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Music

Swervedriver sort son premier disque depuis 15 ans

Et il est mixé par le chanteur de Ride. Ageing shoegazers unite !

Si je devais désigner les trois climax indiscutables de mon adolescence au rayon musique jouée live en direct devant tout le monde sur des instruments traditionnels, je garderais sans la moindre hésitation, le concert de Jane's Addiction à l'Élysée-Montmartre le 9 octobre 1990 (crânes partiellement rasés, LSD, mer humaine, élucubrations mystiques, puissance de feu maximale), le concert de Teenage Fanclub au Zénith le 24 juin 1992 en première partie de Nirvana (cheveux longs, pulls troués, coolness absolue, Doc Marteens huit trous non coquées, batteur le plus classe de l'Univers) et le concert de Swervedriver à l'Espace Ornano le 11 novembre 1991 (tornade de dreadlocks, t-shirts manches longues, cuir élimé, basses telluriques, bottes de moto).

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Sur la photo présente ci-dessus, Swervedriver sont tels qu'on les a découvert au début des années 90 : quatre pouilleux d'Oxford, dotés d’une paire d’atouts monstrueux -une basse à la profondeur insondable naviguant sur des crêtes dub et surtout, la voix d'Adam Franklin, à mi-chemin entre Arthur Lee et Dieu. Le groupe bénéficiait, en outre, d'un troisième avantage non négligeable : l'indéfectible soutien de leur pote Mark Gardner, chanteur de Ride. C'est lui qui harcèlera Alan McGee pour qu’il les signe sur Creation, mettant en marche une machine chromée, massive, incontrôlable, qui débouchera à l'automne 1991 sur

Raise

, premier album touché par la grâce et la fureur, qui sonne, en gros, comme si le Neil Young de

Zuma

s’était brutalement fait arracher du sol par un cyclone fuzz, avant d'être laissé pour mort dans un désert de feu.

De l’intro de « Sci-Flyer » au riff impérial de « Rave Down », de la basse nucléaire de « Deep Seat » aux intouchables accords de « Lead Me Where You Dare », tout dans ce disque évoque avec une puissance rarement égalée ces images de fuite vers le nulle part au volant d'une Plymouth Barracuda, droit vers un mur d'infini, la dernière clope du dernier paquet de l'Univers au coin des lèvres. Mais malgré une presse unanime et des concerts magistraux, l’Europe boudera le groupe, qui trouvera son salut aux USA avec l’album suivant,

Mezcal Head

. Un disque qui taillera dans le psychédélisme mercuriel de

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Raise

pour donner l’avantage aux riffs épiques et fédérateurs, posant les bases d'un sous-genre passablement ignoré : le bro-gaze, variante « amitié virile et sports extrêmes » du shoegaze, dans laquelle s'illustreront des groupes comme

Hum

ou

Catherine Wheel

.

Après une désastreuse tentative de recentrage pop sur les deux LPs suivants (

Ejector Seat Reservation

et

99th Dream

), le groupe se séparera en 1998, Adam Franklin profitant de sa calvitie naissante pour entamer une carrière solo aux Etats-Unis, option « regard apaisé vers l'avenir et amour authentique du bois ». Reformé en 2008 pour une série de concerts, Swervedriver sort aujourd'hui -et par aujourd'hui, j'entends

aujourd'hui même

- son premier disque depuis 15 ans :

Deep Wound

, single tout à fait honnête (mixé par Mark Gardener, l'ami des années lose), même si on préfèrera de très loin la version démo présente en face B. Un nouvel album est prévu courant 2014, mais aucune information n'a encore fuité quant à son orientation. Tant qu'ils nous évitent le plan

snowboarder dads

, c'est OK.

Lelo Jimmy Batista est rédacteur en chef de Noisey France. Il porte un maximum de cheveux, mais aucun d'entre eux n'est une dreadlock. Il est sur Twitter -@lelojbatista