Santé

Des chercheurs tentent de définir médicalement ce que mourir veut dire

Selon la plus grande étude internationale sur la physiologie de la mort : « il s'agit plus d'un processus continu qu'un coup d'interrupteur. »
La science de mourir

Les vivants ont toujours eu peur que les morts reviennent à la vie. La résurrection est au cœur de l’intrigue du Nouveau Testament ; au XIXe siècle, on mettait des cloches sur les cercueils par crainte d’un enterrement prématuré et, aujourd’hui, le débat sur la fin de vie revient régulièrement dans l’actualité.

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Malgré tous les efforts des médecins pour rassurer les familles inquiètes dans les unités de soins intensifs et les hospices, la mort reste un mystère, même pour les chercheurs les plus chevronnés.

Selon Sonny Dhanani, pédiatre à l'Institut de recherche du CHEO en Ontario, le manque de connaissances sur des questions comme la mort cérébrale et la mort cardiaque, entre autres, a conduit à une prolifération de « mythes et de fausses informations ».

« Toutes ces histoires de personnes revenant soi-disant à la vie ont des conséquences : les familles ont du mal à consentir au don d’organes et à faire confiance à la communauté médicale lorsqu’un proche décède, dit-il. Nous voulions apporter des preuves scientifiques pour éclairer la compréhension médicale du déroulement de la mort. »

Dhanani a dirigé la plus grande étude internationale sur la physiologie de la mort à ce jour, parue le 28 janvier dans le New England Journal of Medicine. Elle suggère que les vivants peuvent dormir tranquille.

Entre 2014 et 2018, les chercheurs ont observé le déroulement de la mort chez 631 patients dans des unités de soins intensifs au Canada, en République tchèque et aux Pays-Bas. Une fois les appareils d’assistance respiratoire arrêtés, ils ont mesuré le rythme cardiaque et la tension artérielle des personnes décédées : chez 14 % d’entre elles, ils ont constaté une brève reprise de l'activité cardiaque après une absence de pouls. Mais les médecins n’ont jamais douté du décès des patients. « Personne n'a survécu. Tout le monde est mort. Il n’y a pas eu de retour à la vie », dit Dhanani.

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Ces redémarrages ont été de courte durée (l'activité cardiaque la plus longue s’est produite seulement 4 minutes et 20 secondes après que le cœur a cessé de battre) et trop faibles pour maintenir d'autres organes en vie, comme le cerveau.

« Une fois que le processus de mort commence, il est très difficile de ramener le corps d'une personne à un état lui permettant de survivre. » - Joanna Lee Hart

« Ces données nous aident à comprendre comment définir médicalement la mort, qui est davantage un processus continu que la simple pression d'un interrupteur », explique Joanna Lee Hart, spécialiste des maladies pulmonaires et professeure à faculté de médecine de l'université de Pennsylvanie.

« Notre corps va pomper des produits chimiques naturels pour nous maintenir en vie le plus longtemps possible, poursuit Hart. Mais une fois que le processus de mort commence, il est très difficile de ramener le corps d'une personne à un état lui permettant de survivre. » 

Voilà qui devrait rassurer les familles et les soignants. L’étude appuie la pratique actuelle, qui consiste à attendre cinq minutes après l’arrêt du pouls avant de déclarer le décès et de procéder à une éventuelle récupération des organes.

Bien qu'il y ait encore beaucoup de questions sur la mort et la vie après la mort, cette étude – qui ne sera probablement jamais reproduite étant donné sa nature délicate – règle au moins celle de l'activité cardiaque post-mortem.

« Constater la mort est éprouvant pour tout le monde, dit Dhanani. Nous espérons que le fait d'étudier rigoureusement la mort et son processus, sans avoir peur d'en parler, nous aidera à l’avenir. »

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