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Music

Tout ce que vous vouliez savoir sur le Groezrock 2015 sans oser le demander

Les skaters grisonnants connaissent-ils toujours les paroles du « Bro Hymn » de Pennywise ? Refused sont-ils enfin devenus chiants ? La guitare de Vinnie Stigma est-elle vraiment branchée ?

Toutes les photos sont de Gianni Manno Pennywise, Lagwagon, Satanic Surfers, Refused, Good Riddance, Social Distortion et les Dwarves réunis en Flandre ? De quoi régler ses comptes avec l’intégrale Punk-O-Rama et le catalogue Burning Heart en moins de 48 heures, aller-retour compris. D'autant plus qu'American Nightmare, Trash Talk, Defeater, Ceremony et Turnstile étaient également présents à l'affiche, histoire de nous rappeler qu'on était toujours en 2015. En route donc pour le Groezrock, pendant mélodique du Ieper Fest, qui étalait les 1er et 2 mai derniers son insensé casting sur les plaines verdoyantes de la cité modérément balnéaire mais particulièrement accueillante de Meerhout.

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Super accessible car pas franchement axée découverte, voire limite putassière, la cuvée 2015 du Groezrock oscillait tranquillement entre pop-punk et metalcore, attirant, de fait, un public on ne peut plus disparate, du vieux skater grisonnant branché Lagwagon aux sécessionnistes coreux beatdown à bandana et short sportswear. Aux comptoirs des tireuses, les écussons Rvivr jouaient au coude-à-coude avec les vestes des Turbojugends du monde entier - à noter à ce sujet une belle représentation du chapitre du Havre, bien joué les mecs. Niveau parité et diversité, par contre, on repassera : le nombre total de filles restant assez déplorable et celui de noirs encore plus - un seul sur près de 40 000 festivaliers et encore, c'était le joueur de trombone des Mighty Mighty Bosstones. Eh ouais. Rayon dignité aussi, on se retrouve vite en rupture de stock. De toute évidence, pour certains, le D.I.Y est soluble dans le Jägermeister : après quelques shots, les gros durs en sweat Terror se mettent à danser sur du Corona mais fuient le dancefloor lorsqu'on leur met du Oasis. Bienvenu dans le mindfuck de la liqueur aux 56 herbes.

Iron Reagan

JOUR 1

Équation immuable : plus il y a de staff et de groupes sur les côtés de la scène, plus le groupe est validé. Par exemple, pour Iron Reagan, c'était blindé. Et largement mérité d'ailleurs. Pour sa première européenne, le gang de Tony Foresta a defloré le public avec classe et brutalité, fidèle au serment Trashcore, destruction = distraction. Une engagement également suivi à la lettre par Trash Talk, qui livreront un set décadent et 100 % panique, sans crash-barrières, ni attaque de drones à déplorer. Juste un peu de crowd surfing sur scène, pour la forme.

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Le temps de vérifier que Ceremony s'est effectivement bien perdu dans le post-punk et la cold wave, on trace voir Pennywise qui, de toutes les grosses machines mélodiques U.S. présentes à l'affiche, seront clairement ceux qi s'en seront le mieux tirés (loin devant Lagwagon ou les Satanic Surfers qui ont planté leurs lives en beauté). Un son direct et sans fioritures, un chanteur cool et crédible… Et même usée après de skate et de festivals, leur subversion à deux balles reste touchante : « Fuck Authority » sera l'occasion d'un joyeux sing along, tout comme le rituel « Bro Hymn ».

Traversée express de pelouse et de cadavres pour rejoindre la bien nommée scène Back To Basics, où, on le vérifiera plus tard, tous les grands moments du Groez auront finalement eu lieu. Comme ce putain de live de Defeater. Habitué aux concept-albums denses et techniques, le groupe du Massachussets ne garde pour la scène que le désespoir et la tension. Énorme pression émo donc, mais toujours breakée sur le fil par de terribles incartades hardcore. Entre rage et classe, Boston met la Belgique à genoux.

Social Distortion clôturera cette première journée avec un set aux airs d'aimable feu de camp, comparé au reste de la prog. Ce qui tombe plutôt bien, car à ce stade des opérations, une bonne partie du public dort debout ou au sol. Rideau.

JOUR 2

Ça commence mal : les tournées de Frikadel nous ont fait louper le beatdown de Nasty, As Friend Rust et No Turning Back, mais surtout Turnstile, sur lesquels on vous a déjà à peu près tout dit. Merci la viande en mousse. L'avantage, par contre, c'est que nous étions pleins d'huile et de haine pour Comeback Kid et surtout Agnostic Front. Le groupe de Roger Miret et Vinnie Stigma est aujourd'hui suffisamment légendaire pour ramasser des fans à chaque nouvel album, du coup, bonne nouvelle : il y a des jeunes qui découvrent Agnostic Front en 2015. Ce qui à la fois hyper beau et un peu con aussi, il faut bien l'admettre. Du coup, des morceaux récents comme « My Life My Way » ou « For My Family » passent au même niveau que les hymnes officiels que sont « Crucified » ou « Gotta Go ». C'est dommage, mais en même temps, qui pourrait être assez taré pour aller leur dire ? D'autant plus que la seule question que le public se posait ce soir-là était : « La guitare de Stigma était-elle vraiment branchée ? » Le mystère reste entier.

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Après avoir survolé sans la moindre conviction Frenzal Rhomb, The Loved Ones, le live déplorable de Millencollin ou la séance de gymnastique suédoise administrée par Raised Fist - ce groupe n'a pas joué un tube en dix ans -, les cœurs impatients se retrouvent pour le concert le plus attendu de ce deuxième jour : la reformation de Give Up The Ghost aka American Nightmare. Eux aussi sont de Boston. Séparé brutalement en 2004, le groupe revient aujourd'hui hanter la vieille Europe, toujours emmené par le terrible Wesley Eisold ! Eisold, nazillon-glamour cintré de cuir, kid ultra-dépressif amputé d'une main, qui pue le sexe et le malaise ! Eisold, homme-orchestre aux milles vies, tour à tour poète, clochard, libraire, fondateur de Cold Cave, alcoolique ! Et chanteur d'American Nightmare, donc.

Eisold ! Verdict ? Tuerie. Totale. Comme annoncé sur le programme, il est 23h30 pétantes, le quatuor joue en avant dernier et va démarrer son intro. Ça démarre par le tube « Love American », à l'ancienne. Le public est rassuré, le pit part en couille direct. Je vois des sweats et des bières voler, un type à ma gauche se fait défoncer une côte, notre photographe y laisse une optique d'appareil.

Encapuchonné, Eisold regarde de travers, hurle à s'en plier en deux, moshe avec son moignon, tourne le dos à la scène, souffle la névrose sur la fosse. De quoi faire passer le Bouffon Vert pour un membre de Duran Duran. L'unique guitare est enfouie sous des tonnes de reverb, la batteur est parfaitement ajusté, super-violent. « Young Hearts Be Free Tonight » sera le motto de ce live ultra-féroce, qui volera la soirée et même tout le festival. American Nightmare On traîne finalement les pieds jusqu'à Refused, où malgré tous les effort de Dennis Lynxzen et de ses potes encostardés d'Umea - armés pourtant d’un nouvel album pas si pourri - on ne parviendra pas à entendre autre chose que des berceuses. Ça tombe bien, c'était l'heure.

Théophile Pillault n’a arrêté ni les frikadels, ni Defeater. Il est sur Twitter - @TheoPillault