C’est en 1997 que les parents de Kath découvrent leur future maison de deux étages plantée au milieu d’un grand terrain à Limoges. Le long d’une voie ferrée, la SNCF l’a séparée en plusieurs appartements pour ses employés. Au rez-de-chaussée, un papier peint jauni à grosses fleurs recouvre les cloisons. Le prix défie toute concurrence et pour cause, le propriétaire, un veuf, ne veut pas partir. Comme accroché aux murs. Deux ans plus tôt, alors qu’il revient d’un déplacement professionnel, en poussant la porte de son domicile, il découvre le corps de son épouse qui a mis fin à ses jours en un tir de carabine. Dans le puits du jardin, il aperçoit les cadavres de ses trois enfants. Sa femme les a empoisonnés avant de se donner la mort. Un fait divers sordide qui ne mérite que quelques lignes dans le canard local. Après avoir trouvé un compromis avec l’ancien proprio, les parents de Kath font sceller le puits où ont été retrouvés les trois petits corps, cassent tous les murs du rez-de-chaussée, recouvrent les grosses fleurs jaunies, font goudronner la cave. Mais en brisant les parois, en retournant la terre, ils retrouvent partout des médailles de dévotion. La vieille bicoque a l’air d’abriter d’autres secrets. Ils apprennent, entre autres, que pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est la seule à être restée debout après un bombardement… « Le passage de l’exorciste a rassuré ma mère, mais on a eu tout de même beaucoup de galères niveau travaux. Et une sorte de poisse constante. On a eu des soucis de santé, mon père a eu un grave accident de moto qui l’a paralysé pendant plusieurs années », retrace Kath au téléphone. Alors pour ne pas tenter le diable, pendant son adolescence, elle refuse que les traditionnelles séances de spiritisme auxquelles se prêtent tous les collégiens se déroulent chez elle. Sceptique certes, mais on ne sait jamais…« Le passage de l’exorciste a rassuré ma mère, mais on a eu tout de même beaucoup de galères niveau travaux. Et une sorte de poisse constante. On a eu des soucis de santé, mon père a eu un grave accident de moto qui l’a paralysé pendant plusieurs années » – Kath
Au Grand Bornand, commune de Haute-Savoie au cœur du massif des Aravis, une agence de location vente les mérites du Chalet des Laurencières. Cette immense propriété « de grand standing », compte 18 couchages et trois salles de bain. 3 800 euros la semaine en pleine saison, un forfait plutôt raisonnable. Sur les photos, l’immense pièce à vivre fleure bon les soirées raclette. La cuisine offre un gigantesque plan de travail. Plan sur lequel, le 11 avril 2003, David Hotyat a tué un des enfants de la famille Flactif qui habitait là. Sur « un coup de sang », comme il l’explique lors de son arrestation, ce mécanicien jaloux a assassiné cet après-midi Xavier Flactif, Graziella Ortolano et leurs trois enfants avant d’aller brûler leurs corps dans la forêt. Huit ans après le crime, la maison est vendue à 315 000 euros aux enchères à des retraités belges. Elle était évaluée à 826 000 euros. Ce même couple la loue aujourd’hui à la semaine par le biais d’une agence. Sur l’annonce des Laurencières, certains vacanciers évoquent « un super séjour » quand d’autres appellent les locataires à avoir honte d’avoir séjourné dans « le Amityville français ».« C’est une affaire d’éthique. On a un devoir de conseil, on ne peut pas cacher sciemment la vérité » – Alexandra
« Ma mère a entendu en ville comme quoi il y aurait eu un meurtre dans ce coin là. En creusant, elle a trouvé plusieurs articles qui expliquaient qu’une femme avait tué son mari au couteau dans notre cuisine » – Ronan
Alexandre et sa famille, eux, ont décidé d’intégrer les morts de leur maison à leur folklore. En Dordogne, les premières bases de cette bâtisse de famille datent du XVe siècle. Et entre ses murs, des défunts, on en compte à la pelle. Il énumère : « Pendant la Fronde au XVIIe, il y a eu une exécution dans la chambre que j’occupe aujourd’hui. Plus tard, des séditieux ont été pendus et décapités dans la partie centrale. Dans la cour centrale, un homme a été décapité à la hache. Et pendant la Restauration, un de mes ancêtres est mort ». Gamin, sa grand-mère lui raconte l’histoire d’Alice, une servante, fille illégitime d’un des hommes de la famille. Elle aurait été noyée dans une mare du domaine, aujourd'hui asséchée. La petite Alice reviendrait hanter les couloirs. Alexandre précise : « Mon arrière-grand-père s’était acheté un appareil photo et pensait qu’il pourrait capter les mouvements de la revenante.. En vain évidemment ». Le stock de clichés du couloir vide existe toujours.Sa tante, sa mère et sa grand-mère se sont refilé au fil des années ces histoires sordides qu’elles se délectaient à raconter aux enfants, sourire en coin. Escaliers qui grincent, portraits d’illustres inconnus accrochés depuis des siècles aux murs, pièces immenses et glacées, il faut dire que la décoration du lieu se prête aux légendes. Aujourd'hui, Alexandre analyse avec philosophie cette mythologie familiale : « ça fait partie du folklore. Je transmets moi-même ces histoires aux enfants même si je reste profondément athée. Mais ça fait partie de l’identité de ma famille ».De son côté Alexandra, l’agente immobilière conclut, philosophe : « Tout dépend du crime. De quand il date, si c’était il y a plusieurs siècles bon… Entre nous, je me vois mal boire un mojito l’été sur ma terrasse en sachant que le corps de trois gamins, de leur mère et de leur chien ont été retrouvés en dessous ».Constance est sur Twitter.VICE France est aussi sur Twitter, Instagram, Facebook et sur Flipboard.« Ça fait partie du folklore. Je transmets moi-même ces histoires aux enfants même si je reste profondément athée. Mais ça fait partie de l’identité de ma famille » – Alexandre
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