Music

En écoute : Association Fatale, instantané de la club music à Paris

Entre la soif d'expérimentation et l'envie de se la coller, le tout jeune label parisien ne sait pas choisir.
Marc-Aurèle Baly
Paris, FR
Association Fatale, Paris, 2020
pochette de la compilation

Tenter de saisir l'air du temps est une entreprise toujours ardue en musique, mais peut-être encore plus aujourd'hui si on considère que toutes ses formes sont désormais liquides et hybrides. Mais c'est sans doute encore plus compliqué quand on parle de micro-scènes locales, tant les multiplicités de niches qui s'y développent s'entremêlent, et les revivals vont et viennent.

La présente compilation du micro-label parisien Association Fatale, L'alarme fatale, permet néanmoins de s'approcher de l'ici et maintenant – ne serait que dans le jeu de mot très post-ironique de son titre. Déjà parce que les quatre titres qu'elle présente viennent d'artistes comme Jita Sensation et Zulu, membres du collectif frappé-fouetté Bruits de la Passion, de DJ F16 Falcon (qui évoluait dans les sphères noise jusqu'à tout récemment), ou encore de So Track, membre du Pas-Sage, collectif de raves semi-clandestines et semi-légales, immortalisées dans le documentaire Quand tout le monde dort l'année dernière.

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Ce qui en dit pas mal sur les intentions (le podcast mensuel de de Bruits de la Passion sur Lyl Radio s'appelle d'ailleurs Synchronisme ou Barbarie) du projet, sa manière de faire de la musique en ne choisissant pas entre une soif de recherche formelle et un besoin impérieux de se la coller.

Ces dispositions se répercutent fatalement sur la musique elle-même, très double et animée d'intentions troubles. Sur L'alarme Fatale, en écoute ci-dessous avant sa sortie physique plus tard dans le mois, on trouve du boogie de salon, du dub de chambre, du tropicalisme ligne dure et des relents industriels qu'on n'aura pas peur de qualifier de « solaires ».

Tout ça sent la musique de spa et les drogues de synthèse, un psychédélisme de plantes vertes en plastique avec une bonbonne d'eau dans le coin. Ça n'oublie pas non plus d'être un peu dur, façon drogue dissociative dont le trip s'étend et dont on ne sait pas si on arrivera à sortir. D'ailleurs le morceau de DJ F16 Falcon s'appelle « Tekamina », probablement une référence au célèbre anesthésiant pour chevaux, ou alors à la marque de guitare japonaise – je préfère garder le mystère intact. Bref, que des choses incertaines et fuyantes qui capturent un certain esprit du temps présent, et qui n'auraient sans doute jamais pu exister à un autre moment qu'entre, disons, janvier et mars 2020. En attendant le prochain frisson.

La compilation L'alarme Fatale du label Association Fatale sortira en vinyle le 28 février prochain. Vous pouvez le commander ici.

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