FYI.

This story is over 5 years old.

Musique

On a interviewé Greg Prato, le mec qui a écrit un bouquin sur les Meat Puppets

Le premier manifeste littéraire en faveur du groupe le plus défoncé des années 1980

À chaque fois que je fais un tour au libraire du coin pendant ma pause déjeuner, je me retrouve toujours à faire la gueule en voyant la quantité de merdes qui jonchent les rayonnages. Bordel, qui a encore besoin d'un nouveau bouquin sur les Beatles, Motley Crüe ou « le Floyd » ?

Dans mon esprit il y a toujours eu un groupe qui méritait qu'on mette son histoire sur un bout de papier. Je veux bien entendu parler de ces tarés gobeurs d'acides connus sous le nom de Meat Puppets. On dirait bien que l'auteur – Greg Prato – avait entendu mes plaintes psychédéliques lors de la rédaction de l'objet, parce qu'il a réussi à insérer toute l'histoire tordue du groupe dans son nouveau livre : Too High To Die : Meet The Meat Puppets. Non seulement Prato a réussi à rassembler chaque élément de la carrière du groupe, mais a aussi travaillé avec tous les mecs de SST records – ces génies musicaux qui ont repoussé les limites du punk bien au delà du cuir crasseux et de la crête colorée débile.

Publicité

Pour être honnête – et aussi, un peu partial – le livre de Prato m'a mis sur le cul. J'étais tellement impressionné par l'ouvrage que j'ai décidé de traquer son auteur. Je ne l'ai retrouvé que pour lui gueuler des questions ignobles alors que lui me répondait en se marrant. Ce mec est un dieu.

VICE : Comment as-tu connu les Meat Puppets ?

Greg Prato : Lorsque je fréquentais les bancs de l'université durant l'automne '91, mon colloc' avait ramené d'anciens numéros de Guitar Player des années 1980 – l'un d'entre eux parlait de Curt Kirkwood, le guitariste et frontman du groupe. Son interview était complètement différente de toutes celles des guitaristes d'époque et l'intro laissait entendre qu'ils étaient fous. Je fréquentais un disquaire à l'époque et ils avaient le dernier Meat Puppets – Forbidden Places. Je l'ai acheté et il m'a tué. J'ai passé toute l'année 1992 à la quête de chaque album que le groupe avait sorti.

Tu as écouté tout le catalogue du groupe en commençant par Forbidden Places ; tu n'as pas été surpris par la simplicité de leur musique au début ? Comment as-tu réagi en écoutant leurs premiers maxis ou leur premier LP ?

Ça ne m'a pas tant surpris que ça, en fait. Le deuxième album des Puppets que j'ai acheté après Forbiden Places a été Meat Puppets II, qui est plus « raw » et plus « punk-rock » que ce qu'ils ont fait par la suite. Donc ça a préparé le terrain avant que je tombe sur In a Car et Meat Puppets I. En réécoutant tout ça aujourd'hui, c'est assez extraordinaire de retracer les progrès du groupe ; de leur premier album à ce qu'ils sont devenus aujourd'hui – ou même comparer Meat Puppets I à Mirage, qui est bourré de synthés et de boîtes à rythme.

Publicité

Tu remarques très justement dans l'introduction de ton livre que les Meat Puppets ont été laissés de côté dans l'histoire de la musique alternative des années 1980. Comment tu peux l'expliquer ?

Aucune idée. Mais c'est ce qui m'a donné l'envie d'écrire ce livre – outre le fait que je sois fan du groupe depuis des années. J'ai toujours recherché un bouquin qui retraçait leur histoire, mais je n'ai jamais réussi à mettre la main dessus. Du coup, je me suis lancé. Le fait que personne n'ait rien écrit sur eux me laissait vachement perplexe, surtout que les frères Kirkwood ont toujours sorti un tas de conneries dans leurs interviews ou ont toujours eu des anecdotes de concerts hyper drôles à raconter.

Ouais. Mais à quel moment tu t'es dit « Bon putain, je le fais ce livre ! »

La première personne que j'ai contactée, c'était le manager du groupe – Dennis Pelowski – histoire d'avoir l'accord des mecs. Quand j'ai reçu son feu vert, j'ai interviewé Curt en premier. Je l'ai interviewé pas mal de fois pour le livre. Dennis et tout le groupe m'ont beaucoup aidé à trouver d'autres mecs à interviewer – c'est d'ailleurs comme ça que j'ai pu interviewer des légendes comme Flea, Peter Buck, Scott Asheton and Dean DeLeo pour ne citer qu'eux.

Tu as bien réussi à montrer l'influence qu'ont eu les « MPs » sur tous les groupes punk qui ont émergé au début des années 1980. Tu as été surpris de voir l'étendue de leur influence sur des mecs comme Ian MacKaye ou Duff ?

Publicité

La plupart des gens à qui j'ai parlé étaient des fans inconditionnels du groupe. Ils les avaient connus via de vieux articles (comme Henry Rollins, Kim Thayil, Mike Watt, etc. ). Mais celui qui m'a le plus étonné, ça a été Scott Asheton des Stooges. Je ne savais pas qu'il était un gros fan, ou même, qu'il connaissait le groupe. Je n'étais pas au courant que Peter Buck de REM était fan non plus, d'ailleurs.

Je pense que ce qui rend les Meat Puppets si spéciaux – comme la plupart des premiers groupes signés sur SST – c'est que ce n'est pas forcément le punk-rock qui les a amenés à faire de la musique, mais plutôt l'ethos punk qui leur a servi pour créer leur musique telle qu'ils l'entendaient.

C'est pour ça que Meat Puppets est l'un de mes groupes préférés, ils n'ont jamais eu peur de récupérer n'importe quel genre musical pour se l'approprier. Le truc vraiment cool avec les labels indépendants des années 1980, c'est qu'ils laissaient leurs groupes faire ce qu'ils voulaient – comme, dans le cas des Puppets, sortir deux albums consécutifs la même année (Mirage et Huevos, en 1987).

Je déteste l'uchronie, mais à quoi penses-tu que la carrière des Meat Puppets aurait ressemblé s'ils n'avaient jamais pu entrer chez SST et si au lieu de ça, ils avaient conservé la ligne arty qu'ils tenaient à l'époque de la Los Angeles Free Music Society and Monitor ? Tu penses que ça aurait été plus facile de jouer devant ce genre de mecs plutôt que devant une horde de punks stupides ?

Publicité

C'est difficile à dire, mais je pense que ça aurait été assez proche de ce qu'ils ont fait durant toute leur carrière – à savoir, n'en avoir rien à branler et faire ce qu'ils voulaient. Aussi, je ne pense pas que tous les concerts du groupe aient été remplis de crêteux débiles. Si on regarde les vidéos de leurs concerts sur YouTube lorsqu'ils étaient en première partie de Black Flag en '84, le public ne leur est absolument pas hostile et semble même apprécier leur musique chelou.

Combien de temps a pris l'écriture du livre ? Il y a d'autres mecs à qui tu aurais aimé parler et que tu as loupés ?

Je dirais un an et demi, des premières interviews jusqu'à la sortie du livre. En ce qui concerne la seconde question, j'aurais aimé parler au producteur des premiers albums du groupe, Spot. Je l'ai contacté mais je n'ai jamais reçu aucun retour de sa part.

Le groupe semble d'ailleurs très impliqué dans la sortie du livre. On peut acheter des lots sur leur site qui comprennent le bouquin, un T-shirt, etc. Ça fait quoi de collaborer sur un projet aussi étroitement avec des mecs que tu admires depuis si longtemps ?

Le groupe m'a énormément aidé pendant l'écriture du livre. Je pense que c'est en partie dû au fait que Curt Kirkwood me faisait confiance et savait ce que je faisais ; avant de commencer la rédaction du truc, je l'avais interviewé pour des magazines et des webzines et il savait de quoi je parlais. Donc oui, c'est toujours bien de découvrir que le groupe que vous admirez depuis toutes ces années est composé d'authentiques gentlemen.

Quand on passe en revue tous les livres que tu as écrit, on remarque que tes sujets sortent toujours des sentiers battus – celui sur Tom Bolin, notamment. Mettre en lumière ce genre de mecs est une démarche consciente chez toi ou alors tu es comme moi, à savoir un mec qui ne s’intéresse qu'aux musiciens dont les gens n'ont rien à foutre ?

La raison qui m'a poussé à rédiger ces livres est assez simple : en tant que fan, j'ai toujours eu envie de lire des ouvrages qui parlaient de mes groupes préférés et je n'en ai jamais trouvé… Du coup, j'ai décidé de régler le problème tout seul ! Par rapport au fait d'aimer des groupes qui ne sont pas populaires, ça fait longtemps que je sais que j'aime la bonne musique. J'aime d'ailleurs tous les types de bonne musique, des Bee Gees aux Bad Brains ! La diversité de style dans la musique des Meat Puppets m'a montré qu'il ne faut pas discriminer les différents genres de musique. Y'a de la merde partout et des bons trucs coincés dans chaque recoin de merde.

Si vous êtes fan des Meat Puppets – ou simplement que vous avez un semblant de bon goût en musique – vous pouvez vous choper le livre ici