
Filant à toute vitesse, les deux camions transportaient 17 prisonniers. Au niveau du checkpoint entre le Soudan et l'Égypte, Awet a relevé la couverture sous laquelle il était caché. Il a alors vu un officier égyptien en uniforme qui levait la main pour autoriser le passage au convoi des trafiquants. Les migrants présents dans les camions avaient été successivement kidnappés, enchaînés, battus et affamés pendant plusieurs jours. Et pourtant, le pire restait à venir.Le convoi de Awet a atteint l'est de la Basse-Égypte en pleine nuit. Toujours entravés par les chevilles, les prisonniers ont pataugé dans l'eau afin de rejoindre le bateau qui les attendait. L'eau était trop profonde pour une petite fille et sa mère était trop faible pour la porter. Alors, Awet l'a mise sur ses épaules.Après six heures de mer, ils ont atteint le Sinaï. Ils ont marché un demi-kilomètre dans l'eau avant de monter dans des camions. Ils ont ensuite été conduits dans une maison où ils ont été vendus à d'autres trafiquants. Awet et cinq autres, les yeux recouverts d'un bandeau, menottés et forcés d'écouter les cris de souffrance de leurs compagnons d’infortune, ont été emmenés dans une villa différente. Huit prisonniers se trouvaient déjà dans la cellule dans laquelle ils ont été placés.Son histoire n'est pas un cas isolé. Une étude menée par l'université de Tilbourg estime que plus de 25 000 personnes se sont fait enlever par des trafiquants au Soudan ou en Érythrée depuis 2010, avant d'être conduites dans le Sinaï et d'y être torturées dans le but d'extorquer une rançon à leurs proches dans le pays ou habitant à l'étranger. La plupart du temps, la torture est pratiquée quand les parents se trouvent au téléphone avec les ravisseurs. Cette technique permet à ces derniers de s'assurer d'un versement rapide de l'argent. Ce commerce est très lucratif ; selon l'étude, au cours de ces trois dernières années, les trafiquants auraient engrangé environ 450 millions d'euros.
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