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Allemagne

À la demande de la NSA, l’Allemagne aurait espionné Paris et Bruxelles

Le quotidien Süddeutsche Zeitung affirme que les services de renseignement allemands auraient écouté de « hauts fonctionnaires » français et européens pour le compte de la NSA.
Image via Wikimedia Commons

Selon le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung (SZ), les services de renseignement allemands ont espionné de « hauts fonctionnaires » français et européens à la demande de la NSA. Les faits remontent au moins à 2008. Les révélations du quotidien de Munich daté de jeudi viennent s'ajouter à un autre scandale d'espionnage, industriel cette fois, dévoilé par les médias allemands au début de la semaine. Les services secrets allemands dépendent de la chancellerie, les regards se tournent donc vers la chancelière Angela Merkel, qui s'est publiquement plainte en 2013 des pratiques d'écoutes de la NSA dont elle aurait été elle-même victime.

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Le service fédéral de renseignement allemand, le BND, « a aidé la NSA à faire de l'espionnage politique », peut-on lire dans le SZ, qui explique que des membres du ministère des Affaires étrangères français, de l'Élysée, et de la Commission européenne ont été écoutés depuis les quartiers généraux du BND, dont les installations bavaroises ressemblent à de grosses balles de golf.

Depuis une semaine, les médias allemands s'intéressent à l'étroite collaboration entre Berlin et Washington en matière de renseignement après les attentats du 11 Septembre. Un accord entre les deux pays a été signé en 2002. Du côté allemand, il est paraphé par Frank-Walter Steinmeier, le chef de cabinet de la chancellerie, désormais ministre des Affaires étrangères. Mais très rapidement, le travail de renseignement aurait dépassé le cadre de la lutte contre le terrorisme, explique l'édition en ligne du magazine allemand Der Spiegel de la semaine dernière. « Les Américains n'étaient pas seulement intéressés par le terrorisme ; ils ont utilisé leurs capacités techniques pour espionner les entreprises et les firmes d'Europe de l'ouest, » lit-on dans le magazine.

D'après le Spiegel, au moins en ce qui concerne l'espionnae industriel, les autorités allemandes savaient dès 2008, peut-être avant, que les demandes des Américains sortaient du cadre de l'accord initial signé entre les deux pays. Sur les 690 000 numéros de téléphone et les 7,8 millions d'adresses Internet que la NSA a demandés à la BND de surveiller, 40 000 dépassaient le mandat de l'agence. Chargés d'écouter des entreprises comme EADS ou encore Eurocopter, les agents allemands auraient vite compris qu'il s'agissait d'espionnage industriel. D'après le quotidien BILD, qui a eu accès à des documents d'une commission d'enquête parlementaire du Bundestag qui examine les modalités de cette collaboration avec l'agence américaine, les services du BND ont fait remonter ces informations à la chancellerie en 2008 et 2010.

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L'édition du SZ de ce jeudi modère ces soupçons en expliquant que cette surveillance n'aurait eu lieu que « dans des cas isolés » dans lesquels les États-Unis voulaient obtenir des informations sur des exportations illégales.

Angela Merkel occupe le poste de chancelière depuis 2005. En 2013, quand Edward Snowden rend publics des documents secrets de la NSA, elle s'étonne d'être écoutée par la NSA. Elle déclare alors : « L'espionnage entre amis, ça ne se fait pas. » Ce qui conduit aujourd'hui une partie de la presse et de la classe politique allemande à lui demander des comptes, voire à la taxer d'hypocrisie. Interrogée ce lundi au sujet du volet d'espionnage industriel, elle a simplement répondu : « Il faut que toute la lumière soit faite. »

Son ministre de l'Intérieur, Thomas de Maiziere, est lui aussi en première ligne dans cette affaire. Déclarant le 14 avril dernier qu'il n'y avait pas eu d'espionnage industriel, il est apparu ce mercredi sur le site de BILD avec un nez de Pinocchio, et il doit s'expliquer la semaine prochaine devant la commission d'enquête parlementaire allemande.

Suivez Mélodie Bouchaud sur Twitter: @meloboucho

Image via Wikimedia Commons