Culture

De Hasselt à L.A., Ashley Morgan est prêt à retourner la scène hip-hop

ashley morgan Seaweeds And Algaes

L’EP « LETGOLETGOLETGO » d’Ashley Morgan (25 ans, anciennement LTGL) est sorti en streaming vendredi dernier. Son premier single, « Seaweeds And Algaes », déjà un succès, a ouvert la voie au second, « Angels », tout aussi ambitieux. Avec ce projet, le rappeur-producteur hasseltois détourne encore un peu plus les codes du hip-hop à l’aide de sons et d’instruments inédits, et prouve qu’il n’a pas peur de s’éloigner du format standardisé de la musique.

Puisqu’il performera ce jeudi à la VICE Party, on a été voir Ashley pour en savoir davantage sur lui et sa musique. Il nous a reçu dans son habitat naturel ; son home studio à Genk, là où il écrit, compose et produit sa musique. On a parlé de l’EP bien sûr, mais aussi de sa nouvelle identité, d’éducation ou de photo de bébé.

Videos by VICE

1575386392715-ashley-morgan-LETGOLETGOLETGO-seaweeds-and-algaes

VICE : Salut Ashley. Déjà, félicitations pour ton EP !
Ashley Morgan : Merci, je suis content qu’il soit enfin sorti. L’EP était prêt depuis environ un an et ma première chanson « Seaweeds And Algaes » était aussi l’une des premières que j’avais terminées. C’était il y a presque trois ans.

« C’est assez courant dans le monde hip-hop d’utiliser une photo de bébé, donc je me suis dit : “pourquoi pas”. »

Comment se fait-il que tu ne sors ton EP qu’après un an ?
Je ne sais plus trop au final. Peut-être que c’était en partie parce que je reportais les visuels et que j’avais besoin de nouvelles photos. Je pense que c’est principalement une question de procrastination. Puis l’industrie de la musique est assez lente ; le temps passe très vite avant qu’un projet ne sorte.

C’est toi qui a fait le visuel, pourquoi cette photo de toi bébé ?
Simplement parce que mon EP parle un peu de mon enfant intérieur, de guérison et de trucs du genre. Je pense que ça colle. Puis c’est assez courant dans le monde hip-hop d’utiliser une photo de bébé, donc je me suis dit : « pourquoi pas ». Ça a un côté taquin et c’est l’un des éléments que je cherche à intégrer à ma musique. Simplement ne pas avoir peur de commettre des erreurs et laisser ta créativité prendre place, comme durant l’enfance.

Tu as aussi utilisé tes propres dessins…
Oui, tous les quelques mois, j’ai des phases où je dessine beaucoup. J’entre dans une sorte de bulle où je zone pendant un jour ou deux. Parfois j’apprécie simplement faire autre chose que de la musique, et c’est aussi très relaxant. Je commence généralement par du gribouillage, puis ça se fait naturellement. Je n’y pense pas trop.

ashley-morgan-live

Si tu n’étais pas musicien, que ferais-tu ?
De toutes façon quelque chose qui est aussi créatif, sinon un truc en rapport avec la psychologie… Ou pourquoi pas moine. J’aime beaucoup la psychologie et j’ai aussi fait une retraite de dix jours, pendant lesquels t’es pas autorisé à parler. J’y étais vraiment dans mon élément. En fait, ne pas parler est extrêmement difficile pour beaucoup de gens, mais pour moi c’était plus difficile de devoir recommencer à parler le 11e jour !

« J’ai fait une retraite de dix jours, pendant lesquels t’es pas autorisé à parler. Ne pas parler est extrêmement difficile pour beaucoup de gens. »

J’ai lu dans une interview que tu rêvais d’ouvrir une académie et donner cours de musique. Comment donnerais-tu cours aux jeunes de demain ?
J’ai moi-même fait une année préparatoire au conservatoire et je veux continuer mes études plus tard. Mais si je devais ouvrir ma propre académie, j’enseignerais d’une manière complètement différente. Je pense que les méthodes d’enseigner d’aujourd’hui sont vraiment dépassées, du genre l’apprentissage des notes « Do Ré Mi… ».

« L’éducation ne m’a pas apporté grand chose. En soi, j’ai plus appris sur Internet qu’à l’école. »

J’ai tellement d’idées pour mieux enseigner la musique. Leçon numéro un : simplement taper dans ses mains et improviser. Comme ça tu commences directement à créer, au lieu d’attendre quatre ans avant de pouvoir le faire. En secondaire, le seul sujet sur lequel j’avais beaucoup à dire était l’éducation.

Qu’as-tu étudié en secondaire ?
J’ai étudié les sciences humaines, puis en graphisme pendant un an. Mais j’étais tellement impliqué dans la musique que j’ai un peu négligé les cours. Après, je suis allé à PXL pendant deux ans, en musique électronique, j’y ai rencontré Susobrino et Pippin. Pour le reste, cette formation ne m’apportait pas grand chose. J’ai aussi fait un an de jazz après. En soi, j’ai plus appris sur Internet qu’à l’école.

ashley morgan hip hop

Revenons sur ton EP, qu’est-ce que tu cherches à lâcher ? Je fais référence au titre « LETGOLETGOLETGO ».
Ben, en réalité il y a beaucoup de raisons. D’abord pour marquer la fin de ma carrière en tant que LTGL. Ça se passait bien ; on me contactait pour me signer et pour des concerts, donc c’était difficile d’y mettre fin. Au fond de moi, je savais que ça ne le faisait pas. Pendant un moment je pensais à me forcer et continuer à faire de la musique dans ce style, mais au final je me suis rendu compte que ça n’irait pas. Je devais juste lâcher prise.

LTGL ce n’était pas vraiment toi ?
D’une certaine manière, si. Mais après un certain temps, on se fait un nom et le public s’attend un certain style. Même si tu essaies de ne pas t’en soucier, c’est difficile de faire complètement autre chose du jour au lendemain. T’as peur que ce soit bizarre. J’en avais marre d’être coincé dans ma tête, du coup j’ai décidé de lâcher prise.

« Je suis très réservé, mais j’ai investi tellement de temps dans ma musique que je ne peux tout simplement pas en être timide. »

Comment décrirais-tu ton EP ?
Avant quand je faisais juste des beats et des remixes et quand me posait cette question, je pouvais citer des sources directement. Du genre, ce son là vient d’un·e tel·le et l’autre d’un·e autre. Maintenant que je me suis mis au chant, je n’y pense plus vraiment. Je fais juste mon truc. J’ai des influences, mais je ne peux pas toujours dire à 100% d’où elles viennent. Si je dois vraiment répondre à cette question, je dis toujours que je fais du hip-hop expérimental.

Du coup t’es producteur, dj, graphiste et maintenant que tu fais aussi du rap. T’as d’autres talents en réserve ?
Surprise ! Je fais tout moi-même depuis mon home studio ; de mes créations à l’écriture, la composition et la production. La seule chose que je ne peux pas faire c’est me filmer. Dommage car sinon je pourrais tourner mes propre clips et ce serait génial. C’est mon point faible, car les vidéos ont beaucoup d’importance. La prochaine track je ne veux vraiment pas la sortir sans clip.

Tu as longtemps travaillé avec des artistes comme Dvtch Norris, Martha Da’ro et Tsar B. Maintenant c’est toi qui est sur le devant de la scène. Ça te fait quoi ?
J’avoue que je dois encore m’y habituer, mais très excitant ! Je pense qu’au bout d’un moment, je me sentirai plus à l’aise. En fait dans la vie de tous les jours je suis une personne très réservée, mais j’ai investi tellement de temps dans ma musique que je ne peux tout simplement pas en être timide. Du coup j’entre dans ma bulle et j’oublie tout ça.

On verra ça à la VICE Party, t’es chaud ?
Oui et je vais passer des sons inédits, donc j’espère que les gens sont chauds aussi !

ashley morgan angels

Écoutez « LETGOLETGOLETGO », le nouvel EP de Ashley Morgan :

Suivez VICE Belgique Instagram.