Ecœurés par le PSG, des ultras s’éclatent en district

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Kopland

Ecœurés par le PSG, des ultras s’éclatent en district

Le groupe Cinquième colonne s’est réfugié à Saint-Germain-en-Laye , où le Saint-Germain FC joue en 4e division de district. La démarche peut faire sourire, mais le mouvement dure depuis quatre ans. Respect !

Coincé entre la caserne des sapeurs-pompiers et le collège des Hauts Grillets de Saint-Germain-en-Laye , le vétuste synthétique du stade de la Colline fleure bon le foot du dimanche et les frappes dévissées. Il est midi, le soleil éclaire la pointe de la colline qui fait office de seconde tribune pour ceux qui veulent s'allonger au calme avant le match. Par contre, en face, dans le coin droit de la seule vraie tribune, ça s'active. La vingtaine de membres de la « Cinquième Colonne » accroche déjà ses plus belles bâches tout en sifflant quelques bières, le tout avec beaucoup d'entrain, pour que tout soit prêt lorsque les joueurs du Saint-Germain FC feront leur entrée sur la pelouse. « Aujourd'hui, on joue la montée en troisième division », rappelle un des supporters présents. En près de cinq ans d'existence, la Cinquième Colonne compte 20 membres encartés et 30 sympathisants.

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La devise du groupe a beau être « Notre passion n'a pas de division », une montée ne se refuse pas. Ne serait-ce que pour entretenir la flamme. « On a souvent manqué la montée de peu, et derrière c'est dur de se motiver, ça met un coup au moral », avoue « Rabbit », sympathisant du groupe. D'autres, en tribune, fantasment même sur une trajectoire à la Strasbourg : « Ça part de là », plaisantent-ils.

Aux origines de cette aventure un peu dingue, un énorme ras-le-bol et une bonne grosse cuite. Un ras-le bol-du PSG, alors en pleine pacification par le biais du plan Leproux. « Fin 2012, on était quelques potes à organiser des contre-parcages au Parc des Princes. Ensuite on est passés à 10 puis 15 membres, et là on s'est dit qu'il y avait un bon délire à monter », raconte Thomas, leader et co-fondateur du kop avant d'enchaîner : « Mais très vite on a rencontré des problèmes avec les autorités et le club. Les interdictions de déplacement arbitraires, ça devient vite lourd. On nous a même empêché de soutenir les féminines à Charléty… Ça a été la goutte d'eau qui fait déborder le vase ! On s'est fait parquer comme des chiens pendant des heures devant des bistrots en plein Paname par 30 CRS. À partir de là c'était fini. T'as beau aimer ta meuf, si elle te crache dessus tous les jours au bout d'un moment, tu te casses ! »

C'est là que l'alcool fait effet sur Thomas et ses potes et les amène à s'exiler au St Germain FC : « On a vu qu'il y avait un club en 6 ème division de district, la plus basse possible, à Saint-Germain-en-Laye. On s'est dit Saint-Germain, Paris Saint-Germain… On va tester ! Bon, faut avouer qu'on était bien attaqués à ce moment-là… ». Seuls deux membres du groupe préfèrent alors rester au Parc des Princes.

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Très vite, la bande s'amourache du Saint-Germain FC. La proximité avec les joueurs et le club, leur fait même oublier leur premier amour. Pendant que le PSG version qatarie achète ses premières stars et plonge définitivement dans le foot business tant honni par les ultras, la Cinquième Colonne, elle, s'immerge avec plaisir dans le foot amateur. « Au début c'était dur, on était encore dans l'esprit contestataire… Mais les joueurs te donnent tellement en retour, que tu oublies vite. Aujourd'hui le PSG, je regarde vite fait les gros matches, mais je n'ai plus aucune envie d'aller au Parc ou de faire un déplacement », affirme Thomas.

Finis les week-ends à Marseille ou Saint-Etienne donc, désormais la Cinquième Colonne sillonne le district des Yvelines, dans la joie et la bonne humeur. Avec ses chants puissants, ses tifos créatifs et ses animations de toutes sortes, le groupe s'est taillé une belle renommée dans le département. A tel point que, désormais, certains joueurs rejoignent le Saint-Germain FC pour être à leur contact. A l'image d'Olivier Juhel, capitaine de l'équipe et ancien joueur des équipes de la section amateur du PSG : « Je me suis fait les croisés lorsque je jouais au PSG. A mon retour de blessure, je cherchais un club et on m'a parlé du Saint-Germain FC et de ses ultras, j'ai foncé direct ! C'était il y a trois ans. C'est hors du commun ! C'est une vraie chance pour nous de les avoir à nos côtés. Ils ont vraiment du courage. Et puis ça nous aide beaucoup sur le terrain. C'est pour ça qu'aujourd'hui on veut leur donner cette deuxième montée consécutive, ils la méritent ! »

Mais même dans les bas-fonds du football amateur, le mouvement ultra peine à s'exprimer. Ces derniers mois, des pressions seraient mises sur le groupe ultra et sur le club. Le stade de la colline étant situé dans un quartier très calme de Saint-Germain-en-Laye, les performances vocales et les craquages de fumigènes ne sont pas franchement appréciés par le voisinage. « C'est des malades. On joue quoi, 20 matches par saison ? Et ils viennent râler pour ça ? Le pire c'est que la mairie leur donne raison pour gratter quelques voix aux élections au lieu d'aider le club de leur ville à grandir ! Ils font payer des amendes au club quand on craque des fumis mais donnent des subventions au PSG ! », regrette Rabbit. La saison dernière, la police aurait reçu entre 300 et 400 appels de riverains en colère selon Thomas. Un chiffre que n'ont pu nous confirmer la mairie de Saint-Germain-en-Laye et le commissariat de la ville, même si les deux entités reconnaissent recevoir de nombreux appels les jours de matches.

17 heures. Coup de sifflet final. Le Saint-Germain FC l'emporte 4 buts à 2 contre Les Clayes et valide définitivement sa montée en 3 ème division. Pas de fumigène pour fêter ça aujourd'hui, de peur de s'attirer les foudres de la mairie. Mais nul doute que la Cinquième Colonne va finir par s'offrir un gros kiff pyrotechnique pour fêter la montée à l'échelon supérieur. Avant de débuter une nouvelle saison avec ce douzième homme qui détonne dans le football amateur.