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VICE News

Une vague de violence inédite au Brésil suite à une grève de la police

Depuis que la police militaire d'un petit État côtier du Brésil s'est mise en grève, on assiste à des assassinats, des pillages, des vols en réunion et des vols de voitures.

Au Brésil, tout un État est plongé dans le chaos depuis vendredi dernier, notamment parce que la police militaire d'Espírito Santo, un petit État côtier au nord de Rio de Janeiro, s'est mise en grève pour revendiquer de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail.

Le gouvernement décompte au moins 87 morts depuis samedi dernier, ainsi que plus de 200 voitures volées, des centaines de magasins pillés et détruits. Et ce n'est pas encore fini, car le mouvement continue. La capitale de l'État, Vitoria, où vivent 2 millions d'habitants, est elle aussi touchée par ces violences.

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Sur les réseaux sociaux, les habitants font état de scènes de guerre civile : des meurtres en plein jour, des vols en réunion, des braquages, des pillages et des corps qui gisent dans les rues, faute de place à la morgue.

La situation est devenue si chaotique à Vitória que l'armée a été envoyée sur place pour assurer l'ordre public. Le ministère de la Défense brésilien a annoncé ce lundi le déploiement de 1 200 soldats des forces armées dans tout l'État du Espirito Santo, et ce jusqu'au 16 février. Mais le calme ne revient pas. Des tirs ont encore retenti et des supermarchés et magasins ont encore été pillés malgré le déploiement de l'armée.

La crise a commencé vendredi dernier, lorsqu'un groupe de proches et d'épouses de policiers a commencé à bloquer une caserne de la police militaire de l'État du Espírito Santo. Selon eux, les policiers militaires du Espírito Santo perçoivent « le pire salaire du Brésil » et n'ont pas eu d'augmentations depuis quatre ans, a indiqué le site brésilien G1. Dès samedi, le mouvement avait gagné toute la région métropolitaine de Vitória.

Dès le lendemain du début du mouvement, la tension a commencé à monter. Des joailleries ont été braquées dans le nord de la ville, puis huit corps sont arrivés à la morgue, selon le Syndicat des policiers civils du Espirito Santo. Dimanche, la situation était totalement hors de contrôle : des braquages massifs de magasins, des vols en réunion, de nouvelles tueries et de vols de voitures. Rien que pour la journée de dimanche, le bilan était de 17 morts et les hôpitaux étaient remplis de blessés par balle.

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Après une rencontre avec des conseillers municipaux de Vitória ce mardi soir, les responsables du mouvement ont décidé de continuer la grève. « Nous voulons une augmentation de 43 pour cent, qui correspond aux trois années où il n'y en a pas eu, en plus de l'amnistie des policiers, pour qu'ils ne subissent pas de représailles », a affirmé Thamires da Silva, manifestante et épouse d'un policier militaire, au journal local Gazeta.

Puisque les policiers militaires brésiliens n'ont pas le droit de grève et peuvent être emprisonnés pour infraction au code militaire, ils se rendent tous les matins dans leurs casernes et se préparent normalement — pour montrer qu'ils sont là pour travailler. Mais leurs familles et leurs proches les empêchent symboliquement de sortir des casernes afin de leur permettre de faire grève par un moyen détourné.

Des proches de policiers campent devant l'entrée d'une caserne de police pour permettre aux policiers de faire grève, à Vitoria, le 7 février 2017. (Photo de REUTERS/Paulo Whitaker)

La population se protège comme elle peut. Les banques, écoles, universités et de nombreux hôpitaux publics sont fermés depuis ce lundi, selon la BBC. Les transports publics n'ont circulé que pendant quelques heures ce mardi. Selon le journal local, Gazeta, le syndicat des transports a annoncé qu'aucun bus ne circulerait ce mercredi dans la région de Vitória, dans le but d'assurer la sécurité des employés.

Rafael Ferreira, un habitant du quartier Jardim Camburi de Vitória nous a décrit la situation sur place ce lundi soir, lors d'un entretien téléphonique. « C'est extrêmement dur, il y a eu plusieurs meurtres, vols en réunion et braquages dans le quartier. Lundi, une personne s'est fait voler sa voiture à main armée à quelques mètres de moi », témoigne cet ingénieur environnemental de 32 ans. « C'est le chaos total, on s'est réfugiés chez nous. Voyons si la situation s'améliore avec l'arrivée de l'armée. »

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Selon l'ingénieur, la plupart des commerces sont fermés, à l'exception de très rares supermarchés, boulangeries et pharmacies. Ceux-ci respectent des horaires très courts.

Si les criminels ont profité de la situation pour semer le chaos, des civils — organisés en milices — ont également contribué à la violence. Selon VICE Brésil, ces milices de facto, lourdement armées, ont gagné des quartiers des villes de Vitória et de Serra ce lundi, pour tuer des criminels. Dans le quartier du Jardim da Penha, à Vitória, ces milices ont été surprises en train de passer à tabac des jeunes. Des riverains les encourageaient aux cris de « Tuez-les ! Tuez-les ! ».

Ce mercredi, la police civile a décidé de rejoindre le mouvement de leurs collègues militaires, a déclaré Antônio Fialho Garcia Júnior, le président de l'Association des Enquêteurs de la police civile du Espírito Santo (Assinpol), selon la Gazeta. Il a annoncé que toutes les enquêtes seraient suspendues et que seulement les flagrants-délits seraient traités.

Cette annonce de la police civile vise à dénoncer les conditions de travail difficiles des policiers civils — d'autant plus depuis le début de la grève de leurs collègues. Cette grève est aussi motivée par le décès de Mário Marcelo de Albuquerque, un enquêteur de la police civile de Vitória. Ce mardi soir, il a tenté d'empêcher un vol de moto et a été blessé par balle au ventre. Il a succombé à ses blessures.

Le Ministère public du Espírito Santo a ordonné que la police militaire soit à nouveaux dans les rues, même s'il faut déployer la force pour dégager les manifestants. Ce mercredi, le gouverneur par intérim de l'État du Espírito Santo, César Colnago, a refusé d'accorder aux policiers militaires l'augmentation salariale souhaitée par le mouvement, selon le journal local Tribuna.

Suivez Henrique Valadares sur Twitter : @HenriqValadares