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Quatre étudiants relèvent le défi le plus difficile et extrême d'Islande

Quatre étudiants britanniques, tous âgés de 19 ou 20 ans, tentent en ce moment la traversée de l'Islande. Les experts ont trouvé un nom à leur défi : « L’expédition de l’année, sinon de la décennie ».
Photo by Kieran McNally

Quand le 2 décembre, Charlie Smith et sa bande sont arrivés à leur hôtel à Akureyri, en Islande, il faisait un – 2°C plutôt clément. Il neigeait légèrement alors que la nuit tombait après une très courte journée. L'équipe de quatre aventuriers britanniques, tous étudiants de moins de 21 ans, s'apprêtait à traverser l'Islande du Nord au Sud, sans soutien extérieur, en ski si-possible, en tirant leur matériel sur des traîneaux. Ils s'attendaient à ce que le périple long de 350km, jamais réalisé en hiver, leur prenne environ un mois.

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Au même moment, à 800 km au sud d'Akureyri, une forte dépression fonçait vers le Nord-Est à travers l'Atlantique. L'ouragan, dénommé Desmond, se dirigeait vers le sud de l'Islande. Les météorologues et les équipes de sauvetage n'étaient pas sûrs des conséquences qu'il aurait sur le pays et sur les quatre hommes en pleine expédition.

« Puisqu'on a souvent des ouragans et que beaucoup ne font que passer, faire des prévisions plus de deux jours à l'avance est de la pure spéculation, expliquait Brando Arnarson, membre de l'Association de Recherche et de Sauvetage Islandaise (ICE-SAR) qui avait collaboré avec les Britanniques au moment où ils préparaient leur aventure. Si on donne un avertissement précoce et que l'ouragan ne se produit pas, les avertissement suivants ne sont plus crédibles. »

Smith et son équipe ont chaussé leurs skis le 3 décembre. Au bout de trois jours, l'ouragan Desmond s'est dirigé vers l'Islande. L'ICE-SAR a envoyé à l'équipe un avertissement urgent, via un téléphone satellite, et leur a conseillé de trouver refuge dans la ville de Kópasker, à environ 15 km de leur position. Le jour suivant, le groupe a skié jusqu'à la petite ville et s'est terré dans un foyer en attendant Desmond.

Ça a été le plus gros ouragan que l'Islande ait connu en 25 ans. La vitesse du vent a atteint jusqu'à 260 km/h. Étonnamment, le plus inquiétant pour l'équipage a été la pluie. À cette période de l'année, la pluie se transforme en glace. Une tente couverte de glace devient un plastique semi-rigide qu'il est quasiment impossible de ranger dans sa housse. Il faut taper les attaches des skis avant de pouvoir chausser. Du coup, les quatre Britanniques se sont retirés dans un foyer et ont revu leur plan de route afin de prendre en compte toutes les variables.

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Le mardi, on pouvait lire dans leur communiqué de presse : « L'équipe a décidé de prendre le temps aujourd'hui et demain pour réévaluer et réorganiser sa stratégie . »

La team a quitté Akureyri le jeudi 10 décembre pour sa deuxième tentative de « la traversée la plus froide ».

Stefan Rijnbeek, Angus Dowie, Charlie Smith, et Archie Wilson.

L'expédition historique de la bande est d'autant plus impressionnante étant donné l'âge de ses membres. Smith, 19 ans est le leader et est à ce jour le plus jeune à avoir traversé l'Islande du Nord au Sud, en été et sans soutien. Stefan Rijnbeek, 20 ans, à moitié Russe, a passé une bonne partie de presque tous ses hivers à faire de l'alpinisme en Russie. Angus Dowie, 19 ans, est un coureur de marathon et un coach sportif. Archie Wilson, 19 ans, a de l'expérience en randonnée mais présente certainement le CV le moins fourni des quatre. Ce qui leur manque en âge, ils le compensent en préparation.

« J'ai passé trois heures avec les gars avant qu'ils ne partent pour leur première tentative, raconte Arnarson de l'ICE-SAR. Je trouve que malgré leur âge ils étaient plutôt raisonnables, bien préparés, et avaient de l'excellent matériel. J'ai vu tellement de groupes bien moins préparés aussi bien mentalement que physiquement. Je ne me fais pas de soucis pour leur expédition d'un mois. »

Arnarson a aussi communiqué avec l'équipe pendant qu'ils étaient regroupés à Kopasker : « Je leur ai conseillé de changer leur plan de marche pour prendre une route sur laquelle l'extraction serait plus facile. Ils m'ont écouté. »

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Louis-Philippe Loncke, un aventurier belge qui a été le premier à traverser et la Death Valley et le désert Simpson d'Australie à pied, a traversé l'Islande pendant l'été de 2010. Il a pour projet de le faire en hiver et a observé la progression et la préparation de l'équipe. Il ne mâche pas ses mots quand il aborde les difficultés et les dangers qu'implique ce projet.« Je mettrais un 5 pour l'ascension de l'Everest (10 étant le plus dur), 6 pour la traversée de l'Antarctique, et un 9 pour la traversée de l'Islande », a-t-il dit.

Si le groupe réussit sa traversée en l'espace d'environ un mois, Lonck pense qu'il pourrait s'agir de « l'expédition de l'année si ce n'est celle de ces dix dernières années. ». L'Islande se situe juste au sud du cercle Arctique mais il se trouve également au dessus d'une zone tectonique sensible, ce qui signifie qu'elle n'est typiquement pas recouverte entièrement de neige, même pendant l'hiver. Le pays a une part de climat polaire, mais il est aussi sujet à des courants d'air chaud se déplaçant vers le Nord. Un climat aussi versatile rend la traversée en hiver particulièrement difficile, ce que n'arrange pas la nature même du paysage.

« La diversité du terrain rend la chose très éprouvante, explique Loncke. Si le vent est trop fort, la tente peut se déchirer et faire voler des éclats de glace. S'il y a des endroits peu enneigés mais avec la présence de sable noir, cela peut causer des brûlures. La pluie peut se mêler à la cendre dans les lieux peu enneigés, rendant le ski impossible. Il peut arriver d'avoir à tirer ses traineaux sur un sol abrasif. En Antarctique, il y a juste de la glace et de la neige. Ici, les différents types de terrain et le vent vous ralentissent plus qu'on pourrait le croire. C'est bien sûr possible si on est bien préparé et qu'on a beaucoup de chance – si tout est parfait. Mais regardez ce qui vient de leur arriver. »

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Dix-neuf sponsors, dont Sony et SanDisk, soutiennent l'expédition, surtout à travers des donations de matériel et d'équipement. Un des objectifs de l'équipe est de réaliser un film ayant pour but d'inspirer d'autres jeunes à poursuivre leurs aventures. Ils veulent partager leurs frissons et leurs défis, mais en même temps démontrer que ce genre de projet est à la portée de beaucoup de gens, s'ils s'y préparent correctement.

Renan Ozturk et Taylor Rees du Collectif Camp4 se sont portés volontaires pour réaliser le film. Rees a intégré l'équipe avant même qu'ils ne commencent la randonnée. Oztur les rejoindra vers la fin.

« Renan et moi étions intéressés par l'idée de faire ce film parce que nous voulions raconter une histoire différente, explique Rees. Combien y-a-t-il de films sur des expéditions avec des gosses de 19 ans ? »

Rees a attendu que Desmond passe, avec le groupe, à Kopasker. Un des membres de l'équipe, dont le nom n'est pas publié, a souffert d'une infection pulmonaire et n'est pas reparti aujourd'hui. Rees a quitté Kopasker en ski avec les trois autres, mais elle a quand même fait part de ses inquiétudes par rapport à l'expédition.

« Maintenant on est amis avec ces gosses. Du coup, je m'inquiète, dit-elle. Du jour au lendemain, un ouragan peut se créer. On considère qu'il y aura un ouragan par semaine durant la durée de toute l'expédition. Je suis inquiète mais je pense qu'ils peuvent le faire. »