Covid Long
Santé

Avec les malades du Covid long qui ont choisi de se soigner eux-mêmes

Prescriptions falsifiées et médicaments pour chevaux ; certains patients luttent contre les effets du syndrome chronique avec les moyens du bord.
Nana Baah
London, GB
SS
traduit par Stephen Sanchez

Il est tôt en ce lundi matin, et une longue file de personnes s’étire déjà depuis la table de la cuisine d’un inconnu dans l’Est de Londres. Tout ça pour une simple prise de sang.

Ces personnes souffrent toutes du Covid long, des symptômes persistants qui durent des semaines voire des mois après avoir attrapé le virus. Et elles espèrent toutes qu’en venant faire cette prise de sang ce matin-là, elles pourront enfin obtenir des réponses.

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Avant d’attraper le Covid, Harry était un mec joyeux et actif. Il y a un peu plus d’un an, Harry quittait les États-Unis pour rentrer au Royaume-Uni, où il a démarré un nouveau boulot et emménagé dans une nouvelle maison. Mais au cours des 8 derniers mois, sa vie a changé du tout au tout. Il a souffert des symptômes du Covid long, notamment des épisodes plus ou moins fréquents d’essoufflement ou de confusion mentale, qui l’ont contraint à retourner vivre auprès de sa famille pour que sa mère puisse s’occuper de lui. Si les médecins n’ont cessé de le rassurer et de lui dire qu’il allait « bien », Harry a dû être hospitalisé après avoir gravi une colline parce qu’il n’arrivait pas à retrouver son souffle.

Aujourd’hui, après plusieurs mois de recherches et d’expérimentations avec différents médicaments, Harry dit qu’il est pratiquement guéri.

« J’ai beaucoup de chance, et je crois que ça a grandement contribué à ma guérison, » explique-t-il. « La boîte pour laquelle je travaille m’a vraiment soutenu. Ils m’ont permis de ne travailler que des demi-journées pendant six mois, et ils me paient encore 70% de mon salaire, afin que je puisse me reposer sereinement. Pas mal de malades n’ont pas eu les filets de sécurité dont j’ai bénéficié. La plupart des gens n’ont pas eu cette chance, ni le temps d’attendre que des expériences menées de manière aléatoire portent leurs fruits. La plupart des malades du Covid long ne peuvent plus travailler, et dans certains cas, ils sont même cloués au lit. »

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Assis dans sa cuisine, Harry explique que c’est pour cela qu’il s’investit autant que possible pour aider les autres malades du Covid long à bénéficier du même traitement que lui. Il a organisé la collecte de sang chez lui, embauché un phlébologue professionnel pour faire les prises de sang, et il s’assure que les échantillons sont acheminés dans de bonnes conditions (dans de la neige carbonique) depuis son frigo jusqu’à un laboratoire d’analyses en Californie.

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Ces tests sanguins devraient révéler la présence de biomarqueurs associés au Covid long. Selon la combinaison de biomarqueurs identifiés, chacun des vingt patients atteints de Covid long présent aujourd’hui dans sa cuisine recevra des recommandations de médicaments (déjà présents sur le marché pour traiter des pathologies autres que le Covid) qui devraient permettre de soulager certains symptômes pour de bon. 

Les tests et les recommandations sont réalisés par Bruce Patterson, fondateur de la société pharmaceutique IncellDx, installée en Californie. Patterson était Directeur médical de la virologie diagnostique au sein des hôpitaux et cliniques de l’Université de Stanford, et il s’est intéressé de très près au Covid-19 après avoir étudié les réservoirs et la pathogénèse du VIH-1. Les recommandations de Patterson pour traiter les symptômes dont se plaignaient la plupart des malades souffrant de Covid long comprennent un ISRS (inhibiteur sélectif de la recapture de sérotonine) généralement prescrit en cas de dépression ou de troubles obsessionnels compulsifs ; un antiparasitaire généralement utilisé contre les infestations de vers intestinaux ; et un antirétroviral utilisé dans le traitement du VIH.

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« Je ne peux pas travailler. Je ne pense pas que je pourrai de nouveau exercer mon métier un jour si les choses ne s’arrangent pas. Je me demande quel boulot je pourrais faire… » - Ed, enseignant

Cela étant, ces méthodes de traitement ne sont pas très orthodoxes : aucune équipe médicale n’a prouvé l’efficacité d’un médicament, déjà existant ou mis au point récemment, dans le traitement du Covid long. Dans les faits, l’Agence européenne du médicament et la FDA déconseillent toutes deux l’utilisation de l’antiparasitaire recommandé par Patterson pour traiter le Covid. Aucun des patients avec qui j’ai discuté ne connaît l’existence d’un modèle similaire de « Dallas Buyers Club » au Royaume-Uni – une structure qui permet aux gens de faire analyser leur sang et qui les aide à trouver des médicaments – et je n’ai, moi-même, pas été en mesure d’en trouver non plus.

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Des échantillons de sang dans le frigo de Harry.

« Honnêtement, tous mes espoirs reposent là-dessus, » raconte Ed, enseignant, présent dans la file d’attente pour la prise de sang. « Je ne peux pas travailler. Je ne pense pas que je pourrai de nouveau exercer mon métier un jour si les choses ne s’arrangent pas. Je me demande quel boulot je pourrais faire… Il faudrait que je sois assis toute la journée, autrement, je m’épuise très vite. Et il faudrait aussi que ça ne me demande pas trop d’efforts intellectuels, parce que je n’arrive plus à réfléchir correctement. »

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Après avoir attrapé le coronavirus, Ed s’est soigné et, en dehors de douleurs ponctuelles et d’une certaine fatigue, il s’est senti bien pendant quelques mois. Mais après un temps, les troubles sont tous revenus : confusion mentale, tachycardie et essoufflement. Et aujourd’hui, 14 mois plus tard, sa vie est toujours très affectée par tous ces symptômes.

« Je me souviens avoir pensé que je faisais une crise cardiaque. J’ai vraiment eu l’impression que mon cœur allait exploser dans ma poitrine, » se souvient-il. « Et vers le mois de juin, ma mère m’a conseillé d’aller faire un tour sur Internet. Je l’ai fait et, sincèrement, j’ai été très surpris de tomber sur les témoignages de tous ces gens qui disaient vivre exactement la même chose que moi et souffrir des mêmes maux. »

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Si vous faites une recherche sur Facebook pour « Covid long », ou quelque chose dans ce genre, vous tomberez sur des dizaines de groupes avec leurs lots d’anecdotes et de conseils. Rien qu’en Angleterre, il y a plus de 367 000 personnes qui vivent encore avec des symptômes du Covid long, plus d’un an après leur première infection, si l’on en croit les données de l’Office of National Statistics.

Parmi ces près de 400 000 personnes, on retrouve de nombreuses histoires proches de celle de Ed, mais les symptômes varient. Sur l’un des groupes Facebook à ce sujet, une femme met en ligne des photos et des vidéos de pelotes de cheveux de la taille d’un poing, et elle demande si d’autres personnes souffrent de telles pertes de cheveux. Beaucoup d’autres personnes évoquent un syndrome de tachycardie orthostatique posturale (POTS en anglais), qui affecte la circulation sanguine et peut entraîner des étourdissements, des évanouissements et une accélération du battement cardiaque. Certaines personnes souffrent de symptômes similaires depuis trois mois, et d’autres depuis plus longtemps, comme Ed dont la santé a commencé à se dégrader en mars 2020.

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Mais s’il y a une chose en commun à toutes les personnes atteintes de Covid long que j’ai rencontrées, c’est celle-ci : après plus d’un an sans pouvoir travailler, après avoir perdu des amis et des parents emportés par la maladie, après avoir tant souffert de l’isolement, ces gens se sentent abandonnés. Car malgré les centaines de milliers de témoignages de personnes disant souffrir d’une forme de Covid sur le long terme, ces gens ont toujours le sentiment que les médecins anglais minimisent l’importance, l’existence et la gravité de ce Covid long.

*

James attend à l’extérieur pour pouvoir passer à la prise de sang. Il raconte qu’il avait l’habitude d’aller faire du VTT en montagne, mais que son Covid long l’a contraint à arrêter tout ce qui se rapproche plus ou moins d’une activité physique. Il a vraiment hâte de retrouver la forme et de reprendre ses activités préférées, mais James raconte qu’un médecin l’a accusé d’inventer ces symptômes.

« Le médecin m’a dit : ‘Sérieusement ?! [Il a] probablement perdu son boulot et n’a simplement pas envie de se remettre à travailler.’ Sauf que je n’ai pas perdu mon boulot. J’ai continué à travailler, et en plus, j’adore mon travail, » explique-t-il. Je n’ai vraiment aucune raison d’inventer cette histoire. Je n’essaie pas d’obtenir quoi que ce soit. Et pourtant, voilà. Ils imaginent qu’on est juste des tire-au-flanc. »

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« Pour l’instant, aucun traitement n’a vu son efficacité prouvée lors d’essais comparatifs randomisés, il est donc très difficile de se faire prescrire quoi que ce soit, parce que les médecins ont peur de perdre leur licence. » - Yu

On peut d’ailleurs s’étonner que les médecins et infirmières qui font la queue partagent des histoires similaires à celle de James, alors que le service national de santé, le NHS, a reconnu et identifié le Covid long comme un syndrome existant. Yu, une médecin qui a travaillé dans une unité de soins intensifs pendant la deuxième vague, en fin d’année 2020, raconte que la direction de l’établissement où elle officiait était sceptique face à sa demande de congé maladie pour Covid long. « J’ai dû me présenter physiquement sur mon lieu de travail au bout de trois mois, » explique-t-elle.

Pendant notre conversation, Yu a clairement des difficultés à respirer. Elle m’explique que c’est comme ça depuis six mois. Elle doit donc rester assise, la tête appuyée contre le mur. La direction de l’établissement où elle travaillait n’a fini par la croire qu’en voyant son état de santé.

« Lorsque j’y suis allée, j’avais de grosses difficultés à respirer, » raconte-t-elle. « J’ai fini par m’asseoir dans un coin, et je n’ai pas dit un mot pendant plus d’une heure. Pendant les trois mois où j’avais été en congé pour maladie, je n’avais jamais porté de masque plus de dix minutes d’affilée. Du coup, là, j’avais vraiment toutes les peines du monde à respirer. Finalement, ils sont venus me voir et m’ont envoyée vers une clinique spécialisée dans les problèmes de la cage thoracique. »

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Helen, est une jeune médecin. Elle vient de sortir après sa prise de sang. Et dans son cas aussi le monde médical s’est avéré insensible et sans la moindre compassion. 

« C’est vraiment le truc le plus frustrant. Personne ne sait quoi faire, personne ne veut aider, » raconte-t-elle. « Mais le monde médical est très prudent. Pour l’instant, aucun traitement n’a vu son efficacité prouvée lors d’essais comparatifs randomisés, il est donc très difficile de se faire prescrire quoi que ce soit, parce que les médecins ont peur de perdre leur licence. »

Au lieu de se faire aider, la plupart des malades du Covid long s’entendent dire qu’ils souffrent d’anxiété. Shaney, par exemple, s’est rendu aux urgences douze fois à cause d’une combinaison de symptômes qui comprennent entre autres de l’essoufflement, des acouphènes et des doigts de pied violets, sans doute à cause de petits caillots de sang, aussi connus sous le nom d’« orteils Covid », et du sang dans son urine.

« On m’a proposé une thérapie par la parole. Un simple coup de téléphone. C’est tout, se souvient-il. Je n’ai pas besoin de thérapie par la parole. J’ai des symptômes physiques qui doivent être traités. À l’époque, ils ne faisaient pas de test de dépistage du coronavirus, donc je n’avais aucun moyen de prouver que je l’avais. »

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Les premières personnes qui ont eu des symptômes du Covid, au tout début de la pandémie, n’étaient pas en mesure d’obtenir des tests, et beaucoup ont été renvoyés chez eux par des médecins généralistes sans trop d’explications, comme le racontent plusieurs malades de Covid long. Au début de la pandémie, les tests étaient très rares en Angleterre. En mars 2020, le gouvernement annonçait, lors de multiples conférences de presse, qu’il souhaitait arriver à tester 25 000 personnes par jour. Mais au 1er avril, ils n’arrivaient qu’à 9 793 personnes testées par jour. 

Pour certains patients atteints de Covid long, un traitement adapté passerait par la création d’un établissement destiné aux malades de Covid long. En octobre 2020, le NHS anglais annonçait dix millions de livres sterling d’investissement dans une soixantaine de centres spécialisés à travers le Royaume-Uni. Les communiqués de presse disaient que les patients pourraient rencontrer des médecins, des infirmières, des thérapeutes occupationnels et des physiothérapeutes et obtenir « une évaluation physique et psychologique, afin d’être dirigés vers les traitements et les services de rééducation adaptés. »

Ed dit qu’il ne doit d’avoir été orienté vers un spécialiste qu’à la ténacité et aux appels insistants de sa petite amie. Et que les cliniques ne lui ont pas été utiles. « Ils appelaient une fois tous les trois mois, » raconte-t-il. « La femme avec qui j’ai parlé a été assez honnête avec moi. Elle m’a dit ‘Vous me l’apprenez.’ Ils n’ont pas la moindre idée de la situation. La seule chose qu’ils m’ont proposée, c’était de m’administrer une faible dose de béta-bloquant (pour réduire le rythme cardiaque). » 

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D’après le NHS anglais, des fonds devraient être alloués prochainement à destination des services qui luttent contre le Covid long. Un porte-parole du NHS déclarait : « Il y a environ un an que le Covid long a été reconnu, et sur cette année, le NHS a investi 34 millions de livres pour créer plus de 80 établissements afin d’aider les patients atteints de Covid long à travers tout le pays. Les cliniques sont déjà ouvertes et viennent en aide à des milliers de personnes. » 

« Le NHS va continuer de répondre aussi vite que possible à mesure que de nouvelles découvertes seront faites autour du Covid long, et toute personne souffrant de symptômes liés au virus sur le long terme devra contacter son médecin généraliste afin que le NHS puisse lui apporter l’aide dont elle a besoin. » 

*

Certains malades souffrant du Covid long sont assez sceptiques quant à la légitimité des médicaments recommandés par Patterson et à leurs effets sur le Covid long. Un patient Covid long, qui a demandé à rester anonyme parce qu’il travaille dans le milieu médical, dit qu’il risque tout de même d’y recourir, en désespoir de cause. « Il y a un an, si vous m’aviez posé la question de savoir si j’allais prendre ce médicament, j’aurai clairement dit non. Mais aujourd’hui, je vous répondrai sans doute que oui, » raconte-t-il.

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Un billet publié sur l’un des groupes Facebook insinue que IncellDx n’est pas complètement digne de confiance. Ce post s’appuie sur une anecdote racontée par un autre patient pour qui deux échantillons de sang sont revenus avec des résultats différents. Mais beaucoup d’autres membres du groupe ont très vite affirmé que cela n’était que rumeur et calomnie. 

Patterson comprend le fait que les patients hésitent lorsqu’il leur recommande tel ou tel médicament, mais il les soutient. « Les gens qui méprisent cette approche médicamenteuse, en utilisant à d’autres fins des médicaments déjà existants, ne sont pas dans l’état d’esprit adapté à ces temps de pandémie, » explique-t-il. « En tant que médecins, nous avons un principe fondamental qui est ‘D’abord, ne pas nuire,’ auquel nous devons nous tenir. Mais si nous utilisons des médicaments dont nous connaissons les propriétés pour les avoir déjà utilisés dans d’autres cas, pourquoi faudrait-il attendre entre huit et douze mois de tests cliniques alors que nous connaissons déjà l’efficacité desdits produits ? On pourrait attendre, faire des tests et laisser les gens souffrir pendant que nous attendons les résultats. Ou on pourrait simplement utiliser l’expérience que nous avons déjà et traiter les patients. »

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Ku, qui lutte contre le Covid long depuis le mois de mars, était très sceptique quant à la légitimité de Patterson après avoir fait quelques recherches sur Facebook. « Si l’on compare avec le Royaume-Uni, le système de santé américain est clairement marqué par une incitation à la prescription de produits médicamenteux. Et je me demandais, ‘Est-ce que ces mecs sont réglos ?’ explique-t-elle. « Mais les témoignages se multipliaient de personnes disant ‘je prends ces produits et j’arrive vraiment à passer des moments agréables, sans douleurs.’ »

Ku est aujourd’hui l’une des nombreuses malades du Covid long à déclarer avoir connu une amélioration significative de son état de santé après avoir utilisé les médicaments recommandés par Patterson. Elle dit que ses symptômes, de fortes douleurs thoraciques, des difficultés à respirer et des problèmes digestifs entre autres, commencent à s’estomper, après quatre semaines d’utilisation de ces médicaments. « Pendant quelques jours, je prenais de faibles doses, et ma capacité à faire de l’exercice physique s’est améliorée instantanément, » raconte-t-elle. « Je pouvais marcher dans la rue. Je ne faisais pas de rechutes étranges après avoir fait un peu d’exercice. Je respirais bien. C’est vraiment fou mais ça fonctionne. »

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La plupart des malades de Covid long racontent qu’ils ont dû faire preuve de créativité pour se procurer les médicaments qui leur avaient été recommandés, car les médecins généralistes ne vous donnent pas une ordonnance si facilement. Si certains patients ont réussi à mettre la main sur les ISRS qu’on leur avait recommandés en surjouant des problèmes de santé mentale auprès de leur généraliste, il est très difficile de se procurer les autres médicaments par les voies habituelles en Angleterre. 

Beaucoup de patients racontent avoir commandé les médicaments auprès d’un fournisseur installé à Hong Kong. Ils les ont généralement reçus en moins de quinze jours. D’autres sont passés par de fausses prescriptions, en utilisant des modèles trouvés en ligne, un médecin sorti du chapeau et une signature générée par une intelligence artificielle.

Enfin, certains patients ont suivi un chemin moins conventionnel pour obtenir les précieux médicaments. Laura, mère célibataire, atteinte de sclérose en plaques, raconte qu’elle meurt d’envie de pouvoir à nouveau s’occuper de ses enfants. Un jour, elle a lu sur un groupe Facebook qu’une autre femme avait obtenu de bons résultats en utilisant un produit antiparasitaire sous forme de pâte, destiné uniquement aux animaux, et Laura, à la limite du désespoir, a décidé d’en commander un pour elle.

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« La femme qui avait écrit ça sur le groupe Facebook disait qu’il fallait inventer une histoire avec des chevaux et présenter un plan de vermifugation. J’ai dû indiquer la race de mes chevaux et leur poids. Et quelques jours plus tard, la pâte pour cheval est arrivée par la poste, » explique Laura.

Pour l’instant, elle n’a pas encore utilisé la pâte pour cheval, mais elle est tentée. « J’ai vraiment beaucoup hésité. Je ne peux pas aller voir un médecin et lui dire, ‘J’ai ce vermifuge en pâte pour cheval, comment dois-je me l’administrer ?’ » explique-t-elle. « J’en ai parlé à Patterson, et il m’a dit que certaines personnes avaient eu des effets secondaires en utilisant des pâtes pour animaux. Il dit que je dois me procurer un antiparasitaire pour humain. Mais pour l’instant, je n’en ai pas. Et j’ai encore celui pour les chevaux. Donc j’ai souvent été tentée de le prendre. Le seul truc qui me freine encore, c’est que j’ai une sclérose en plaques et que je ne sais pas si ça n’empirerait pas encore plus le truc. »

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Quelques-uns des compléments et autres médicaments que Harry s’est achetés au cours des 8 derniers mois.

Il y a bien d’autres obstacles, et pas des moindres, lorsque l’on essaie de se soigner seul, sans l’aide d’un médecin.

D’abord, c’est cher. Ku l’a découvert lorsqu’elle a reçu un devis de 250 £ par cachet (290 euros pièce, et elle avait commandé 14 cachets !) de la part d’une clinique de voyage. Harry a dépensé un bon millier de livres en compléments et autres médicaments depuis le début de sa dure bataille contre le Covid long. Quant à Laura, en plus de compléments très coûteux, elle a essayé des traitements alternatifs comme le reiki, elle a fait appel à un nutritionniste, et elle a vu un ostéopathe une fois par semaine. « J’ai investi tout mon argent jusqu’au dernier penny pour essayer d’aller mieux, » explique-t-elle.

En plus de tout l’argent que les patients ont dû dépenser, les informations au sujet des divers médicaments qu’on leur a recommandés ne sont pas toujours faciles d’accès. Harry dit qu’il a passé des heures et des heures à éplucher des documents médicaux assez techniques et verbeux, alors qu’il nageait en pleine confusion mentale, pour essayer de comprendre comment fonctionnait tel ou tel médicament, ainsi que les effets du Covid long sur son corps.

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Alors que nous attendons le coursier qui doit venir récupérer les échantillons de sang, il est évident que ces personnes fondent beaucoup d’espoirs sur les résultats de ces analyses. Si les résultats et les recommandations s’avèrent justes, cela pourrait leur permettre de recommencer à s’occuper de leurs gosses, mais aussi d’envisager, enfin, un retour à la vie normale. En d’autres termes, de retourner bosser et de revoir leurs amis, entre autres choses. 

Quoi qu’il en soit, pour l’instant, la seule chose à laquelle ces gens peuvent se raccrocher, c’est ce sentiment de communauté qui les anime et les réunit aujourd’hui. Ils ont beau ne pas se connaître, l’empathie qui règne ici est évidente.

Le groupe est assis sur le trottoir, devant la maison de Harry, et chacun partage son histoire puis écoute celles de ses camarades. La création d’un groupe Whatsapp pour rester en contact est suggérée, histoire de continuer à échanger. Mais surtout, la plupart des membres disent qu’ils sont heureux de trouver du soutien auprès d’autres personnes qui comprennent vraiment l’épreuve que chacun est en train de traverser.

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