Un groupe de furry québécois combat l’extrême droite
Le Logo de la Meute furry, via la Meute. Originalement de white_reshiram.

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Un groupe de furry québécois combat l’extrême droite

Le groupe appelé La Meute affirme qu’il perturbe le recrutement en ligne du groupe d’extrême droite du même nom.

Si vous cherchez le nom du plus grand groupe d’extrême droite sur Facebook, une chose fantastique se produit, une chose à laquelle vous n’êtes pas préparé.

Le premier résultat n’est pas le groupe de militants anti-islamistes enragés qui veulent redonner le Québec aux Québécois. C’est plutôt une merveilleuse page consacrée au furry et qui porte le nom de La Meute officielle.

Le chef de La Meute furry, groupe qui a vu le jour avant La Meute d’extrême droite, s’appelle M. Wolfenstein et il tient à ce que vous sachiez que leur meute, c’est la vraie.

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« Si on ne dit rien, ils vont gagner. Si on ne fait rien, ils vont gagner, dit-il. Facebook est l’une des nombreuses façons de s’exprimer et de montrer notre soutien pour nos camarades opprimés par ces suprémacistes blancs. L’idée, c’est de se battre. De se battre avec notre identité. On est la vraie meute, et eux la fausse. »

Une capture d’écran montrant le premier résultat sur Facebook

La Meute furry se présente comme un groupe contre le fascisme, le racisme et le sexisme, pour l’ouverture des frontières, l’amour et les câlins de furry. Elle existe depuis plusieurs années sous une forme ou une autre, mais s’est toujours appelée La Meute. Le groupe n’a jamais senti le besoin de devenir public avant l’arrivée d’une autre meute, celle d’extrême droite.

« On est devenu public parce qu’on a vu que la fausse meute devenait très, très nombreuse, et elle nous donnait à nous, les furs, une très mauvaise réputation, explique Wolfenstein. Tout le monde pensait qu’on était une bande de racistes, mais ce n’est pas nous, on ne parle que d’amour et c’est ce pour quoi on a créé cette page. On est 1600 furs, environ, contre la fausse meute. »

À la tête de La Meute furry, il y a M. Wolfenstein et son partenaire Captain Cat. Les deux ont demandé que l’on utilise leur nom de fur dans cet article par crainte de représailles du groupe d’extrême droite. M. Wolfenstein a affirmé que le groupe milite aussi dans la vraie vie, mais il n’a pas voulu en dire plus pour la même raison.

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Un mème publié sur la page de la vraie Meute

On a beaucoup critiqué Facebook parce qu’il est la plaque tournante des fausses nouvelles, mais ce n’est pas la seule utilisation insidieuse du réseau social. C’est aussi le centre de recrutement et d’organisation de la vague moderne de militantisme d’extrême droite.

La Meute est d’ailleurs l’un des groupes les plus actifs sur Facebook au Canada. C’est en grande partie par l’entremise de pages Facebook secrètes qu'elle a préparé ses manifestations.

Mais elle a fait une erreur flagrante.

« La Meute a des groupes, mais elle n’a pas de page Facebook officielle. On a vu ça comme une occasion de se débarrasser de la réputation qu’elle nous a faite, dit M. Wolfenstein. C’est un moyen très différent de contre-attaquer. On ne savait pas qu’on pouvait se servir de ça : utiliser notre identité pour nous battre. »

La page de La Meute furry est tapissée de mèmes contre l’extrême droite, occasionnellement entrecoupés d’une nouvelle pro-furry (habituellement avec une allusion à l’immigration). Mais surtout, le groupe perturbe le recrutement en ligne de La Meute d’extrême droite. Comme la page de furry est la première dans les résultats de recherche, les furs (comme s'appellent les fans de furry) reçoivent des messages de gens – du Québec, mais aussi du reste du Canada et des États-Unis – voulant se joindre à l’autre meute ou lui donnant leur appui.

« Il y a beaucoup de gens qui nous écrivent pour se joindre à la fausse meute, dit M. Wolfenstein. Ils disent par exemple : "On veut être en contact avec vous parce qu’on en a aussi assez des terroristes et on veut reprendre le contrôle du pays." J’essaie d’argumenter, en demandant : “Qui sont ces terroristes? Est-ce que ce sont les néonazis?" »

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En à peine quelques mois, la page des furs a gagné plus de mille nouveaux abonnés. Ses créateurs disent que c’est un « laboratoire » pour l’utilisation de leur identité afin de confronter et de désarmer. Souvent, les groupes d’extrême droite s’appuient sur un type très particulier et intense de masculinité, selon M. Wolfenstein, alors ils « savent que notre identité de furs leur fait mal. On se sert de notre sous-culture contre les personnes qui font le mal. »

Le duo affirme avoir obtenu l’appui de beaucoup de furs québécois, et quelques-uns d’entre eux argumentent sur la page. Des membres du groupe d’extrême droite, agacés par les attaques des furs, viennent et se disputent avec eux.

« Certaines personnes, un mauvais garçon en particulier, sont en colère contre nous et disent qu’on donne une mauvaise réputation au groupe parce qu’on est antifascistes. Il y a des commentaires de membres de la fausse meute aussi, disant qu’ils ne sont pas racistes ou sexistes, mais notre travail, c’est d’argumenter contre eux, de prouver au monde qu’ils sont racistes. »

Un mème publié sur la page Facebook de la vraie Meute

L'avatar de M. Wolfenstein est un loup, un symbole qui lui est très cher. Pour lui, le fait que la fausse meute ait aussi pris le symbole du loup est un affront.

« Au Québec, il y a beaucoup de groupes racistes, mais la fausse meute est le plus important. Quand un groupe de mauvaises personnes prend votre nom, votre identité, l’image du loup pour en faire un symbole raciste, c’est offensant. C’est blessant. On devait faire quelque chose, on devait rétablir l’image du loup, on devait prendre position. »

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