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LES CHIENS NE FONT PAS DES CHATS MAIS PAS DES CHEVAUX NON PLUS

Video Games Killed the Radio Star

On déteste les jeux vidéo, c'est pourquoi on demande chaque mois à notre meilleur chroniqueur d'en parler à notre place.

YAIBA : NINJA GAIDEN Z
Éditeur : Tecmo Koei
Plates-formes : PS3, 360

Le mois dernier, l’émérite cinéaste Monte Hellman postait un intéressant statut sur Facebook. Il avait rematé certains films de Michael Powell et trouvait qu’ils avaient pris un coup de vieux. Il se demandait si ça pouvait se dire et se sentait désolé d’établir ce triste constat – légitime, néanmoins. Mais Michael Powell fait partie de ces cathédrales intouchables qu’il est mal vu d’égratigner de peur de passer pour un faux cinéphile. Hellman évoquait donc l’idée d’orthodoxie propre à la cinéphilie et aux chapelles qu’elle a aidé à bâtir. Je réponds rarement aux statuts laissés par des mecs qui ne sont pas mes potes IRL, mais là, mon ego m’a poussé à apporter mon grain de sable au débat qui débutait. Et j’ai dit, en gros, que l’orthodoxie était à mon sens l’ennemi ultime de la cinéphilie. Personne ne m’a répondu directement, et je crois que j’ai eu deux likes de la part de mecs que je ne connaissais pas. Quelques jours plus tard, je mettais la main sur Yaiba : Ninja Gaiden Z, une suite inavouable du meilleur jeu d’action du siècle. Sous la direction de Tomonobu Itagaki, la Team Ninja avait ressuscité le personnage Ryu Hayabusa début 2000. Les fondements d’un sadomasochisme subtilement distillé offraient à la série une élégance unique qu’il a fallu attendre Metal Gear Rising pour voir réapparaître – mais de manière différente. La noblesse liée à l’art du sabre transpirait de tous les pores des Ninja Gaiden 1 et 2. Itagaki s’est barré à la fin du 2, laissant le 3 aux mains de ses poulains. C’est pas parti en couille, mais c’était à deux doigts. Si vous voulez jouer à un bon Ninja Gaiden 3, jouez-y plutôt sur WiiU. En tout cas, les fans hardcore, les orthodoxes de Ninja Gaiden vous diront que le 3 n’était ni fait, ni à faire. Et je crois qu’avec Yaiba, la Team Ninja s’est dit que l’orthodoxie pouvait tuer Ninja Gaiden. Et je crois que ça leur cassait les couilles qu’on continue de leur parler d’Itagaki, figure tutélaire un poil relou, surtout quand on sait que ce mec est obsédé par les gros nichons. La Team Ninja s’est donc évertuée à tuer le Père. Dans Yaiba, on incarne un ennemi de Ryu Hayabusa qui a juré de crever le responsable de son bras cybernétique ridicule (pour un ninja hein, parce que de mon côté, je crois que j’adorerais avoir un bras cybernétique). Jurer la mort de Ryu Hayabusa, c’est jurer la mort de Ninja Gaiden. Et c’est ce que le jeu s’emploie à faire. Place à la déconne et au bourrinage extrême ; pour s’assurer de bien faire chier les fans, la Team Ninja a fait appel à Keiji Inafune, le mec qui a quitté Capcom en leur laissant Dead Rising et Mega Man. Yaiba affronte des hordes de zombies fluo dans des environnements de type cartoon d’apocalypse. C’est mortel, y’a plein de combos stupides à faire, mais est-ce que c’est vraiment Ninja Gaiden ? Les orthodoxes vous diront que non, évidemment. Ils vous diront que c’est tout vu, que c’est pas Ninja Gaiden, que ça exploite pas TOUTE la puissance de la machine sur laquelle ça tourne – un grand credo d’Itagaki – et qu’en plus c’est drôle et un peu brouillon, bref, oublie. C’est vrai, tout ce qui reste de Ninja Gaiden, c’est son aspect speed metal qu’aucun autre jeu n’a jamais égalé. J’ai envie de défendre Yaiba même si c’est un gros doigt tendu à la seule série ayant rendu la barbarie élégante. Parce qu’après tout, si on me demande, et quitte à me mettre à dos Martin Scorsese – dont je n’ai par ailleurs rien à foutre –, franchement, Michael Powell, c’est peut-être classe, mais le mec a pas non plus inventé l’eau tiède. Et je ne suis pas désolé de le dire, moi.

DONKEY KONG COUNTRY TROPICAL FREEZE
Éditeur : Nintendo
Plates-formes : WiiU À l’automne dernier, j’ai lu un article pas mal sur le bizutage des gamins dans Minecraft. Ça racontait la manière dont des nerds prenaient un plaisir malsain à parasiter les parties d’enfants en feignant d’être leur ami pour ensuite détruire impunément leurs constructions et en se foutant de leur gueule, par-dessus le marché. J’avoue, Minecraft aurait existé à l’époque de mon adolescence, je me serais probablement adonné à ce genre d’activité, inconscient du retour de boomerang karmique qui m’attendrait à la trentaine. J’ai fait moins pire en mon temps, et je m’en mords toujours les doigts. Bref. De fait, j’empêche mon fils de jouer en ligne. Pour le protéger ? Non. Plutôt pour conserver le monopole de l’humiliation, et je remercie Nintendo d’avoir sorti un jeu aussi parfait que Donkey Kong Country Tropical Freeze pour ce faire.