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Avec l’association française qui soigne les gens enlevés par les extraterrestres

CERO-France vient en aide aux gens qui sont persuadés que la vérité est ailleurs.
Paul Douard
Paris, FR
Images via X-files

Les extraterrestres auraient enlevé Myriame Belmyr en 1987. Informaticienne à la retraite et membre de la Commission astronautique de l'Aéroclub de France (CAAF), elle est aussi et surtout présidente de CERO-France, une association qui vient en aide à toutes les personnes ayant connu les affres d'un kidnapping extraterrestre : les « abductés », aussi appelés les experiencers.

Il y a quelques mois déjà, j'avais pu discuter avec plusieurs Français persuadés d'avoir été enlevés par une entité extraterrestre. La plupart d'entre eux étaient encore traumatisés par les événements, et leurs témoignages dégageaient une forme de troublante sincérité, malgré le caractère évidemment incroyable de leur récit.

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C'est cette espèce de franche naïveté que constatait John Edward Mack, ancien psychiatre et professeur à Harvard, qui a passé une partie de sa vie à étudier ce phénomène. Il a suivi près de 200 cas d'humains qui pensaient avoir été abductés. En 2003, il s'expliquait lors d'une interview : « Lorsque vous parlez à un psychotique qui vous raconte quelque chose qui ressemble à une psychose, vous sentez que ce n'est jamais arrivé […] Il n'y a rien de comparable ici. Ces gens sont des personnes saines. […] Ils se posent plein de questions, ils doutent d'eux-mêmes. Mais ils décrivent une expérience réelle et intense, une lumière, quelque chose que l'on fait à leur corps. »

« J'ai toujours été passionnée d'astronomie », me confie Myriame Belmyr au téléphone. « En 2008, j'ai rencontré le journaliste et documentariste Stéphane Alix. On a beaucoup discuté sur le sujet des abductions, qu'il traitait déjà un peu avec l'INREES [Institut de recherche sur les expériences extraordinaires, N.D.L.R ]. J'ai vite pu rencontrer d'autres abductés avec des expériences semblables aux miennes. À l'époque, il n'y avait encore aucune association dédiée exclusivement aux abductés. »

En effet, prendre en charge des gens qui vous racontent qu'ils se sont réveillés en pleine nuit paralysés, en lévitation et entourés de « petit gris » qui communiquent par télépathie n'est pas quelque chose de simple. Moi-même, je ne pouvais m'empêcher d'être perplexe face à de tels récits.

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La présidente de l'association prend sa mission très au sérieux, malgré le scepticisme ambiant. Elle estime que des centaines de personnes se font enlever en France, des milliers aux États-Unis. Des chiffres évidemment impossibles à vérifier puisqu'il n'existe aucun registre officiel au sujet des enlèvements extraterrestres. L'association regroupe déjà plus de 50 membres – uniquement des abductés.

Malgré les moqueries de certains, Myriame Belmyr poursuit sa tâche, qui est d'aider des gens dont la vie a été foutue en l'air par ces expériences. « J'ai rencontré des gens dans un état de trauma très grave, m'avoue-t-elle. Certains en ont parlé à des médecins généralistes. Ils étaient à deux doigts d'être envoyés dans un hôpital psychiatrique. » Mais comment prendre en charge des individus qui estiment avoir vécu des choses qui paraissent invraisemblables aux yeux de nombreux médecins ? Il y a d'abord un gros boulot d'enquête, m'explique Myriame Belmyr : « Pour chaque personne se prétendant abductée, nous avons une grille très précise. On vérifie tous les détails qui laissent penser que la personne a effectivement été élevée. Pour cela, nous avons une équipe de psychologues et d'hypnothérapeutes ».

Parmi eux, l'un des responsables est Nicolas Dumont, vice-président de CERO-France, psychologue clinicien et membre de l'INREES. Il prend en charge les nouveaux arrivants. « Pour moi, la première chose à faire est d'avoir un entretien avec la personne concernée afin de voir si ce qu'elle décrit relève d'une abduction ou d'autre chose », me dit-il au téléphone. Cette autre chose, ce sont parfois des troubles mentaux. « Il peut s'agir d'un phénomène d'emprise, d'une surinterprétation des émotions alimentées par la télévision ou encore les conséquences d'une hypnose ratée. » Le rôle premier de Nicolas Dumont est donc « d'écrémer » les possibles abductés.

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Après cela, le psychologue s'attache à déceler certains traits caractéristiques d'une abduction. En effet, lors de mes précédents entretiens avec des abductés, tous faisaient état d'un « arrêt du temps » – où le bruit, le vent et l'air ne semblaient plus exister. D'autres traits communs existent, que Nicolas Dumont préfère taire « afin de ne pas reproduire ce que fait déjà la télévision ».

Bien évidemment, il est impossible d'affirmer à 100 % que tel cas est une abduction. Nicolas Dumont avoue que certains cas divisent au sein même de la communauté : « Pour l'un de mes patients, j'ai la certitude qu'il est mythomane alors que plusieurs ufologues sont persuadés d'une abduction. » Ensuite, il reste la méthode de régression par hypnose, que beaucoup d'abductés utilisent pour se souvenir de ce qu'il se serait passé. Nicolas Dumont l'utilise lui aussi dans certains cas, mais reste très prudent : « C'est un outil à prendre avec beaucoup de délicatesse. On peut créer de faux souvenirs et se rendre compte qu'ils ne sont que la source d'un fantasme. »

À l'inverse des membres de l'association, le milieu scientifique semble toujours aussi imperméable à ces questions, comme me le confirme Myriame Belmyr : « C'est tellement hors de leur schéma de pensée. C'est trop dangereux pour eux d'en parler. Ils ne veulent pas mettre en jeu leur carrière. Pour la plupart, ça heurte tout ce qu'ils ont appris ».

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La plus grande implication du milieu scientifique dans le domaine de l'abduction eu lieu lors de la parution du rapport COMETA dans VSD en 2003. Là, on ne parle pas de quelques blogueurs conspirationnistes au fond de leur caravane. Le rapport COMETA est une large étude sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés – les ovnis, en gros. L'ancien président du CNES – le Centre national d'études spatiales – André Lebeau, le contre-amiral Gilles Pinon ou encore le général Domange de l'armée de l'Air ont tous participé à ce rapport, qui fut ensuite transmis à Lionel Jospin, Premier ministre de l'époque. Ce rapport a rapidement été moqué par la presse française.

Malgré ce rapport sans suite, quelques scientifiques français ont continué à s'intéresser au sujet, comme l'astrophysicien Jean-Pierre Petit, auteur de nombreux ouvrages sur les ovnis et les abductions. Selon Myriame Belmyr, il a payé un très lourd tribut pour cet engagement. « Jean-Pierre Petit a été abducté et a même eu un implant dans le pied. Pour avoir fait son travail, il a été mis au ban de la communauté scientifique. » Jean-Pierre Petit suggère que des gouvernements terrestres – notamment le gouvernement étasunien – ont des contacts secrets avec des ethnies extraterrestres qui nous rendent visite. Une thèse qui ne passe pas très bien dans les médias et les sphères de pouvoir. Selon Myriame Belmyr, il ne parlerait plus aujourd'hui à cause de critiques trop virulentes à son égard.

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Face à cela, le gouvernement français ne dit rien, malgré la création du GEIPAN, le Groupe d'études et d'informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés. Ce dernier a pour objectif d'étudier tous les signalements d'ovnis en France et d'archiver tous les témoignages reçus. Myriame Belmyr doute de l'honnêteté de ses membres : « Ils sont nécessairement au courant [des abductions N.D.L.R], notamment avec des rapports réguliers. C'est évident. » Au-delà de ce groupe d'études, des organisations non-gouvernementales tentent de lever le voile sur ce phénomène. La commission Sigma 3AF, composée de plusieurs ufologues et de scientifiques comme Jean-François Clervoy, un ancien astronaute français, cherche à récolter le plus d'informations possible sur le sujet pour les faire remonter au gouvernement. « Nous n'avons jamais eu de retours de leur part », me confie Myriame Belmyr, qui n'a que peu d'espoir de voir la situation évoluer.

Si, comme l'affirme Myriame Belmyr, des centaines de Français se font enlever par des entités extraterrestres, quel en est le but ? Selon Mme Belmyr, c'est « sans doute pour de la manipulation génétique. Dans mon cas comme dans d'autres il y en a eu, c'est sûr. » D'autres abductés vont beaucoup plus loin et estiment que la Terre est un zoo géant dans lequel des extraterrestres nous manipuleraient sans éveiller nos soupçons, ou presque.

Cet été, l'astrophysicien américain Duncan Forgan a publié une étude dans la revue International Journal of Astrobiology dans laquelle il a tenté de calculer les probabilités que notre planète soit le zoo d'une espèce bien plus évoluée – en lien avec le paradoxe de Fermi. Son résultat est que cette théorie est « hautement improbable » car il faudrait que les différentes civilisations se soient mises d'accord pour éviter de nous contacter – ce qui semble impossible vu les distances en jeu.

Myriame Belmyr, qui n'est que peu convaincue par la théorie du zoo, considère que les extraterrestres sont loin d'être les êtres malfaisants que certains peuvent imaginer. À l'entendre, ils ont énormément de choses à apprendre de nous, et c'est d'ailleurs pour cela qu'ils ont recours à ces enlèvements. « Quand on subit ces abductions, on remarque qu'il y a des ressemblances entre eux et nous, avance-t-elle. Il y a une forme de vie chez eux. Je me souviens qu'ils me disaient être particulièrement intrigués par nos émotions et notre art. Ils ne connaissent pas ça. »

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