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Music

Il devient quoi Chad Hugo, au juste ?

On est allés demander au mec des Neptunes qui n'est pas Pharrell Williams si tout se passait bien pour lui, maintenant que son pote est multi-milliardaire.

Photos : Daniel Kohn

« Eté 2001, mec, il se passait tellement de trucs ici. On avait Snoop dans cette pièce, Nelly dans une autre, et je ne me souviens même plus qui était dans la troisième. Mais ça n’arrêtait pas. »

Chad Hugo se souvient des heures de gloires du Record Plant, le studio d’Hollywood où lui et son partenaire Pharrell Wiliams ont enregistré leurs plus gros hits. Ce lieu est l’une des principales raisons qui l’ont poussé à quitter le confort de sa Virgnie natale pour la Côte Ouest, là où il est désormais installé avec sa famille.

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Si Pharrell Williams a servi de visage à la fois pour les Neptunes et leur projet funk-rock N.E.R.D., Chad Hugo est, lui, toujours resté dans l’ombre. Ces dernières années, l’étoile de Pharrell n’a cessé de briller à travers ses collaborations avec Daft Punk, Gwen Stefani, Robin Thicke et Alicia Keys, ou ses propres productions (« Happy », au cas où vous auriez la chance de vivre sur une autre planète). Pendant ce temps, Chad Hugo s’est contenté de bosser pour des artistes un peu moins établis comme Kenna, Earl Sweatshirt, The Internet, The Wrestlers et la chanteuse malaise Yuna, tout en signant la B.O. de Manny, un documentaire sur le célèbre boxeur Manny Pacquiao.

Fidèle à sa réputation d’homme de l’ombre, Hugo se confie rarement en public. Au bout de 30 minutes de conversation, ses interventions deviennent aussi évasives qu’insaisissables. Ce n’est pas un manque de respect ou un manque d’attention, mais le type a tellement de choses qui lui traversent l’esprit qu’il dit tout ce qui lui passe instantanément par la tête, que ce soit pertinent ou non. Voilà comment nous nous sommes retrouvés à parler de Retour vers le futur, du DJing en journée, de Ralph Waldo Emerson ou de l’Iphone 6.

Noisey : Quel est ton rôle dans The Wrestlers ? Tu es simplement là en tant que superviseur et producteur exécutif ?
Chad Hugo : Je suis là au cas où ils ont besoin de moi. Ces mecs font juste ce qu’ils ont à faire. Ils réprésentent Houston. C’est marrant parce que les gens « représentaient » beaucoup plus par le passé. « We rep’ Hollis, Queens »… Pas très loin de chez moi, Missy Elliott représentait P-town (Portsmouth en Virginie). Je suis né dans un hôpital militaire là-bas, donc je représente P-town. The Wrestlers représentent Tex-Mex, les barbecues, Beyoncé et Slim Thugga. Et je suis à fond avec ça.

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Entre ton taf pour Earl Sweatshirt, The Internet, etc, t’es toujours occupé en fait.
Je fais toutes sortes de trucs. J’ai été DJ avec mon pote Daniel Biltmore de Baltimore sous le nom MSSLCMMND. Dédidace à eux. On sort des mixtapes et on fait tourner d’autres trucs. On est des espèces de troubadours.

Et Pharrell ? Vous faites encore des trucs ensemble ?
Pharrell et moi on est potes, je suis un fan de sa musique. On est récemment remontés sur scène dans notre ville de Virginia Beach pour le NBA All-Star Game, c’était un concert pour la station de radio locale. Les gens étaient dingues, il y’a avait beaucoup de monde sur une énorme surface de pelouse. On peut dire que c’était une sorte de reformation de N.E.R.D. Ma fille, qui a 14 ans, était dans la fosse à faire du two-step et je m’inquiétais un peu pour elle. Ils sont fans de la musique et connaissent toutes les paroles.

Ça doit être assez fou de voir que vos gosses ont le même âge que vos plus gros tubes.
Ça l’est. Le monde change et tu ne peux pas sans cesse regarder en arrière. Quand tu joues un morceau, tu peux espérer en faire un classique. La musique est un espace-temps, c’est carrément une machine à remonter le temps. Dans le film Retour vers le futur c’était la DeLorean. Aujourd’hui c’est un MP3. Un vinyle, si tu as de la chance.

C’est comment de bosser avec Biltmore comparé à ce que tu fais seul ?
Je ne sais pas trop, c’est dur. Daniel fait toutes sortes de concerts. J’ai tenté de faire un FaceTime avec lui là, au début de l’interview, il était en train de jouer dans un pub en pleine journée, c’est intéressant et taré de savoir que des gens veulent voir un DJ en pleine journée. Il pourrait aussi bien être DJ à un mariage et balancer la « Marche Impériale » pendant la procession.

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Tu aimes faire le DJ ?
Ouais, mais je le fais rarement. On joue quelques disques et c’est marrant. Tu peux avoir un arsenal de trucs, si tu n’en joues aucun, tu ne peux pas espérer que les autres le fassent à ta place. Tu dois les jouer pour toi, ensuite espérer et prier pour que ça se passe bien. « Mon âme survivra parce que mon esprit ne mourra jamais », voilà la devise qui nous est venue lorsqu’on jouait sur la Côte Est. Ensuite, on a débarqué ici, en stop, et on est devenus DJs. C’était une sorte de rite, passer par le Runyon Canyon, observer la nature, puis rentrer à la maison et écouter de la musique. C’était nouveau pour nous, on a redécouvert l’essence du truc, que tu ne captes pas forcément quand t’es d’ici.

Parle-moi du film Manny.
J’étais vraiment excité de bosser sur ce film. J’ai eu de la chance. Je ne pouvais pas suivre son rythme par contre. Quand il grimpait des collines, je suffoquais derrière. J’ai fait des séries de tractions et d’abdos de malades. Voilà mon expérience en gros. On a voyagé avec lui, sur d’autres continents. J’étais fan du film de Leon Gast sur Mohammed Ali (When We Were Kings). Il y aussi celui qu’il a fait sur la salsa, ça me parlait aussi. C’est drôle parce que le réalisateur a montré les musiciens qui ont été déterminants dans la naissance de la musique salsa et il a donné un regard nouveau là-dessus, tu vois les mecs à leur boulot, etc.

Comment as-tu vécu le cyclone qui a traversé la musique depuis le premier hit des Neptunes ?
Tout a changé avec la technologie. Ce n’est pas une mauvaise chose. Les gens ont accès à tout en un clic. [Chad prend son iPhone et me le tend pour accentuer son discours]. Ces trucs proposent toutes ces applications musicales. J’ai mes synthés Korg, un module de sauvegarde. J’ai même un tuner et un compresseur. Il y a un truc qui s’appelle Smule et il te créé un morceau sur place. Un titre instantané.

Tu envisages la technologie comme un outil pour améliorer la musique ?
Ça peut l’être. Parfois tu vois des gens qui tiennent leur téléphone en permanence, comme s’ils communiquaient avec, alors que souvent t’en as vraiment pas besoin. Mais bon, c’est un débat sans fin, on ne va pas s’aventurer là-dedans. Je me demande ce que Ralph Waldo Emerson ferait s’il avait un iPhone. Je ne sais pas s’il serait aussi autonome.

À l’époque de Twitter et Facebook, comment fais-tu pour rester aussi discret ?
Twitter est un bon endroit pour évacuer. Pour certains, c’est toute leur vie. Pour moi c’est juste… je n’ai pas forcément envie de cracher sur Twitter mais… ok, peut-être que je ne sais pas m’en servir correctement. Voilà.

Tu t’en sers pour quoi ?
Avant je postais des chansons dessus. Genre « voilà un morceau, je n’ai pas grand chose à dire dessus mais c’est gratuit ». Je ne sais pas si ça contrecarrait le business ou quoi mais mon manager Corey m’a dit d’arrêter de le faire, parce que je pouvais me faire de l’argent avec. Ensuite, on a tout mis sur Soundcloud et j’ai demandé « ok, où est l’argent ? » et il m’a répondu que c’était juste de la promo. [Rires] La différence entre les deux c’est que Soundcloud est orange et Twitter est bleu. Voilà pourquoi la composition est bien meilleure que la diffusion. Je préfère bosser avec un mec plus patient que de sortir un truc wack. Avec la famille, avec le temps, tu as besoin de suivre un régime. Il y a quatre saisons et des vacances qui doivent être inscrites sur un calendrier. Mon secret c’est aussi d’emmener mon réveil avec moi partout où je vais. J’attends l’iPhone 6, il a l’ait plutôt cool. Je crois que je m’en choperai un aussi.

Daniel Kohn est en ce moment même en train de mater son téléphone. Suivez-le sur Twitter.