 janvier 2009. AP Photo/J. Scott Applewhite.

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Un tas d’ONG aux préoccupations diverses ont afflué au Sud-Soudan dans la foulée du référendum de 2011. En 2010, 150 ONG internationales étaient officiellement enregistrées dans la région. Elles ont embauché des locaux et tenté d’améliorer l’état du pays de diverses manières. Aujourd’hui, la plupart ont foutu le camp, rapatrié leurs employés et abandonné équipements et véhicules aux pillards.

En août 2011, le gouvernement a commandé un rapport à la Joint Donor Team, une association d’aide au développement qui l’a aidé à dresser un plan budgétaire national basé sur les revenus pétroliers escomptés qui, selon le FMI, représenteraient 98 % des recettes du Sud-Soudan – contre seulement 57 % des revenus du Soudan.

Le résultat, un plan de développement de 413 pages pour les années 2011-2013, prévoyait que les revenus pétroliers atteindraient leur sommet dès 2011, puis décroîtraient vite jusqu’à se tarir définitivement. Le tarissement imminent de cette manne financière combiné aux prévisions d’augmentation de la population et à un taux de pauvreté d’environ 50 %, ne permettait pas d’envisager l’avenir sous un jour radieux. Mais les dirigeants du pays, les nombreux anciens combattants, les membres de leur famille, les instances nationales, régionales et locales, les chefs de tribus et les hommes d’affaires ont tous cherché à tirer profit des gains envisageables à court terme.

Une triste statistique se cache parmi les 413 pages du rapport : les 3,5 milliards de barils qui devraient être extraits des sols sud-soudanais dans les vingt années à venir devraient rapporter environ 38 milliards de dollars au pays. Ensuite, ce sera terminé.

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Pour le budget 2014, les officiels sud-soudanais ont estimé qu’il fallait 4 milliards de dollars pour financer le fonctionnement quotidien du gouvernement. Ils n’ont réussi à grappiller que 2,2 milliards, le reste étant dévolu aux taxes sur l’acheminement du pétrole, à la dette extérieure et aux projets de construction d’infrastructures.

Le plan de développement d’août 2011 reposait sur l’idée optimiste que le pétrole serait acheminé sans encombres jusqu’à Port-Soudan, dans le Nord, et que les deux pays travailleraient de concert pour exporter le pétrole et s’en partager les profits. Cependant, en juillet 2012, le Soudan et son voisin du Sud ne sont pas parvenus à trouver d’accord concernant les droits d’usage des oléoducs. Ces derniers ont donc été rapidement coupés et avec eux, la principale source de revenus du Sud-Soudan. Kiir a accusé le gouvernement soudanais d’avoir volé 815 millions de dollars au Sud en guise de représailles. Mais cette escarmouche devenant insupportable pour les deux parties, en septembre 2012, les oléoducs ont réouvert.

Le 3 mai 2012, moins d’un an après la naissance du Sud-Soudan, Kiir a envoyé ce qu’il qualifie de lettre privée à plus de 75 hommes politiques de haut rang et à des membres du gouvernement, les accusant d’avoir dérobé 4,2 milliards de dollars de fonds publics. Il leur a demandé de les rembourser et, chose étrange, leur a donné des instructions pour déposer l’argent sur un compte en banque spécifique que le gouvernement du Sud-Soudan avait ouvert au Kenya. Kiir a précisé qu’il était le seul, à l’exception d’un membre de son équipe, à avoir eu accès à la lettre ; pourtant, Associated Press en a obtenu un exemplaire début juin. Cet incident rappelait, dans des proportions toutefois bien supérieures, une autre affaire foireuse survenue en 2006. Arthur Akuien Chol, alors ministre des Finances du gouvernement provisoire, avait été révoqué après avoir été accusé de la mauvaise gestion d’une allocation soudanaise de 60 millions de dollars destinée à créer des institutions civiles. Il avait par la suite impliqué le secrétaire général de la région, Pagan Amum Okech, prétendant que celui-ci lui avait intimé de lui verser la moitié des 60 millions.

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Où est passé l’argent, cette fois ? Personne ne le sait. Kiir a jugé que les accusations de corruption devaient rester aussi discrètes que possible, de peur qu’elles ne déchirent le gouvernement. Machar, lui, a tenu à savoir où était passé l’argent. Sa curiosité n’allait pas tarder à le mettre en porte-à-faux avec Kiir.

Cette somme devait couvrir trois dépenses : l’embauche de soldats et de fonctionnaires, le revêtement des routes et la construction d’une réserve de céréales. La lettre de Kiir allait créer une scission au sein du gouvernement : malgré les milliers d’anciens rebelles et de membres de leurs familles payés par le gouvernement, peu – voire pas – d’infrastructures avaient été construites.

En juin 2013, les oléoducs ont de nouveau fermé. Cette fois-ci, le Soudan accusait Djouba de soutenir les rebelles qui s’opposaient à Khartoum. Le Sud-Soudan a protesté, ce qui n’a eu aucun effet sur le fonctionnement des oléoducs.

Le Sud-Soudan prétendument « riche en pétrole » était en fait un pays endetté qui avait emprunté presque 500 millions de dollars à d’autres pays : 100 millions à la Banque nationale du Qatar et 100 autres au Standard Bank Group de Johannesbourg. En septembre 2013, le FMI promettait une rallonge de 50 millions. Selon certaines rumeurs, les États-Unis injectaient des fonds dans le Sud-Soudan pour consolider le gouvernement de Kiir. Lorsque le pays a déclaré qu’il ne pouvait plus payer ses fonctionnaires en novembre 2013, de nombreux médias ont révélé qu’il devait 4,5 milliards à diverses banques commerciales.

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Le Sud-Soudan a donc suivi les pas du Soudan, dont l’économie demeure plombée par une dette de 41,5 milliards de dollars – dont 87 % d’arriérés selon la Banque mondiale. Mais cette situation désastreuse avait mis un siècle à s’installer au Nord. Le Sud-Soudan avait à peine deux ans et contrôlait la majorité des réserves de pétrole. Aucune explication ne pouvait justifier ce fonctionnement ridicule. En gros, le Sud-Soudan était un cas désespéré.

À l’exception du pétrole et de l’aide financière se volatilisant entre les mains de rapaces incompétents, sur quoi repose l’économie du pays ? Sur rien. Les Sud-Soudanais vivent au jour le jour, cultivent la terre quand il pleut, surveillent leurs troupeaux de vaches, de chèvres et de moutons et dépensent leurs maigres gains pour acheter une chaise en plastique, un t-shirt ou une carte téléphonique, tout en s’accrochant à l’espoir que des fusillades ne viendront pas balayer leur dur labeur du jour au lendemain. Le seul commerce que le Sud-Soudan connaisse, c’est la guerre, et il ne la fait même pas très bien. L’APLS a peut-être réussi à transformer son bras armé en gouvernement, mais la seule source de revenus stable du pays provient du partage du magot laissé par des sources extérieures qui cherchaient à l’« aider ».

C’est pourquoi quand les élections de 2015 ont menacé de sanctionner son favoritisme de chapelle et sa corruption, Kiir a réagi de la seule manière qu’il connaisse. Le 22 juillet 2013, il a dissous son gouvernement et a donné l’ordre d’arrêter de nombreux politiciens impliqués dans divers scandales. Sa constitution provisoire comprenait une clause qui l’autorisait à licencier des gouverneurs élus démocratiquement si les circonstances l’exigeaient. Légalement pourtant, cette disposition n’existait plus ; la constitution de 2011 avait remplacé ce pouvoir suprême par un vote démocratique. Kiir n’en a rien eu à foutre. Son mode de gestion autoritaire était au-dessus de la constitution et de la démocratie. La manière dont les factions au pouvoir, déjà divisées, ont commencé à se déchirer, laissait préfigurer l’échec de l’indépendance du Sud-Soudan.

Les salaires n’étaient toujours pas payés. Les plus proches alliés de Kiir l’ont abandonné. En novembre 2013, le ministre des Finances Aggrey Tisa Sabuni a reconnu que le pays se dirigeait vers l’effondrement. « Nous sommes étouffés par notre dette et nous ne pouvons plus lui échapper », a-t-il expliqué à Voice of America. Les mesures d’austérité mises en œuvre ont bien sûr épargné la poignée de fonctionnaires de haut rang qui recevaient toujours leur salaire et leurs avantages. Le mécontentement s’est généralisé lorsque les fonds promis à la réalisation de projets ont été suspendus.

Mabior Garang, le fils aîné du défunt John Garang, ne l’entendait pas de cette oreille. Assisté de la veuve de John Garang, ancienne ministre des Transports, et de Machar, Mabior s’est élevé contre l’autorité de Kiir. Le 6 décembre, le trio et ses soutiens ont tenu une conférence de presse pour expliquer ce qu’ils reprochaient au président.

Comment un pays de moins de trois ans pouvait-il déjà devoir 4,5 milliards de dollars aux États-Unis ? Comment Kiir pouvait-il justifier des dépenses visant à créer une « garde républicaine » de 15 000 hommes en parallèle des forces armées existantes ?

Inspiré par la conférence de presse, un groupe composé de Dinkas, de Nuers, de Shilluks et d’autres membres de l’APLS a annoncé qu’une session du Conseil de libération nationale serait consacrée à l’étude de la corruption. Elle serait suivie d’un rassemblement public le 14 décembre. Kiir s’est alors adressé à ses opposants en proclamant qu’il n’accepterait pas une redite de 1991 (lorsque les rebelles nuers de Machar avaient massacré les Dinkas de Bor). Les partisans de Kiir ont entonné des chants de guerre tandis qu’il condamnait ses détracteurs. Nombre d’hommes politiques n’ont pas assisté au rassemblement de Kiir le 14 décembre, ce qui l’a mené à suspecter un coup d’État imminent contre son gouvernement. Le lendemain, il a donné l’ordre à sa garde présidentielle de désarmer tous les Nuers du Bataillon Tigre et a publié une longue liste de délinquants devant être arrêtés.

Le 15 décembre, Kiir a déclaré une guerre ouverte aux Nuers. Un horrible nettoyage ethnique a débuté, campagne qui a fait entre 500 et 10 000 morts (à ce jour, aucune source fiable ne fait état d’un chiffre précis). Des affrontements ont éclaté dans les baraquements de Djouba où on a ordonné aux Nuers de rendre leurs armes. Une milice dinka nommée « Gelweng » (« les gardiens de bétail ») a reçu l’ordre de faire le tour des maisons, d’établir des contrôles routiers, d’aligner les hommes le long de la route, de les interroger, de les battre et de les exécuter. Kiir a qualifié Machar de « prophète du malheur ». Des chars sont arrivés devant la résidence officielle de Machar et l’ont rasée, éliminant au passage tous les gardes du corps et les employés de maison.

Cependant, un membre de la garde présidentielle ayant averti Machar et sa femme Angelina, ceux-ci ont eu le temps de s’enfuir.

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