Les Intérieurs de la nouvelle jungle de Calais

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Les Intérieurs de la nouvelle jungle de Calais

Ou comment le plus grand bidonville d'Europe abrite, dans ses tentes, salons de coiffure, mosquées, discothèques et commerces improvisés.

Les photojournalistes sont nombreux à avoir visité la « Jungle » de Calais – le nombre de réfugiés arrivant en Europe a augmenté de manière exponentielle au cours de ces deux dernières années, et c'est donc un sujet qui nous touche de près. Personnellement, j'y suis allée car je voulais mieux comprendre les raisons qui poussaient ces femmes, ces hommes et ces enfants à fuir pour venir dans une Europe qui fait apparemment toujours rêver. Je m'y suis rendue trois fois, en juillet et novembre 2015, puis en février – sur une durée de trois semaines au total.

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Quand on arrive dans la « New Jungle » de Calais, la diversité des commerces surprend : on se rend compte que la vie reprend le dessus et que la résilience humaine est sans limites, quelles que soient les circonstances. C'est ce phénomène-là qui m'a tout particulièrement intéressée : la vie quotidienne des réfugiés à Calais, les restaurants, les coiffeurs, les cultes, les théâtres. Les dessous de la jungle, en somme : ce que l'on ne voit pas forcément dans les médias, mais qui continue d'exister. Il y a quelques semaines, une partie de la New Jungle a été démantelée – notamment la partie sud, où étaient installés de nombreux commerces. Je compte y retourner pour continuer mon reportage sur les dessous de la jungle, et continuer de suivre ces réfugiés. En voici quelques extraits. Retrouvez Constance sur son site.

24/07/2015, Calais, France. Zimako vient du Nigéria. Il est arrivé à Calais il y a quelques mois, avant que la New Jungle ne soit créée. Avant, il a habité à Nice, où il a travaillé pendant quelques mois. Il veut demander l’asile en France, et il attend son RDV pour la prise d’empreintes digitales. « Je veux rester à Calais, parce que je n’aime pas les grandes villes ». Il a construit son abri, avec du bois et des dons qu’il a reçus de Calaisiens. Il a aussi construit une école qui délivre des cours de français. L’inauguration a eu lieu il y a deux semaines, à laquelle s'est rendue la maire de Calais.

19/07/2015, Calais, France. La première messe se déroule dans l’église de la Jungle de Calais, après que la première a brûlé quelques semaines auparavant. L’église a été construite par des migrants éthiopiens avec le soutien du Secours Catholique. Des Éthiopiens, des Érythréens, mais quelques Iraniens viennent aussi prier ici le dimanche.

17/07/2015, Calais, France. Une école a été construite dans la jungle par Zimako, un migrant nigérian. Des professeurs bénévoles y donnent des cours de français.

08/11/2015, Calais, France. Si les restaurants sont majoritairement afghans, les bars et les « clubs » sont érythréens et éthiopiens. Ils restent ouverts toute la nuit et la musique y est assourdissante. Les migrants y viennent pour s’amuser, danser, boire des bières et oublier leur quotidien difficile. Ici, Shaheen.

09/11/2015, Calais, France. La jungle de Calais a doublé de volume depuis le mois de juillet – 4 500 à 6 000 migrants y seraient installés. Les tentes et autres abris de fortune se multiplient, avec un forte arrivée de Kurdes, de Syriens, d’Irakiens et de « Bedun » du Koweït. Les conditions de vie y sont plus que précaires, avec seulement quelques douches et latrines à leur disposition, ainsi que quelques points d’eau. Les abris sont disparates selon les communautés : certains ont de simples tentes, d’autres des maisons en bois financées par des associations ou des volontaires privés. Ici, huit Bedun du Koweït se sont construit une maison en bois.

10/11/2015, Calais, France. Rosie est née à l’hôpital de Calais il y a 10 jours. « Nous avons pensé à l’appeler Elisabeth, comme la reine d’Angleterre, pour nous porter chance. »

20/02/2016, Calais, France. Dans ce barber shop afghan, au milieu de la jungle de Calais, les réfugiés peuvent venir se faire couper les cheveux ou raser la barbe – mais aussi prendre une douche grâce aux cabines installées au fond de la boutique. Le service coûte deux euros.

20/02/2016, Calais, France. Les magasins ont toujours plusieurs fonctions dans la jungle : à la fois « barber shop », douche, épicerie, cette officine est aussi l’endroit où dorment des réfugiés.

22/02/2016, Calais, France. Dans ce restaurant afghan, un billard donné par un particulier a été installé.

22/02/2016, Calais, France. Située près du centre Jules Ferry, la partie nord de la jungle est beaucoup moins développée que la partie sud : il n’y a pas de restaurants ni de magasins, à part ceux qui vendent des produits de première nécessité. Habitée majoritairement par les Soudanais, cette partie ne doit normalement pas être démantelée.

23/02/2016, Calais, France. L’église éthiopienne a été construite en juillet 2016, la précédente avait brûlé. Tous les dimanches, une grande messe a lieu. Mais les autres jours, les réfugiés chrétiens viennent aussi y prier.

23/02/2016, Calais, France. Les Soudanais ont moins de moyens que les Afghans, les Éthiopiens ou les Érythréens : ils dorment dans la partie nord de la jungle, composée d’abris sommaires et dans laquelle il y a très peu de magasins et aucun restaurant. Ici, des Soudanais jouent aux cartes.