Apprendre à boire le saké comme un vrai

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Apprendre à boire le saké comme un vrai

Les conseils d'une sommelière pour éviter de s'emmêler les pinceaux au moment de choisir entre un « junmai » et un « daiginjo ».

Les habitants de Los Angeles ont toujours été portés la bouffe japonaise. La scène culinaire locale est saturée d’un large choix de restaurants nippons. Pourtant, quand le chef Charles Namba et la sommelière Courtney Kaplan ont débarqué de la côte est, ils se sont dit qu’il manquait un petit quelque chose.

« Lorsqu’on est arrivé à Los Angeles en provenance de New York, on a découvert une communauté bien installée, raconte Kaplan. La ville disposait d’une offre riche en nourriture japonaise mais manquait [l'équivalent japonais du bar à vin, N.D.L.R]. »

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« On pouvait trouver de bons sushis et d’excellents ramen dans différents coins de la ville, poursuit-elle, mais les izakayas, c’est différent. Souvent, les établissements sont assez loin – à Torrance ou à Gardena. Parfois, on en trouve dans Little Tokyo mais ils ne reflètent pas vraiment ce qui se passe dans le Japon d’aujourd’hui. »

Tsubaki, izakaya dans le quartier d'Echo Park. Toutes les photos sont de l'auteur.

Courtney Kaplan sert un Kimura Shiki en biodynamie, ou Saké Miracle, qui va bien avec du foie gras.

Le couple a décidé d’ouvrir Tsubaki, un izakaya moderne dans le quartier d’Echo Park, avec un menu composé de plats de bistrot japonais. Un menu qui change au fil des saisons et propose aussi une sélection particulièrement fournie de différents sakés issus de petits producteurs.

« J’avais le sentiment que les nombreux sakés proposés par les autres restaurants n’étaient pas super originaux. On retrouvait toujours les 5 ou 6 mêmes grosses marques. Ce sont de bonnes maisons, la question n’est pas là, mais personne ne faisait découvrir les petits producteurs », explique Kaplan.

Si le niveau de polissage du riz est un facteur fondamental pour déterminer le goût, il n’est pas nécessairement indicateur de qualité.

« On a voulu mettre en valeur quelques-uns des sakés régionaux ou saisonniers qui nous semblaient les plus intéressants et auxquels les clients de L.A. n’avaient encore jamais eu accès », ajoute-t-elle.

Pour un dîner normal, avoir 25 choix possibles de sakés artisanaux peut paraître excessif. Si vous avez passé votre adolescence de banlieusard à siffler des shots, commander un saké sans passer pour un jeune cadre dynamique qui se la pète paraît impossible.

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« Je crois que le polissage influence le goût de multiples façons. Apprendre des mots comme junmai, ginjo ou encore daiginjo peut s’avérer très utile au moment du choix », raconte Kaplan en évoquant les termes utilisés pour définir le niveau de polissage des grains de riz.

« L’extérieur du grain est principalement composé de graisses et de protéines – et à l’intérieur, c’est surtout de l’amidon », détaillait-elle. « Plus la proportion d’amidon est élevée, plus le goût sera pur et plus votre saké sera parfumé, floral et fruité. »

Les junmai sont les moins polis, les ginjo proposent un polissage de moyenne gamme, et les daiginjo sont les plus polis. Il existe tout un tas d’autres détails auxquels un œil averti peut prêter attention, mais connaître ces termes basiques pourra déjà vous permettre de cibler un saké qui se mariera bien avec votre repas.

« Les junmai sont plus rustiques, plus umami, plus riches. Les ginjo sont un peu plus polis, donc plus raffinés et plus parfumés. Enfin, les daiginjo seront plus fruités, vraiment purs et nets. »

Si ce niveau de polissage est le facteur fondamental pour déterminer le goût, il n’est pas nécessairement indicateur de qualité. Les gens pensent souvent que les daiginjo sont les meilleurs parce qu’ils sont un peu plus chers que les autres, mais ils ont souvent tort.

« Ils sont vraiment chers parce qu’à la base, on se retrouve avec un volume de riz inférieur de moitié. Et on imagine souvent que le daiginjo est le grand cru de monde du saké », explique Kaplan.

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« Certains sont de très bonne qualité, et parfois très chers, mais ce n’est pas une référence. On peut trouver des sakés absolument merveilleux qui sont à peine polis, et qui sont vraiment parfaits dans les circonstances appropriées. »

Les sashimi se marient très bien avec les saveurs aromatiques et florales d'un saké daiginjo.

Un daiginjo peut se révéler absolument magique avec un sashimi, mais il ne se mariera pas forcément bien avec un repas d’izakaya.

« La nourriture qu’on trouve dans un izakaya est généralement un peu plus copieuse. Il n’y a pas de sushi mais plutôt tout un tas de trucs qui viennent du barbecue japonais ou qui sont frits. C’est plus rustique », décrit Kaplan. « Je pense que ce genre de nourriture se marie bien avec certains types de sakés qui sont moins représentés. »

« Certaines personnes pensent qu’il faut uniquement boire le saké chaud, mais c’est faux. D’autres, qui s’y connaissent un peu, pensent au contraire qu’il ne faut jamais le boire chaud. Encore faux. »

La température du saké est un autre facteur qui peut dérouter les novices. « Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise température », assure Kaplan. « Certaines personnes pensent qu’il faut uniquement boire le saké chaud, mais c’est faux. D’autres, qui s’y connaissent un peu, pensent au contraire qu’il ne faut jamais le boire chaud. Encore faux. »

Le mieux, c’est de regarder l’étiquette noire de la bouteille de saké pour voir ce qu’elle recommande. Chaque bouteille vous dira ce qu’il en est pour elle.

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Le saké junmai peut se déguster avec un bon saucisson.

« Nous en servons certains froids, d’autres à température ambiante, et d’autres un peu chauds », poursuit-elle. « J’essaie aussi d’adapter les températures en fonction de la nourriture. »

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Si vous n’êtes pas sûr de vous quant au choix du saké ou à la température, demandez au serveur. La dernière chose à faire dans un izakaya, c’est de merder sur votre commande. Parce qu’une bonne combinaison entre la nourriture et la boisson, c’est un petit bout de paradis assuré.

« Dans un izakaya, l’objectif c’est généralement de boire. Mais on se soucie aussi beaucoup de l’association entre aliment et boisson », conclut Kaplan.


Cet article a été préalablement publié sur MUNCHIES US