L’Histoire du septuagénaire qui voulait traverser l’océan Atlantique sur une baleine en acier
Tom McClean et « Moby » la baleine. Toutes les photos sont de Luke Montgomery.

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reportage

L’Histoire du septuagénaire qui voulait traverser l’océan Atlantique sur une baleine en acier

Tom McClean a quitté les forces armées britanniques pour naviguer sur des rafiots plus étranges les uns que les autres.

Je suis sur les rives d'un loch à l'ouest des Highlands écossais, face à un grand cachalot d'une vingtaine de mètres ; sa queue s'élève à la hauteur des collines rocailleuses et des bruyères qui se dessinent au loin. En m'approchant, j'aperçois la mousse peinturlurée qui constitue sa peau et la petite plaque en acier qui forme une courbe le long de son ventre. C'est un bateau – mais pas l'un de ceux que l'on a l'habitude de voir tous les jours.

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Son créateur, Tom McClean, est à côté de moi. Nous sommes au centre d'aventures en plein air qu'il dirige depuis plus d'une trentaine d'années, sur l'une des rives du Loch Nevis, près de Skye. Depuis, il a lui-même eu sa dose d'aventure : ce bateau unique est la dernière initiative d'une vie passée à donner forme aux produits d'une imagination excessivement débordante.

« Je suis resté un aventurier », dit-il. « J'essaye d'avoir des idées originales. J'essaye un peu tout. »

McClean a surtout passé son temps à « essayer » beaucoup de choses avec l'océan Atlantique. En 1969, alors qu'il était soldat dans les SAS, il a été le premier homme à traverser l'Atlantique Nord à la rame, rejoignant l'Irlande depuis Terre-Neuve : un voyage de plus de 3 000 km, terminé après 71 jours à batailler contre des tempêtes de mer monstrueuses, des vagues énormes, des températures glaciales et un malheureux chavirement. Après cela, il a entrepris de refaire la traversée de l'Atlantique, quatre fois, avec des rafiots construits de ses propres mains, chacun rivalisant en excentricité. En 1982, il a décroché le record de la traversée de l'Atlantique avec le plus petit bateau, un yacht de 2,72 m baptisé Giltspur. Lorsque l'Américain Bill Dunlop a traversé l'Atlantique trois semaines plus tard, dans un bateau de vingt centimètres de moins, McClean en a scié 60 de son embarcation, y est retourné, et a récupéré son titre.

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En 1985, il a passé 40 jours à vivre seul sur Rockall, un bloc de granit en plein milieu de l'Atlantique, à quelques centaines de kilomètres à l'ouest des Hébrides, dans ce qui semble être une tentative infructueuse de revendication britannique du rocher. Quelques années plus tard, âgé de 44 ans, il a replongé ses rames dans les vagues de l'Atlantique Nord, effectuant la traversée en 50 jours – décrochant au passage le record de la traversée la plus rapide. Ensuite, cherchant un prétexte pour retourner dans l'océan, il est parti de New York dans un bateau en forme de bouteille de bière – étrangement sponsorisé par une marque de thé.

Son dernier projet s'appelle Moby ; un bateau d'une soixantaine de tonnes en forme de cachalot, avec une bouche peinte, des yeux et un évent qui expulse de l'eau dans les airs. McClean souhaite encore traverser l'Atlantique : « Il m'a fallu beaucoup, beaucoup d'efforts pour le réaliser », avoue-t-il. « Beaucoup de gens ont des rêves extraordinaires qui sont souvent freinés par le manque d'argent. Nous avons continué. Tout ce que nous cherchons maintenant, c'est quelqu'un qui puisse en faire bon usage. »

Ce bateau baleine a été imaginé lorsque, de retour de ses aventures au milieu des années 1990, l'insatiable McClean s'est remis à rêver de traversées. À l'armée, McClean se faisait surnommer « Moby » à cause de sa propension à « divaguer ».

Il a conçu le bateau lui-même, après qu'un ingénieur nautique qu'il avait contacté afin de dessiner des plans l'a traité de fou. Le projet s'est concrétisé dans un chantier de construction. « Pourquoi aller voir un constructeur de bateaux s'il vous fait payer dix fois plus ? » a-t-il dit, amusé.

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Depuis un voyage d'inauguration le long des côtes britanniques à la fin des années 1990, Moby n'a pas bougé des Highlands. McClean compte bien lui redonner vie à l'aide d'une énergie verte – il a remplacé les moteurs diesel « fiables, mais bruyants et puants » de son bateau cachalot par des moteurs électriques afin de créer un véhicule qu'il souhaite faire figurer dans une campagne publicitaire environnementale : « Les vieux diesels ne sont plus là. Ma baleine est un exemple pour tous les bateaux. J'aime beaucoup l'idée qu'une compagnie puisse s'impliquer et sauver la planète. » Il espère qu'une ONG comme Greenpeace, ou une compagnie d'énergie renouvelable soutiendra son projet.

C'est étrange que McClean ne soit pas devenu un symbole national – particulièrement dans une nation qui met ses navigateurs et explorateurs sur un piédestal. Son audace et ses réussites n'ont rien à envier à celles de Sir Ranulph Fiennes, un explorateur qui détient le record du monde d'endurance.

Mais le monde de l'aventure n'est plus ce qu'il était. Les progrès scientifiques et technologiques ont réduit les possibilités pour ceux qui voudraient être les Ernest Shackleton et Amelia Earhart d'aujourd'hui. L'aventure n'a jamais été aussi populaire : Bear Grylls, Cracknell, Fogle, Mears et d'autres sont les curieuses incarnations des courageux héros de l'époque victorienne des bouquins de G. A. Henty – pourtant, leur popularité est appréciable depuis un fauteuil ou un canapé dans son salon. Les jungles, montagnes et villes exotiques qui peuplent le monde sont devenues des destinations de vacances pour tous, pour peur que l'on ait de l'argent à dépenser. Même l'Everest est devenu un piège à touriste parsemé de déchets. Nous vivons au temps des héros.

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Si quelqu'un me traite de tête brûlée ou de fou, je suis heureux. »

Ramer à travers les océans est désormais un sport. Il existe une course annuelle où 30 bateaux – tous équipés de systèmes de navigation GPS, radios, panneaux solaires et téléphones satellites – s'affrontent. C'est une folle compétition, mais ce n'est en rien une plongée dans l'inconnu comme celles d'aventuriers comme McClean, qui nous montrent que des qualités humaines sont à cultiver dans l'adversité, la difficulté et le risque – des valeurs qui sont peut-être menacées alors que la technologie s'immisce de plus en plus dans notre monde.

Après m'avoir fait faire le tour de son bateau, McClean grimpe sur la queue de Moby. Il est petit, mais fort – il ne mesure qu'un mètre soixante-dix, mais dégage une incroyable puissance et vigueur. Il a 73 ans, même s'il partage le même enthousiasme pour l'aventure que quelqu'un ayant le dixième de son âge.

Alors que nous nous asseyons dans le salon du chalet qu'il a construit lui-même, je lui demande comment il a trouvé la force intérieure pour faire face aux défis qu'il a affrontés. « C'est dans mon corps. C'est en moi. Je ne pense pas que l'on puisse s'entraîner pour ça – je suis comme ça depuis que j'ai passé du temps à l'orphelinat Fegan's Homes, à Yardley Gobion. »

Né hors mariage en Irlande pendant la Seconde Guerre mondiale, McClean a été placé dans un foyer d'accueil à Dublin, puis dans un orphelinat du Northamptonshire en 1947. Fegan's était une institution dickensienne par excellence, l'une de celles qui n'existent plus aujourd'hui ; des centaines de garçons, des cours de catéchisme tous les jours et du gruau en guise de déjeuner. La bagarre était quelque chose de naturel pour ces garçons ; il en allait de même pour les corrections que McClean recevait des adultes. Dans son autobiographie Rough Passage, il a décrit son arrivée là-bas, à l'âge de trois ans : « Ce n'était que le début de 12 années de lutte acharnée pour survivre. »

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« Les employés me pinçaient le nez pour m'enfoncer la nourriture dans la bouche », me dit-il. « Je leur mordais les doigts, alors ils sortaient leur canne pour me battre en disant " Tu vas voir, tu vas pleurer". Je leur répondais " Je ne vais pas pleurer". »

Il n'y a ni colère, ni amertume dans sa voix. Il parle du temps passé à l'orphelinat avec une touche d'ironie qui l'amuse, avouant que l'expérience a forgé son obstination. McClean a quitté l'orphelinat à 15 ans et a enchaîné les boulots à la ferme et dans le bâtiment, avant de rejoindre l'armée. Il s'est enrôlé dans le régiment de parachutistes ; il s'est vite retrouvé à se battre contre des communistes indonésiens dans la jungle de Bornéo : « Nous allions patrouiller à quatre le long de la frontière pour nous assurer que personne ne pouvait nous tirer dessus. »

Il s'est rapidement adapté à son environnement. Il a été placé à un poste d'officier de liaison dans un village local vers la fin de son service à cause d'une grosse angine. Là-bas, il a appris à chasser le singe aux côtés d'une tribu locale avec une sarbacane qui repose aujourd'hui dans un coin de son salon : « J'ai beaucoup aimé Bornéo », avoue-t-il. « Je buvais leur boisson. Du riz, des oiseaux et des trucs fermentés dans une grosse casserole. Vous la faites tourner et vous finissez complètement bourré. »

Après une escale au Yémen et en Malaisie, il est retourné au Royaume-Uni pour tenter de redevenir un civil parmi tant d'autres. Autant dire que sa soif d'aventure n'a pas réussi à le maintenir en place. Quelques mois plus tard, il s'est rendu en van à la base des Special Air Service (SAS) à Hereford, en Angleterre et a demandé à rejoindre le programme d'entraînement.

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Ceux qui servent dans « le Régiment », comme l'appellent les anciens comme McClean, sont déterminés et autonomes, capables de survivre seuls dans les environnements les plus hostiles. Ce sont aussi des tueurs d'une incroyable efficacité. Le programme d'entraînement est réputé pour être impitoyable. Hier comme aujourd'hui, il comprend des marches épuisantes dans les Brecon Beacons au sud du pays de Galles, des exercices de survie qui durent des semaines entières et un test de résistance en interrogatoire.

« Oui, c'est difficile, mais quand vous êtes jeunes, vous êtes très en forme », dit-il en haussant les épaules. « C'est comme être en plein océan pendant des semaines, voire des mois, sans radio, ni bruit. Est-ce que j'ai déjà abandonné ? Non. Je ne voulais pas. Je ne me sentais pas sous pression. Je ne sais pas pourquoi je suis comme ça… J'ai juste assez de confiance en moi pour faire ces choses-là, alors je les fais. Avec ça vient la sérénité. »

Sur 105 candidats, seuls McClean et deux autres ont réussi le programme.

« Ce n'est pas parce que tu es un gros dur que tu franchiras la ligne devant tout le monde », dit-il. « Ce qui est déterminant, c'est ton attitude – ce qui te motive. Alors, quand tu es dans un trou pendant des semaines, allongé, tu n'es pas à cran – tu attends calmement que le temps passe. »

Il y a quelque chose qui rappelle un maître zen chez McClean. Quand des candidats à la traversée de l'océan lui demandent s'il pense qu'ils ont assez de tripes pour le faire, il leur demande simplement : « Pouvez-vous vous asseoir dans une armoire et ne pas bouger pendant trois jours ? »

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Il a décidé de traverser l'Atlantique seul pour la première fois après être tombé sur un article portant sur deux hommes qu'il avait connus lors de son passage chez les parachutistes – John Ridgway et Chay Blyth – et qui envisageaient de le faire. Traverser l'Atlantique à la rame était l'une des aventures encore jamais tentées à l'époque. Qui plus est, il s'agissait d'une des plus risquées. Cet été-là, en 1966, après trois mois en mer, deux journalistes britanniques, David Johnstone et John Hoare, avaient péri après le chavirement de leur bateau pendant une tempête en voulant tenter la traversée.

Toujours est-il que ça n'a pas refroidi McClean : « Je me suis dit, " Humm… J'aime cette idée. Je pourrais le faire ." C'était plutôt inconscient. Je savais que j'avais le courage de le faire. »

McClean avait 26 ans lorsqu'il a mis son canot à la mer le 17 mai 1969. À l'époque, personne n'avait traversé l'océan Atlantique à la rame. Il ne connaissait pas grand-chose en termes de navigation. Il n'avait pour expérience que deux après-midi passées à Serpentine à Hyde Park quand il s'est lancé dans l'aventure.

Ceci dit, aucun entraînement n'aurait pu le préparer. La manière dont il dépeint le voyage dans sa biographie est marquée par l'inconfort permanent, le doute et l'isolement. Tout est mouillé, tout le temps. Il a dû passer certaines nuits à écoper l'eau pour ne pas finir noyé. Il était souvent suivi par des requins affamés. Il a ramé sur un bout de bois solide pendant près de deux mois et demi.

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Avait-il peur de mourir en mer avant de partir ? « Il faut que ton bateau soit solide. Si ton bateau ne coule pas, tu resteras en vie. Bon, d'accord, jusqu'à ce que tu n'aies plus de nourriture et que tu n'arrives plus à attraper aucun poisson, alors dans ce cas tu meurs. Mais j'imagine que j'étais sûr de moi à 100 %. »

Néanmoins, une partie de l'aventure reposait sur un facteur qu'il ne pouvait pas contrôler : L'année précédente, un homme du nom de John Fairfax a fait savoir qu'il souhaitait être le premier homme à traverser l'Atlantique à la rame. « Un mec sympa, mais sauvage », se souvient McClean. « Plus sauvage que moi, même. Possiblement plus fou. »

Fairfax est probablement le personnage le plus haut en couleur à avoir eu une paire de rames entre les mains. Parieur invétéré dont les journées consistaient à jouer au baccara dans les casinos de Las Vegas, il a grandi en Argentine avec sa mère bulgare ; il a passé des mois dans la jungle amazonienne alors qu'il n'était qu'un adolescent et est retourné à Buenos Aires pour vendre des peaux de jaguar. Plus tard, après avoir dépensé un héritage de 10 000 $ dans un road trip aux États-Unis avec une call-girl chinoise, il a été capitaine d'un bateau qui, pendant trois ans, a trafiqué des flingues, du whisky et des cigarettes partout dans le monde. Après l'intervention des autorités, il est allé se faire oublier en Jamaïque où il est devenu pêcheur, puis s'est décidé à aller en Angleterre pour essayer de transformer son rêve de traverser l'Atlantique à la rame en réalité.

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McClean aux côtés de son « Giltspur », le plus petit bateau à avoir traversé l'Atlantique, en 1982.

Dès 1968, lorsque McClean a été autorisé à quitter son poste des SAS pour des congés sans solde, les deux hommes se sont préparés à l'aventure, chacun de leur côté. Son bateau terminé cet hiver-là, Fairfax a voulu tenter l'aventure le plus vite possible ; ainsi, il a opté pour la traversée d'est en ouest au milieu de l'Atlantique, des îles Canaries à la Floride. Cela signifie qu'il avait une avance de quatre mois sur McClean, qui comptait emprunter une route plus courte, mais plus rude en partant de Terre-Neuve.

Les deux hommes étaient dans l'océan à la même période, mais Fairfax a fini par arriver en Floride le 19 juillet 1969. Le jour suivant, Neil Armstrong marcha sur la lune. Même en plein milieu de la fanfare des événements de cette période, les astronautes d'Apollo lui ont envoyé une lettre pour le féliciter, en le qualifiant de « camarade explorateur ».

McClean a débarqué sur les côtes de Blacksod Bay en Irlande huit jours plus tard. Contrairement à son rival, il n'est jamais monté à bord des bateaux qu'il a croisés sur son chemin, n'a jamais accepté de nourriture de leur part et n'a compté que sur son expertise en survie, sa discipline militaire et un niveau de détermination incroyable pour traverser l'océan.

Fairfax avait déclaré : « Je suis en pleine bataille contre la nature, primitive et brute. » Pensait-il la même chose ? « Si j'étais parti pour battre l'Atlantique – non, non, ce n'est pas la bonne approche. On ne peut pas battre les éléments. Vous échouerez dans une mer ensanglantée, vous vous noierez. Non, non. Je suivrai ses moindres mouvements. Je l'accompagnerai ; me laisserai porter par le vent. C'est plus subtil. J'ai plus de chance de survivre de cette manière. »

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On ne peut pas battre les éléments. Vous échouerez dans une mer ensanglantée, vous vous noierez. Je suivrai les moindres mouvements de l'océan. Je l'accompagnerai, je me laisserai porter par le vent. C'est plus subtil.

Comment s'est-il senti après la première fois ? « Oh, c'était incroyable », avoue-t-il. « Bien entendu, quand j'y suis retourné, le danger était de me dire que si je l'avais fait une fois, je le referais facilement – ce qui est une grossière erreur. Mais si vous misez tout sur la sécurité et vous êtes bien assuré que la… » Il ne termine pas sa phrase. « Tout ce que vous avez pour vous accompagner, c'est le ciel, la mer et le bateau. Un peu de matériel. Un rien doit vous satisfaire. »

Étant donné qu'il s'est tiré de situations que la plupart des gens qualifieraient d'insoutenables, je lui ai demandé s'il se sentait différent des « gens normaux ». « Oh que oui. Mais nous sommes tous spéciaux. Nous sommes tous différents et spéciaux. Il faut juste ne pas prendre la grosse tête. Non, moi je garde les pieds sur Terre. Je suis satisfait et puis c'est tout. » Il rigole. « Parce que si quelqu'un me dit que je suis une putain de tête brûlée ou un fou, je suis heureux. J'aime bien ça. Allez ! Je sais que des gens m'admirent pour ce que j'ai fait, c'est signe que je ne suis pas fou. »

Contrairement à d'autres marins britanniques, des aventuriers et des détenteurs de records, McClean n'a jamais reçu de récompense officielle. Il est peut-être trop excentrique pour ça. Il voit cela comme étant un honneur en soi. C'est un patriote, mais aussi un outsider qui n'a jamais joué le jeu de la célébrité. D'ailleurs, il accueille volontiers des groupes au Loch Nevis et a tenu des discours sur le développement personnel partout dans le pays.

Il définit sa philosophie de vie par « débrouille-toi et sois heureux », ce qui apparaît comme la meilleure manière de décrire son absence de prétention et son manque d'intérêt dans le monde nautique – les collectionneurs de yachts et autres. « Je n'ai d'entraînement pour rien, mais je ferai avancer ce fichu bateau », dit-il. « C'est vraiment ce que j'ai fait toute ma vie. »

C'est de cette manière qu'il a construit son centre d'aventures et fondé une famille avec sa femme, Jill. Pendant 20 ans, il a gagné de l'argent en pêchant des moules dans le loch : « Je suis content d'être ici », avoue-t-il. « Je pourrais être dans le Sud, à Brighton, ou dans un appartement quelque part, mais je suis ici. Je serais sûrement aussi content à Brighton. J'aurais un petit travail tranquille ou je ne sais quoi. »

Parmi toutes ses aventures, y en a-t-il une qu'il préfère ? « La première traversée, c'était l'aventure au sens propre, parce que vous plongez dans l'inconnu. L'aventure pour moi c'est l'inconnu, se projeter dedans. »

Plus tard ce jour-là, alors que je l'observe poser devant Moby pour une photo, le bateau semble être autant une œuvre d'art qu'une « idée marketing » comme McClean le dit. Ses dimensions mythiques font écho à celles de la vie de McClean. Carl Gustav Jung a vu dans l'histoire de Jonas et de la baleine une légende relevant de l'archétype ; un individu englouti par une créature avant d'être recraché est un thème commun à beaucoup de cultures et religions – qu'il s'agisse d'une baleine, d'un dragon ou d'un loup. Il l'a appelée le « Mythe du voyage dans les profondeurs des mers », où le héros entreprend une descente dans les ténèbres ou la mort temporaire. Lorsqu'il ressort vivant de sa rencontre avec la force brute de la nature, il est transfiguré et doté de qualités qui lui manquaient auparavant.

Les baleines sont des créatures ayant un attrait incroyable sur l'imagination des humains. Regardez les foules qui se sont formées sur les côtes anglaises lorsqu'une baleine s'est échouée sur les bords de la Tamise, où l'influence du roman d'Herman Melville, Moby Dick . Cela en fait une image forte pour la campagne environnementale de McClean. Il s'agit aussi d'une représentation de sa propre vie – l'orphelin recraché par l'Atlantique sur une plage irlandaise. Un garçon qui a vécu, d'après la phrase de Jung, « des aventures périlleuses dans la profondeur des océans, dont le but est la restauration de la vie, la résurrection et le triomphe sur la mort . » Qu'il s'agisse ou non d'un symbole des voyages de McClean ou non, Moby est sa création qui symbolise le mieux l'esprit d'aventure.

McClean réfuterait, bien sûr, tout discours de ce type. Dans quelques semaines, il ira en camping avec ses deux enfants, adultes aujourd'hui, pour explorer le Peak Disctrict pendant trois jours, peu importent les surprises que la météo anglaise leur réserve : « J'ai toujours ça en moi, j'aime être simple et aller droit au but », avoue-t-il. « J'apprécie la simplicité de ce voyage. Rien de grandiose. Je serai content. Ils vont partir explorer les montagnes, allumer la radio et me laisser tranquille et je ferai un petit somme pendant quelques heures. Ils me diront : « Qu'est-ce que ça a l'air chiant de s'allonger ici et dormir. » Mais, moi, ça me va. Je ne sais pas comment dire, je trouve ça agréable. »

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