L’année dernière, Banksy faisait une nouvelle fois les gros titres avec son « parc d’attractions » Dismaland à Weston-super-Mare, dans le sud de l’Angleterre. Forcément, des tas de gens s’étaient précipités pour voir ce « festival artistique, d’attractions foraines et d’anarchisme de bas niveau » comme se décrivait le parc. La petite cité balnéaire se voyait envahie de hordes de touristes et bénéficiait de retombées économiques inespérées — 20 millions de livres a-t-on estimé.Ce qu’on a moins dit c’est que cette idée, que certains ont trouvé géniale, d’autres sinistre — Banksy a ensuite annoncé envoyer les matériaux du parc aux réfugiés de Calais —, a certainement trouvé son inspiration dans l’œuvre de Jeff Gillette. Ce peintre américain peint depuis 20 ans des paysages post-apocalyptiques, véritables décharges sans fin, où évoluent des personnages de Disney. Quinze de ses tristes compositions font l’objet d’une exposition, « Post Dismal », à la galerie Lawrence Alkin, à Londres, surfant sur le succès de Dismaland.« J’aimerais penser que j’ai été une source d’inspiration dans la satyre du royaume magique de Banksy », explique Gillette à The Creators Project, « mais je maintiens, j’en ai même fait part à Bansky dans un mail, que nous avons des “sensibilités similaires”. Dismaland lui-même présente de fortes ressemblances avec le vrai Disneyland : de longues files d’attente et des employés mécontents. On retrouve également l’exigence de Disneyland dans ses productions et présentations. »Dans la nouvelle série de peintures de Gillette, on peut voir un Mickey Mouse perché sur une habitation de tôle, dans une mare de détritus, regardant à l’horizon avec perplexité ; le château de Cendrillon entouré de tentes de réfugiés ; ou le London Eye ravagé par les restes de notre société consumériste.« Ne pas avoir pu aller à Disneyland étant enfant m’a peut-être perturbé », explique encore Gillette. « Ou peut-être que ma propre enfance merdique m’a fait vouloir ternir cette joie factice d’un monde merveilleux pré-pubère, ou m’aligner sur ceux qui voient le système entier d’un œil désapprobateur, avec l’empire Disney comme emblème d’une société tâchant de dissimuler ses vices. Peut-être que d’avoir trop vu le monde si pollué, surpeuplé, appauvri m’a fait réaliser combien un endroit qui s’auto-proclame “L’endroit le plus heureux de la planète” est tristement absurde. »Gillette lui-même, qui a été volontaire pour Peace Corps au Népal et en Inde à la fin des années 80, se dit influencé par les écrits du philosophe allemand Arthur Schopenhauer, résigné face à un monde vide de sens. « Ça a été comme un éclair de lucidité, me confirmant l’état de misère perpétuelle des choses », se souvient le peintre. « Mes peintures sont des représentations visuelles de ce que Schopenhauer décrit comme le pire des mondes possible. »« Post Dismal » est à voir à la galerie Lawrence Alkin, à Londres, jusqu’au 23 juillet 2016. Pour en savoir plus sur Jeff Gillette, cliquez ici.
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