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Culture

En Indonésie, des exorcismes pour « soigner » l’homosexualité

Le maire de Padang pense que les homosexuels et les transgenres sont possédés par des génies appelés « djinn ».
Gavin Butler
Melbourne, AU
Sandra  Proutry-Skrzypek
Paris, FR
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Il n’est pas illégal d’être gay dans la ville indonésienne de Padang, mais au cours des six dernières semaines, pas moins de 18 personnes LGBTQ ont été appréhendées en vue de recevoir un « soutien psychologique » et une « réhabilitation ». Ce sont les termes employés par la police municipale. Selon la BBC Indonésie, ils désignent en réalité une cérémonie qui s’apparente à un exorcisme, utilisé comme traitement de conversion des homosexuels.

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En Indonésie, les exorcismes sont pratiqués comme une composante de la religion islamique connue sous le nom de ruqyah, utilisée pour traiter toutes sortes de « maladies », qu’il s’agisse de l’arthrite, de l’asthme, de l’échec commercial ou de l’insomnie. Dans le contexte de la thérapie de conversion, on pense que les membres de la communauté LGBTQ peuvent être guéris de leur « maladie sociale » en éliminant les esprits malveillants et les démons qui les possèdent, connus sous le nom de djinn. De nombreux habitants de Padang, dont le maire de la ville, Mahyeldi Ansharullah, sont d’avis que les personnes homosexuelles et transgenres souffrent d’une sorte de maladie mentale. Et le seul moyen de les guérir, disent-ils, est par la ruqyah.

Le maire Ansharullah travaille maintenant avec la police municipale (Satpol PP) pour éliminer ce qu'il considère comme un comportement « immoral » des LGBTQ à Padang. La Satpol PP peut donc arrêter quiconque est soupçonné d’être gay ou transgenre. Au cours des dernières semaines, elle a arrêté plus d’une dizaine de personnes lors de raids anti-LGBTQ à travers la ville. Selon la société de presse sud-est asiatique Coconuts, le gouvernement a également accepté de collaborer avec certaines organisations de la société civile afin de pratiquer la ruqyah sur les personnes concernées.

« Ici, nous avons formé des experts en matière de ruqyah », déclare Lucky Abdul Hayyi, membre de l'une de ces organisations, selon Covesia. « En général, les hommes sont possédés par des génies féminins. En tout cas, c'est ce que nous avons observé en travaillant avec des personnes LGBTQ. De plus, les travestis seront également pris en charge par les TNI [Forces armées nationales indonésiennes]. »

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Aris Fathoni, un religieux islamique pratiquant la ruqyah depuis 15 ans, reconnaît lui aussi la présence d’un « désordre » au sein de la société. Aris explique que sa méthode consiste à lire des versets religieux à ses patients et à les frapper sur le dos avec un manche à balai. Il croit que cette pratique peut « soigner » les membres de la communauté LGBTQ.

« Dans certains cas, le patient a réagi, ce qui prouve qu’il n’est pas pur et qu’il y a une interférence surnaturelle dans son corps qui le pousse à commettre des actes homosexuels », a-t-il déclaré à l’ABC. Il a donné des explications plus détaillées à la BBC : « Si le patient réagit, cela a quelque chose à voir avec le génie. Parfois, le patient est pris d’un vertige ou d’une nausée. D’autres fois, il agit comme un bencong [argot indonésien pour désigner un homme homosexuel ou une femme transgenre], c’est-à-dire comme un homme, mais avec plus de grâce – c'est le terme. » Après cela, dit Aris, « le génie sort du corps du patient. »

Bien que ce type d'attitude homophobe ne soit pas répandu dans l'ensemble de l'Indonésie, des milliers d'habitants de Padang se sont récemment prononcés en faveur des initiatives prises par le gouvernement local pour « lutter contre l'immoralité dans la ville ». L’Association de psychiatrie d’Indonésie classe toujours l’homosexualité, la bisexualité et le transgenre parmi les troubles mentaux.

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