Une journée en compagnie d’un militant de Marine Le Pen
Toutes les photos sont de Lucas.
Société

Une journée en compagnie d’un militant de Marine Le Pen

On a filé un appareil photo jetable à Lucas Bisiaux, 21 ans, pour qu’il photographie son quotidien de campagne.

Cet article fait partie d’une série dans laquelle nous avons donné un appareil photo à un(e) militant(e) d’un parti politique pendant la campagne présidentielle de 2022. Retrouvez les autres papiers ici.


Au Rassemblement National, c’est souvent une histoire de Famille. Le père, Jean-Marie, a donné les clés du parti à sa fille, avec fracas, il y a près de dix ans. Chez Lucas, c’est tout le contraire. Il l’assure : sa famille n’a jamais vraiment parlé politique. Pas d’enfance brinquebalée sur les épaules d’un père parti faire le tour de France des meetings. Pas de grande colère contre le gouvernement qui nourrit un ralliement familial à un mouvement. Ses parents sont « limite apolitiques » même s’il « pense quand même qu’ils votent Marine ».

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Lucas a découvert les Le Pen, seul, dans sa chambre d’adolescent. Il avait seize ans, avait arrêté l’école et travaillait dans un zoo. Il traînait sur YouTube et il est tombé sur une vidéo de meeting de la présidente du RN. Pour l’enfant de la campagne, qui a grandi entre un pavillon et une ligne de bus, les mots de Marine Le Pen résonnent avec une réalité sociale qu’il connaît bien. Il se renseigne. Surgissent spontanément sur l’écran de son ordinateur des thèmes qui lui sont chers : droit des femmes, cause animale, lutte contre le terrorisme, immigration. Les bases sont posées, il n’a plus qu’à s’engager. 

Sa rencontre avec le militantisme date d’un meeting à Mer (Loir-et-Cher), en pleine campagne pour les élections des députés européens en 2019. Il fait la queue derrière des tables où s’étalent les goodies du parti frontiste et prend une carte d’adhérent au parti. Depuis, il colle des affiches, tracte le programme et monte des vidéos à la gloire de sa candidate. On lui a demandé de nous décrire à quoi ressemble une campagne dans la peau d’un jeune qui s’engage aux côtés de Marine Le Pen. Lucas raconte la manière dont il jongle entre activités militantes et son travail, et précise pourquoi on s’engage derrière une candidate qui a échoué à se faire élire en 2017. 

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VICE : Bonjour Lucas, comment devient-on militant au Rassemblement national ?
Lucas :
J’ai commencé à militer à l’âge de 16 ans. Je suis tombé sur une vidéo de Marine, un peu par hasard, et c’est elle qui m’a fait aimer la politique. J’ai regardé après d’autres vidéos de politiciens mais je préférais toujours sa personnalité, ses discours, ses mots. Je suis vraiment devenu fan de Marine. J’ai une forme d’admiration pour elle.

Qu’est-ce qui nourrit cette admiration ?
En l’écoutant,  je me disais : « elle parle de ce que je ressens ». J’ai donc eu envie d’aller voir de mes propres yeux un meeting. Je suis allé assister à celui de Jordan Bardella durant la campagne des Européennes, à Mer, à quelques kilomètres de chez moi. Et je me suis engagé. 

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De quelle manière tu t’engages en politique ?
Je colle des affiches surtout. Ça permet de montrer qu’on est présents. Moi j’adore coller.  Remplir les villages de nos affiches. Après, il y a les marchés, c’est là où c’est le plus facile de convaincre. On a des échanges concrets avec les gens. Et puis, je milite beaucoup sur les réseaux. Surtout sur Tik Tok. Je cherche à partager mes vidéos avec ceux qui ne s’intéressent pas à la politique. Comme les vidéos défilent sans abonnement ni contraintes particulières, on peut toucher beaucoup de monde. Mon but est de déconstruire l’image selon laquelle Marine Le Pen est une raciste, une homophobe ou une xénophobe.

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« J’ai la sensation qu’on peut vivre mieux avec le Rassemblement national au pouvoir. Je veux une France avec des frontières fermées, sans violence ni insécurité »

Pourtant, cette image est encore chevillée à la personnalité de Marine Le Pen. Comment on répond, sur le terrain, à cela  ? 
J’essaie de ne pas m’énerver et mettre en avant des éléments concrets de son programme. En période de campagne, je vais aussi moins coller car on est souvent la cible de riverains qui ne veulent pas voir d’affiches de Marine Le Pen devant chez eux. Mais je ne suis jamais caché d’être du RN. Sinon cela signifierait que je n’assume pas.

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Tu n’as jamais eu envie d’arrêter le militantisme ? 
Je comprends pas trop les insultes que je peux recevoir. On peut ne pas aimer les convictions que j’ai, mais de là à refuser le débat ou harceler…  Je crois, finalement, que les insultes que j’ai pu recevoir ont renforcé ma conviction qu’il fallait redresser la France en  rétablissant le respect.

Marine Le Pen a échoué au second tour de l’élection de 2017. Si elle était amenée à perdre en avril, est-ce que tu pourrais militer pour un autre parti ? 
C’est ce parti, son histoire familiale, les fondamentaux ancrés par Jean-Marie Le Pen qui me plaisent. Ça serait pour moi comme une trahison de partir ailleurs. Mais si le parti ne ressemble plus à ce qu’il a été, je partirai. Surtout si ce n’est plus Marine Le Pen à sa tête. 

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Dernière question un peu globale : pourquoi tu fais tout ça ? 
J’ai la sensation qu’on peut vivre mieux avec le Rassemblement national au pouvoir. Je veux une France avec des frontières fermées, sans violence ni insécurité. Qu’il y ait plus d’égalité entre les hommes et les femmes et qu’on lutte davantage contre les violences dans la rue. Et surtout, j’aimerais que la France soit dirigée par une femme.

Cet article fait partie d’une série dans laquelle nous avons donné un appareil photo à un(e) militant(e) d’un parti politique pendant la campagne présidentielle de 2022. Retrouvez les autres papiers ici.

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