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LE NUMÉRO FICTION 2012

Video Games killed the radio star

Gravity Rush (PS Vita) - Gauge (Iphone)

GRAVITY RUSH
Auteur : Keiichiro Toyama
Éditeur : SCEE
Plates-formes : PS Vita

Je suis hyper content parce qu’en prévision du numéro fiction, je pensais que la page jeux du magazine allait sauter et que je n’aurais plus de tribune avant la rentrée, donc que je ne pourrais pas orienter le lecteur qui penserait que j’ai parfois un avis pertinent vers deux bons jeux avec lesquels passer l’été. Or il se trouve qu’il y en a deux auxquels je tiens particulièrement. Je vais tenter de les raccrocher au thème « fiction » du numéro, mais c’est loin d’être gagné quoique pour Gravity Rush, c’est jouable, parce que les cut-scenes sont de chouettes planches de BD interactives et vertigineuses qu’on fait glisser du doigt sur l’écran de la Vita en les faisant pivoter dans tous les sens. Le seul problème de Gravity Rush, c’est qu’il se joue exclusivement sur Vita, et que la console étant un four, personne ne l’a. Mais pour ceux qui seraient un peu tentés, voilà le jeu qu’ils attendaient pour la choper. Ça fait longtemps que je n’avais pas vibré comme ça pour une nouvelle IP (Intellectual Property, c’est comme ça qu’on appelle les titres qui présentent un nouveau héros et un nouvel univers au fort potentiel de suites), et qui plus est, pour un jeu d’action. Dans le rapport qu’il instaure avec le joueur, Gravity Rush m’a rappelé les comics Superman’s Pal, Jimmy Olsen de Jack Kirby dans lesquels on trouvait des micro-univers. Des espèces de fourmilières représentant des restes de civilisations réduites, qui tenaient plus ou moins dans le creux de la main. Ce principe m’a toujours fait rêver et en jouant à Gravity Rush, j’ai vraiment eu le sentiment hyper satisfaisant de tenir un micro-univers dans les mains. Il m’a fallu un peu de temps pour comprendre que ce sentiment venait du fait que je contrôlais le sens de la gravité de cet univers en fonction du sens dans lequel je tenais ma console. Ça donne une agréable sensation divine et ça crée une attache directe au personnage de Kat, l’héroïne du jeu, qui profite de ces perturbations gravitationnelles pour sauver le petit monde dans lequel elle se trouve sans trop savoir pourquoi. On n’arrête pas de lui faire remarquer qu’elle est crade, qu’elle est mignonne mais mal gaulée, des trucs pas forcément agréables d’autant que de mon point de vue, la meuf est plutôt pas mal. Bref, elle circule dans cet univers super beau et coloré, peuplé de gens à sauver, de morceaux de villes à recoller et de monstres noirs ectoplasmiques à dégommer de manière super dynamique, le tout sur une bande originale vraiment chouette. C’est un vrai jeu d’été parce qu’il est fun et solaire comme une plage du bout du monde européen prise entre le désert et les rouleaux et sur laquelle on ne trouverait pas un milliard de connards à bob et de chiens qui chient dans le sable avant de recouvrir leur merde pour piéger le tout-venant. Le boulot sur la lumière dans le jeu est vraiment au poil, les dialogues bien sentis et les phases de bouleversements psychédéliques super intenses. J’aime pas trop citer Moebius, mais le mec a quand même fait quelques trucs marquants, et Gravity Rush fait parfois penser à ceux-ci.
 
Si je finis par dire aux joueurs curieux qu’il s’agit du nouveau jeu de Keiichiro Toyama, à qui l’on doit Silent Hill et Forbidden Siren, soit à mon sens les deux meilleures licences d’horreur du jeu vidéo, on me croira sans sour- ciller quand j’affirme que Gravity Rush – qui, lui, n’a rien d’horrifique – est le meilleur truc qui soit arrivé récemment aux jeux vidéo.

GAUGE
Auteur : Étienne Périn
Éditeur : The Game Atelier
Plates-formes : iPhone, iPod Je me sens souvent spolié en chroniquant les jeux vidéo, parce que contrairement aux mondes du livre et du disque dans lesquels l’amitié pas forcément déontologique entre les créateurs et les critiques permet aux premiers de gagner des tribunes alors que leur travail ne les légitime pas, je n’ai jamais l’occasion de pouvoir faire une publicité gratuite et officieuse à un pote. Quand Étienne Périn m’a montré son jeu sur iPhone, j’ai eu du mal à savoir si je pourrais en parler avec toute la passion qu’il m’inspirait. Est-ce qu’elle était provoquée par l’egotrip qu’animait le jeu hallucinant ambiance hardcore, minimalisme, chasse au score sur fond sonore acide et feedback vidéo dans ta gueule qui me faisait simplement penser à mon propre boulot vidéographique traduit en jeu vidéo ? Ou est-ce que le jeu était simplement dément en plus d’être un jeu garage hyper peaufiné par son créateur et vendu 79 centimes, soit politiquement irréprochable ? Vu les réactions d’une certaine presse respectable à propos de Gauge, je mets mes excès de déontologie de côté et considère que je peux me joindre à ceux qui ne connaissent pas Étienne Périn pour vanter les mérites absolus de son jeu extraordinaire.