Les enfants pourront bientôt recevoir des greffes fécales

Le microbiome humain est un système aussi complexe que raffiné. Des milliards de bactéries vivent à l'intérieur de nous, sur nous et autour de nous, et notre santé dépend largement de leur diversité et de leur répartition. Les scientifiques étudient actuellement les effets de la bactériothérapie fécale (qui consiste, littéralement, à injecter les excréments d'un individu dans le tube intestinal d'un autre) afin de modifier le microbiome du receveur dans un but thérapeutique. Les excréments sains sont remplis de bactéries qui peuvent être salvatrices chez un individu malade ; en outre, ce mode d'administration, quoique peu ragoûtant, s'avère particulièrement efficace.

La bactériothérapie fécale a déjà montré des résultats prometteurs dans le traitement des infections à C. difficile. Des essais cliniques sont actuellement en cours à Hamilton, en Ontario, afin de tester l'efficacité de cette technique pour soigner des enfants affectés par une maladie inflammatoire intestinale chronique, comme la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique, toutes deux extrêmement douloureuses. Il s'agira du premier essai randomisé contrôlé effectué sur des enfants, selon les chercheurs.

Les patients et leurs familles pourront arguer que, eh, ce n'est pas trop tôt. Il existe évidemment des traitements médicamenteux pour apaiser les symptômes des maladies inflammatoires intestinales chroniques, mais leurs effets ne sont pas durables. L'un des principaux instigateurs de l'étude, le Dr. Nikhil Pai de l'Université McMaster, m'a expliqué que de nombreux parents tentaient des bactériothérapies DIY à la maison sans consulter de professionnel de santé, désespérés devant la souffrance de leur enfant.

« Les parents pensent que tant qu'ils sont eux-mêmes donneurs, tout se passera bien, » explique-t-il. Or, greffer vos excréments chez quelqu'un autre peut-être assez dangereux (et salissant). Ne parlons même pas du traumatisme possible pour l'enfant qui n'a pas nécessairement envie d'être en contact avec le caca de papa dans un cadre domestique. « Ici, les matières fécales ont été soigneusement analysées pour prévenir tout risque de contamination, et proviennent de donneurs anonymes. De plus, la procédure est standardisée et a été autorisée par la FDA et l'Agence sanitaire canadienne, » ajoute-t-il.

Il y a de bonnes raisons d'être optimiste sur l'efficacité de ce traitement. Une étude de 2015, également menée au sein de l'Université McMaster, suggère que la bactériothérapie soulage durablement les symptômes des maladies inflammatoires intestinales chroniques chez le sujet adulte.

« Un patient affectée par la maladie de Crohn ou par une rectocolite hémorragique possède une signature bactérienne très différente de celle d'un sujet sain, » m'explique Pai. « La génétique joue certainement un rôle là-dedans, mais elle ne permet pas d'expliquer le tableau clinique de la maladie. Si vous prenez des vrais jumeaux, leur microbiome n'est similaire qu'à 25% seulement. »

Dans cette étude, Pai et son équipe recruteront 50 enfants âgés de 6 à 17 ans. Certains se verront administrer un placebo (une solution saline), et d'autres un échantillon de matière fécale, deux fois par semaine pendant six semaines.

Même s'il faudra encore réaliser de nombreux essais cliniques pour pouvoir confirmer que la bactériothérapie et bel et bien efficace et sans danger, les premières études montrent qu'elle est capable de changer la vie de nombreux patients. Peut-être qu'un jour, il sera possible de se passer d'échantillons de matière fécale, l'aspect le plus rebutant du traitement, et d'utiliser des sortes de « pilules à caca » que l'on peut avaler. Une équipe canadienne a déjà expérimenté ce système sous une version synthétique, et l'a baptisé

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dans un moment particulièrement inspiré. Le caca est décidément le traitement miracle du futur.