Ce que c’est de jouer son avenir au camp d’entraînement des Alouettes
Jean-Gabriel Poulin (Photo : Dominick Gravel)

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LA CULTURE DU FOOTBALL

Ce que c’est de jouer son avenir au camp d’entraînement des Alouettes

Trois joueurs recrues nous racontent comment ils gèrent le stress de devoir faire sa marque en quelques semaines.

Les Alouettes de Montréal ont invité VICE à passer la saison 2018 au sein de l’équipe. Notre dossier spécial sur la culture du football est disponible ici .

Le soleil brille sur le terrain de gazon synthétique à l’extérieur du Stade olympique, où 90 joueurs, trempés de sueur, participent au camp d'entraînement annuel des Alouettes de Montréal en préparation de la saison 2018 de la Ligue canadienne de football (LCF).

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Alors qu'un signal sonore retentit pour annoncer un changement d'activité au cours de la matinée, un groupe de joueurs exécute des jeux fixes sur un coin de terrain. Deux botteurs s’isolent de l’autre côté. Quelques plaisanteries fusent, certains joueurs chuchotent entre eux, mais dès qu’un coach donne des directives, c’est le silence total et la tension se fait sentir. Les joueurs se concentrent, ils savent parfaitement ce qui est en jeu. Ce n’est pas un entraînement comme un autre.

« Gardez vos genoux pliés! Gardez vos genoux pliés! Il n’y a pas de temps à perdre! » aboie un entraîneur.

Effectivement, les joueurs ne peuvent pas se permettre de prendre leur temps. Ils n’ont que trois semaines pour se faire une place dans l'alignement de départ du 16 juin, date à laquelle les Alouettes joueront leur premier match de la saison régulière, contre les Lions de la Colombie-Britannique.

Entrer dans la formation officielle d’une équipe professionnelle représente un défi de taille, surtout quand les joueurs au camp d’entraînement rivalisent pour prendre une des 44 places de la liste des joueurs actifs. Les autres seront soit relégués à l’équipe de pratique, soit renvoyés chez eux, retour à la case départ. Le sport professionnel ne laisse pas beaucoup de place à la tendresse.

Les vétérans de la LCF doivent aussi faire leurs preuves, quelle que soit leur ancienneté, mais la tâche est rendue encore plus redoutable pour les nouveaux venus, pour la plupart fraîchement sortis de l'université. Ils ont seulement 21 jours pour montrer leurs talents et pour se démarquer, afin d’obtenir une place dans l’équipe.

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VICE a parlé à trois joueurs recrues des Alouettes de Montréal, tous issus de différents milieux. On parle avec eux de la gestion du stress dans un métier aussi difficile et cruel.

Ces entrevues ont été légèrement abrégées par souci de clarté et de concision.

Garett Fugate, quart-arrière, 24 ans

Garett Fugate (Photo : Dominick Gravel)

Originaire du Kansas, Fugate a joué au football universitaire à Central Missouri. Lors de sa dernière saison en 2015, il a subi une déchirure au ligament croisé antérieur du genou et a dû subir une chirurgie, qui l’a écarté du jeu pendant 17 mois. Il a signé un contrat avec les Alouettes en janvier.

VICE : Comment as-tu vécu ta blessure au genou?
Garett Fugate : Je me suis blessé et ce jour-là, on a perdu le match. C'est ça qui a été le pire pour moi, on gagnait avant que je me blesse. Je suis vraiment un gars qui place son équipe en priorité, donc c’est ça qui m’a fait le plus mal, de ne pas pouvoir aider mon équipe. C’était difficile et j’ai eu besoin du soutien de mon entourage. Je suis chanceux d’avoir une famille, des amis et une copine qui sont tous merveilleux. Ils m’ont beaucoup aidé et encouragé.

Je me suis entraîné avec les Alouettes en novembre 2017 et on s’est parlé pendant un certain temps avant que je signe, donc je savais que c’était une possibilité [de jouer dans la LCF]. Une fois que j’ai signé une entente avec les Alouettes, je me suis dit : « Ça y est, je peux respirer maintenant. »

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Après ton opération, tu as emménagé chez tes parents. Ça ne devait pas être évident .
Mes parents étaient plutôt contents de me voir quitter la maison! Mon père travaille à la maison et ma mère ne travaille pas, donc on a dû passer beaucoup de temps ensemble pendant 17 mois. Ils n’étaient pas tristes de me voir partir, mais ils étaient surtout très heureux pour moi. Ils seront là pour un match préparatoire et je suis impatient de les accueillir et de leur faire visiter la ville.

Tu te joins à une équipe de football à Montréal, c’est loin du Kansas, ta ville natale. Que pensais-tu de Montréal lorsque tu es arrivé?
Je viens du Kansas, au centre des États-Unis. Lorsque j’ai annoncé aux gens que j’allais jouer à Montréal, ils m’ont tous dit : « Tu vas adorer la culture, la bouffe, la vie nocturne! » Et jusqu’à maintenant, ils ont totalement raison! Je n’étais jamais venu au Canada auparavant. Je ne connais pas encore bien la culture québécoise, tout est nouveau, mais c’est très cool.

C'est ton premier camp d' entraînement . Tu es entouré de joueurs qui ont plus d'expérience que toi. Tu as trois semaines pour prouver que tu mérites une place lorsque les Alouettes amorceront la saison régulière. Comment vis-tu avec cette pression?
Je me dis que je dois avoir confiance en ce que je fais. À cause de ma blessure, je n’ai pas joué [pendant longtemps]. J’ai travaillé fort tout au long de ma carrière pour être là où je suis aujourd’hui. Je ne suis pas en compétition avec les autres gars, je les soutiens, je veux qu’ils réussissent. Ma mentalité c’est : « Si je deviens le meilleur joueur que je peux être, je serai capable d’aider au mieux cette équipe. »

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Bo Banner, joueur de ligne défensive, 22 ans

Bo Banner (Photo : Dominick Gravel)

Banner a été repêché par les Alouettes en troisième ronde au repêchage de la LCF cette année. Originaire de la Colombie-Britannique, il a déménagé à Washington aux États-Unis avec sa famille lorsqu’il avait huit ans. Il a représenté l’Université Central Washington pendant quatre saisons.

VICE : Décris-nous la journée de repêchage de la LCF.
Bo Banner : J’étais chez moi avec toute ma famille et mes amis. C’était probablement un des moments les plus heureux de ma vie. Entendre ton nom, recevoir l’appel qui dit que tu es repêché… c’est dans ces moments-là que tu comprends que tes efforts ont porté leurs fruits. Je suis tellement excité.

Qu’est-ce qui t’excite le plus?
J’ai hâte aux contacts avec les joueurs de l’équipe adverse. En théorie, tu veux prendre soin de tes camarades et tu veux qu’ils soient tous en bonne santé, mais le jour de match, là, tu peux vraiment foncer dans le tas!

Quelles sont tes premières impressions de Montréal?
Lorsque je suis arrivé, je n’avais qu’une envie : aller explorer la ville. J’essaie encore de trouver mes repères et je n’ai pas vraiment eu la chance de découvrir la ville à cause du camp d’entraînement, mais je sens déjà que ça va être vraiment le fun d’être ici.

C'est ton premier camp d' entraînement . Tu es entouré de joueurs qui ont plus d'expérience que toi. Tu as trois semaines pour prouver que tu mérites une place lorsque les Alouettes amorceront la saison régulière. Comment vis-tu avec cette pression?
J’espère juste faire de mon mieux. Ce qui doit arriver arrivera. Je ne veux pas penser à la possibilité de ne pas être sélectionné, parce que ce que je crois que la mentalité qu’on adopte se reflète dans l’univers et que l’univers t’envoie des choses positives si tu as une façon de penser positive. On n’a pas beaucoup de temps sur la planète, la vie est courte. Il faut toujours persévérer.

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Jean-Gabriel Poulin, secondeur, 23 ans

Jean-Gabriel Poulin (Photo : Dominick Gravel)

Poulin, natif de Saint-Nicolas, proche de Québec, a été un choix de troisième ronde des Alouettes au repêchage 2018 de la LCF. Il a gagné la Coupe Vanier avec les Mustangs de l’Université Western en Ontario en 2017 et a joué au football collégial au Cégep Vanier.

VICE : Décris-nous la journée de repêchage de la LCF.
Jean-Gabriel Poulin : C’était mon rêve depuis que je suis tout petit. C’est vraiment la plus longue journée de ta vie. J’étais avec ma copine et ma famille à Québec, j’essayais de me changer les idées, et quand on a entendu les Alouettes annoncer mon nom au troisième rang… Tu ne sais jamais dans quelle équipe tu t’en vas, ou quand ton nom va sortir, donc j’étais extrêmement content. [Le petit gars en moi] sautait partout!

C'est ton premier camp d' entraînement . Tu es entouré de joueurs qui ont plus d'expérience que toi. Tu as trois semaines pour prouver que tu mérites une place lorsque les Alouettes amorceron t la saison régulière. Comment vis-tu avec cette pression?
Je pense qu’il faut le prendre minute par minute. Tu ne peux pas commencer à penser trop à l’avenir et te dire : « Oh, il reste six entraînements, il faut que je performe. » Il faut prendre ça un jeu à la fois, et t’assurer que tu donnes 100 % pour chaque match que tu joues, chaque entraînement, chaque réunion… Ça aide à rester dans le moment et à ne pas trop stresser. Ça aide aussi à garder les pieds sur terre et à placer ton attention sur la seule chose que tu peux contrôler : l’instant présent.

Le positivisme de Jean-Gabriel Poulin a été payant. À la fin du camp d'entraînement, il a été retenu sur la liste active des joueurs en compagnie de Bo Banner, qui va enfin avoir le temps de découvrir la ville. Garrett Fugate, lui, démarrera la saison sur l'équipe de pratique.

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Safia Ahmad est sur Twitter .