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Les rapaces déclenchent volontairement des incendies

Certains rapaces pyromanes particulièrement vicieux n'hésitent pas à mettre le feu à la brousse pour attraper plus facilement leurs proies. Vous allez faire quoi ?

« Les oiseaux sont des cons », disait Pierre Desproges, qui lui-même citait le dessinateur Chaval, dont le réquisitoire ornithophobe était somme toute assez convaincant. Mais peut-être avaient-il tort ; ou, tout au moins, peut-être ont-ils omis de préciser que les oiseaux sont des sales cons. De beaux enfoirés, en somme. Mais plus malins qu'on ne le pense.

C'est ce que semblent indiquer des observations réalisées en Australie, qui suggèrent que certains rapaces propagent volontairement des incendies afin de faire sortir leurs proies de leurs tanières, sans se soucier le moins du monde des pompiers qui risquent leur vie en combattant les feux qui ravagent le bush. Parfois, on se dit que la nature ne mérite pas que nous roulions en voitures hybrides.

Le stratagème employé par les oiseaux de proie – essentiellement des milans noirs et des faucons bérigora - est aussi simple que machiavélique : lorsqu'un petit feu de brousse se déclare, les rapaces se saisissent de brindilles et de bâtons enflammés qu'ils transportent ensuite dans leur bec ou entre leurs serres avant de les lâcher au milieu de l'herbe sèche, qui prend donc feu à son tour et étend rapidement l'incendie. Les lézards, grenouilles et autres insectes sortent alors de leurs cachettes pour fuir les flammes, et les oiseaux, qui les attendent à des points stratégiques, n'ont plus qu'à les cueillir. D'après les témoignages, les oiseaux transportent parfois les morceaux de bois enflammés jusqu'à 500 mètres de leur emplacement initial sans qu'ils s'éteignent. Quant à l'incendie, c'est le problème des animaux qui ne peuvent pas voler. Genre, les humains.

Jusqu'ici, personne n'a photographié ou filmé les oiseaux en train de se livrer à cette pratique honteuse, mais les récits des aborigènes en font mention depuis la nuit des temps. À l'heure actuelle, un avocat australien, Bob Gosford, et un chercheur américain de l'université de Pennsylvanie, Mark Bonda, travaillent sur le sujet, essentiellement en recueillant des témoignages d'aborigènes, de pompiers et de rangers et en consignant leurs propres observations. « Les petits incendies attirent souvent de nombreux oiseaux, à tel point qu'il n'y a pas assez de proies pour tous. Certains peuvent donc être tentés de déclencher de nouveaux incendies pour faire face à une compétition moins féroce », explique Gosford à IFL Science.

Steve Debus, ornithologue et expert en oiseaux de proie à l'université de la Nouvelle-Angleterre, se veut plus mesuré, puisqu'il estime dans leTimes qu'il est difficile de déterminer si les oiseaux ramassent accidentellement des brindilles enflammées en tentant de saisir des proies ou s'il s'agit d'une démarche volontaire. « Je pense toutefois que les milans noirs et les faucons bérigora sont assez intelligents pour déclencher volontairement des incendies en larguant des braises sur de l'herbe sèche ; nous avons déjà vu ces oiseaux ramasser des miettes et les déposer au bord de petites mares pour attirer des poissons », ajoute-t-il.

Autrement dit, les oiseaux ne sont peut-être pas vraiment des cons. En revanche, ce sont sans doute des pyromanes. Et l'omertà a assez duré.