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Le catch français tente de ressusciter

Grand pays de catch jusqu'aux années 1970, la France a peu à peu délaissé la discipline. Aujourd'hui moribonde, elle tente de regagner ses lettres de noblesse, malgré les luttes intestines et les inimitiés qui minent la profession.

Strass, paillettes, musiques assourdissantes, punchlines détonantes et costumes scintillants, le catch actuel a revêtu depuis bien longtemps les atours du show à l'américaine. Pour l'immense majorité des fans de la discipline, le catch se pratique avec l'accent yankee, sous la houlette de la WWE, plus grande fédération au monde, et de son boss incontesté, Vince McMahon, milliardaire en dollars et ami de Donald Trump avec qui il s'est même battu en 2007. Pour les dernières générations de fans français, le catch est un sport-spectacle 100% made in USA, qui a réussi à séduire un public mondialisé. 650 millions de foyers touchés dans le monde, qui font de la WWE une machine à cash florissante : 729 millions de dollars de chiffre d'affaires en 2016. Un business juteux – créé autour de la passion que suscitent les stars des rings comme Triple H, The Undertaker ou les Hardy Boyz – qui fait oublier au grand public que la France était pourtant l'un des plus grands pays du catch mondial quelques décennies auparavant seulement, en tout cas le plus actif sur le Vieux Continent.

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Ils s'appelaient « L'Ange Blanc », « Le Bourreau de Béthune », « Chéri Bibi » ou « Le Boucher de Budapest » et faisaient les gros titres dans les années 1950 et 1960. Ils remplissaient des salles entières, mais aussi les cases des programmes TV de l'ORTF, assistés de Roger Couderc au micro. Bref, les catcheurs français de l'époque étaient des stars du sport et du divertissement, connus du grand public et plutôt bien payés. Certains d'entre eux sont même devenus des stars du cinéma, comme Lino Ventura. Mais cette période enchantée est bel et bien révolue pour leurs héritiers. Auteur du livre Catch - L'âge d'or 1920-1975, Christian-Louis Eclimont, que VICE Sports avait déjà interviewé, trouve des raisons culturelles à ce déclin en associant l'essor du catch en France à un « culte du mâle super costaud » qui s'est délité après Mai 68.

Jusqu'aux années 1970, le catch passait à la télé jusqu'à deux fois par semaine. C'est là qu'il s'est ancré dans la culture populaire, et qu'il a acquis ce statut hybride, à la frontière entre le sport et l'art, faisant des catcheurs des sortes « d'athlètes artistiques ». Un esprit bien résumé par Christian-Louis Eclimont : « On se souciait peu de savoir s'il s'agissait d'un sport avec des règles précises. Roger Delaporte avait eu un mot assez formidable : il appelait le catch "l'ignoble art". C'était un cirque certes, mais un cirque où les athlètes font le boulot. » Aujourd'hui malheureusement, le cirque ne fait plus recette en France. Sur les deux cents promoteurs en activité actuellement dans le pays, seule une dizaine gagne un peu d'argent. Côté catcheurs, même les meilleurs, qui voyagent dans toute l'Europe pour leurs combats, doivent concilier leur carrière avec un autre job pour vivre et courent le cachet en cumulant les galas plus ou moins reluisants.

Le catch a donc commencé à décliner dans les années 1970/80, victime d'une révolution culturelle certes, mais pas seulement. Car le petit monde des catcheurs français est aussi victime de son statut si particulier, et des tensions internes qui pourrissent la profession. Pour mieux comprendre la grandeur et la décadence de la discipline en France, il faut donc rencontrer les anciens du milieu, des vieux de la vieille qui ont connu aussi bien le faste passé que la ruine actuelle. Marc Mercier fait partie de ces vieux loups de mer biberonnés à la glorieuse époque du catch français. À 59 ans, il a derrière lui un solide palmarès : champion de France, d'Europe et du monde dans les années 1980, il était l'une des stars de l'écurie de Roger Delaporte, ancien catcheur devenu promoteur et propriétaire de l'Élysée Montmartre. Sa carrière bascule un soir de mars 1989 à Kiev, où une blessure l'éloigne un long moment des rings. Avec sa gouaille aiguisée, il se reconvertit dans le cinéma, entre petits rôles dans des séries françaises comme Cordier, juge et flic et statut de doublure de Depardieu dans Astérix et Obélix contre César. Un CV éclectique, qui en dit long sur le statut si particulier des catcheurs, à la fois hommes de spectacle et sportifs.

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