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Pour Clément

Procès Méric : l’ombre de Serge Ayoub

S’il n’a toujours pas répondu à la convocation des juges, tout porte à croire que la figure de l’extrême droite radicale a été en contact avec les agresseurs présumés de Méric.
crédit : AFP

« Va te faire enculer. T’es un salopard. Sur ton épitaphe, il y aura marqué "Salopard" ». C’est en ces termes fleuris que Serge Ayoub a accueilli notre coup de fil. Pourtant, nous souhaitons simplement prendre des nouvelles de sa santé. Figure de l’extrême droite radicale, Ayoub a été convoqué au procès des trois agresseurs présumés de Clément Méric. Mais il s’est fait porter pâle, présentant un certificat médical pour justifier son absence. Au téléphone, on l’a pourtant trouvé très en forme – vociférant insultes et injures à grand renfort de décibels…

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Serge Ayoub, 50 ans, règne sur l’extrême droite radicale depuis les années 80. Et n’a jamais caché son goût pour la violence. À un journaliste qui lui demandait, à l’époque, quel traitement il réservait à ses ennemis, il répondait sans détour : « On leur tape sur la gueule ». Trente ans plus tard, son ombre plane sur le meurtre de Clément Méric. L’un des prévenus, Esteban Morillo, avait sur la poitrine un tatouage représentant le symbole de Troisième Voie, le groupuscule « nationaliste-révolutionnaire » fondé par Serge Ayoub dans les années 80 – et dissout depuis. Tatouage qu’il a, un mois avant le début du procès, fait recouvrir par l’ancienne serveuse du local tenu par… Serge Ayoub.

Au lendemain de la mort de Clément Méric, Ayoub a déclaré sur I-Télé ne pas connaître Esteban Morillo et ses acolytes. Permettons-nous d’en douter : selon les informations que nous avons pu nous procurer, Morillo et lui se sont parlés au téléphone deux minutes avant le début de la baston qui a coûté la vie et Méric. Et ils se sont aussi rappelés quelques minutes après la fin tragique de la bagarre. De quoi ont-ils parlé ? Interrogé par la police trois jours plus tard, Ayoub affirmera ne plus s’en souvenir. Quoi qu’il en soit, les protagonistes de la baston mortelle ont dans la foulée rejoint le local d’Ayoub – où ils ont passé la nuit. Tout porte donc à croire qu’ils se connaissaient. S’il venait au procès, le rôle qu’il a joué – ou non – dans l’affaire pourrait être éclairci. Mais l’homme est apparemment trop souvent souffrant pour faire le déplacement.

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Auparavant, Ayoub a maintes fois réussi à passer entre les mailles du filet judiciaire. Sa fiche de police, datée du 25 septembre 2013, est pourtant peu flatteuse : violences volontaires, injures raciales, outrage à agent, proxénétisme, trafic de stupéfiants… Son nom est cité dans de nombreuses affaires plus ou moins sordides – sans qu’il n’ait jamais été condamné.

La première fois, c’était en 1998, quand James Dindoyal, un Mauricien, a été agressé par deux proches d’Ayoub, qui l’ont forcé à boire de la bière empoisonnée. Plusieurs témoins ont assuré qu’un troisième homme était là – que beaucoup ont soupçonné d’être Ayoub. S’il a affirmé être au Japon au moment des faits, il n’a pas pu en apporter la preuve : il avait, jurait-il, perdu son passeport.

Comment expliquer qu’en dépit de son goût affiché pour la violence, Ayoub n’ait jamais été condamné ? La rumeur raconte qu’il jouerait les indics pour les services de renseignement. Elle est largement relayée par le milieu antifa – sans jamais avoir été prouvée. Un ancien policier nous l’a confirmé, sous couvert d’anonymat. Mais là encore, sans en apporter la preuve. Une seule chose est sûre : à l’heure où nous publions ces lignes, Serge Ayoub n’a toujours pas répondu à la convocation des juges.

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