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Crime

Grand rassemblement post-coup en Turquie ce dimanche

Le rassemblement s’est déroulé alors qu’Amnesty International a déclaré avoir reçu des preuves crédibles que des détenus font l’objet de coups et de tortures, dont des viols, depuis la tentative de coup d’État.
Baz Ratner/Reuters

Des dizaines de milliers de partisans du parti au pouvoir et des principaux partis d'opposition en Turquie, habituellement ennemis farouches, se sont rassemblés ensemble ce dimanche, en soutien à la démocratie. Ce rassemblement fait suite au coup d'État manqué, alors que le Président Tayyip Erdogan resserre son emprise sur le pays.

Ce lundi on apprend que des mandats d'arrêt ont été lancés contre 42 journalistes.

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Les manifestants ont tenu un rassemblement appelé « République et Démocratie », tous les partis confondus, sur la place centrale Taksim, à Istanbul, dans un esprit d'unité à la suite du coup d'État manqué, au cours duquel au moins 246 personnes ont été tuées et plus de 2 000 ont été blessées.

Exceptionnellement, des chaînes télévisées pro-gouvernement ont diffusé un discours en direct du principal leader de l'opposition, Kemal Kilicdaroglu.

« C'est un jour pour s'unir, un jour pour se dresser contre les coups d'État et les régimes dictatoriaux, un jour pour laisser la voix du peuple se faire entendre », a-t-il déclaré lors du rassemblement, organisé par son parti d'opposition laïc, le Parti républicain du peuple (CHP), mais aussi soutenu par le AKP, le parti au pouvoir, et par d'autres groupes d'opposition.

« Nous sommes tous ensemble à Taksim aujourd'hui. Aujourd'hui est un jour où nous faisons l'histoire tous ensemble. »

Massive crowd in — Mohammed Jamjoom (@MIJamjoom)July 24, 2016

CHP, AKP supporters flock to Istanbul's Taksim to jointly rally against coup — Hürriyet Daily News (@HDNER)July 24, 2016

La place Taksim, comme la plupart de la ville d'Istanbul et d'autres villes, a été inondée de drapeaux turcs. Les partisans du CHP portaient aussi des photos de leur héros Kemal Ataturk, le soldat qui a fondé la république laïque sur les cendres de l'Empire Ottoman en 1923.

Another photo from — Yasin (@YasinAbdullah_)July 24, 2016

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La tentative de coup d'État semble avoir uni les deux bords dans un élan de ferveur nationaliste. Le maire d'Istanbul, du parti AKP, Kadir Toptas, assuré la gratuité de transports en commun à l'occasion du rassemblement.

Les partis d'opposition ont oscillé entre soutien à la purge contre les partisans du coup d'État et des appels pour la réconciliation et la retenue.

« La Turquie devrait être complètement purifiée du putsch », affirme une « Déclaration de Taksim » publiée par Kemal Kilicdaroglu du CHP. « L'État ne devrait pas être gouverné par la haine et la vengeance. Les coupables du putsch devraient être jugés légalement », ajoute la déclaration.

A photo from Taksim rally where CHP and AKP joint together to condemn the coup attempt — Yasin (@YasinAbdullah_)July 24, 2016

Erdogan, qui a échappé de peu à une capture et à une mort possible durant la tentative de coup d'État, a déclaré l'état d'urgence, lui permettant de faire passer des lois sans l'approbation du parlement. Le but affiché est d'éradiquer les partisans du coup d'État.

Ses détracteurs craignent qu'il utilise le coup d'État avorté pour mener une répression sans discernement contre les opposants. Les autorités turques ont suspendu, placé en détention ou lancé des enquêtes sur plus de 60 000 soldats, membres de la police, juges, enseignants, fonctionnaires et autres la semaine dernière.

Le Premier ministre Binali Yildirim a déclaré samedi que les autorités ont arrêté environ 13 000 personnes dans le cadre de la tentative de coup d'État, dont 8 831 soldats. Il a promis que ces personnes auraient un procès juste.

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L'association de défense des droits de l'homme Amnesty International a déclaré qu'elle avait reçu des preuves crédibles que des détenus faisant l'objet de coups et de torture, dont des viols, depuis la tentative de coup d'État.

« Il est absolument impératif que les autorités turques arrêtent ces pratiques odieuses et autorisent les observateurs internationaux à rendre visite aux détenus dans les lieux où ils sont retenus », a annoncé dans une déclaration le directeur du bureau Europe d'Amnesty, John Dalhuisen.

Erdogan a étendu la période maximum de détention pour les suspects de 4 à 30 jours, une mesure qui, selon Amnesty International, a augmenté le risque de torture ou d'autres mauvais traitements à l'encontre des détenus.

Mais pour le moment, la répression semble avoir le soutien d'une large partie du peuple.

« L'état d'urgence est une bonne chose et c'est bien que beaucoup de personnes aient été arrêtées et que la durée des détentions soit étendue », a déclaré Harun Kalyancu, un manifestant de 34 ans, designer de meubles et partisan du parti au pouvoir. « Si des personnes perdent leur emploi, elles doivent être coupables. »

Zuhal Tolbert, 56 ans et retraitée, assure que le gouvernement devrait être plus ouvert.

« Le gouvernement doit penser aux erreurs qu'il a faites, ils doivent penser à l'autre moitié de la population [qui n'a pas voté pour eux] », lance-t-elle. « Nous devons tous nous rassembler. »

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Erdogan accuse le chef religieux musulman, basé aux États-Unis, Fethullah Gulen, qui a beaucoup d'adeptes en Turquie, d'avoir orchestré le coup d'État avorté. Dans son premier décret, Erdogan a ordonné la fermeture de milliers d'écoles privées, d'oeuvres de charité et de fondations qui avaient des liens présumés avec Gulen. Celui-ci nie une implication dans le coup d'État.

Le CHP et d'autres partis politiques ont rapidement rejoint le parti AKP au pouvoir, pour condamner la tentative de coup d'État.

Le dernier coup d'État à grande échelle en 1980 a mené à des arrestations en masse, des tortures et des exécutions.

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Le Conseil militaire suprême de Turquie (YAS) se réunira sous la supervision d'Erdogan le 28 juillet. Erdogan a déclaré à Reuters dans une interview jeudi qu'il restructurerait les forces armées et apporterait du « sang neuf ».

Après le coup d'État, les pays occidentaux ont promis d'apporter leur soutien à la démocratie en Turquie, mais ont aussi exprimé leurs inquiétudes concernant l'ampleur des purges consécutives au coup d'État dans les institutions étatiques.

Le chef de l'État-major, Hulusi Akar, qui a été retenu en otage par les comploteurs dans la nuit du 15 juillet, a parlé dimanche de « lâches en uniforme » qui ont nui à la nation et à l'armée.

42 journalistes visés

Des chaînes de télévision turques ont annoncé ce lundi que des mandats d'arrêt ont été délivrés à l'encontre de 42 journalistes dans le cadre de la purge menée après le coup d'État.

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L'AFP rappelle que samedi, Erdogan avait prévenu dans un entretien à France 24 que si « les médias soutiennent le coup d'État, qu'il s'agisse de médias audiovisuels ou autres, ils en paieront le prix ».

Le 19 juillet, le régulateur turc des médias audiovisuels avait retiré leur licence à de nombreuses chaînes de télévision et de radio soupçonnées de soutenir le réseau du prédicateur Fethullah Gülen.


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