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LE NUMÉRO REPRÉSAILLES

Circuit Electric

Canzoni Dal Laboratorio Del Silenzio Cosmico, nouvel album de Bee Mask, vient couronner une discographie pléthorique échelonnée entre 2006 et 2010. Bee Mask est le nom d'emprunt de Chris Madak - instant fact : il n'est pas italien -, qui vient de...

Canzoni Dal Laboratorio Del Silenzio Cosmico

, nouvel album de Bee Mask, vient couronner une discographie pléthorique échelonnée entre 2006 et 2010. Bee Mask est le nom d’emprunt de Chris Madak –

instant fact

 : il n’est pas italien –, qui vient de sortir un album évoquant davantage un diagramme alchimique de la Renaissance qu’un facsimilé de synth-music daté de l’an 2011. Se démarquant de la grande majorité des disciples du synthétiseur qui inondent la scène underground à coups d’arpeggios enregistrés en une prise, Bee Mask donne l’impression de vouloir sublimer le réel, en révéler les contours invisibles et les textures gazeuses dans toutes leurs nuances et leur complexité. Visiblement inspiré par les pontes de l’INA-GRM, en particulier François Bayle, Chris Madak charpente ses sonorités d’insectes électroniques en utilisant des sources sonores variées (synthétiseurs, percussions, piano, bande et voix enregistrées) et avec un souci du détail qui fait toute la différence. Procurez-vous illico ce disque à la beauté mystérieuse, sorti sur un sous-label de Mego piloté par l’un des mecs d’Emeralds.

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Ce renouveau de la musique spectrale se profile également chez Nackt Insecten, d’une manière légèrement plus déconneuse mais qui fait tout autant grésiller les synapses. Ce projet solo est issu du cerveau de Ruaraidh Sanachan, un savant fou de Glasgow au nom imprononçable. Après s’être illustré aux côtés d’obscurs escadrons noise (Eye Shaking Kingdom, Kylie Minoise, Moon Unit), Sanachan a relâché la pression pour mieux se concentrer sur des excursions solitaires du côté de la sci-fi analogique. Au programme : contrées psych-folk pastorales, paysages de lave minérale, sténographie de l’inconscient et cartographie de mondes futurs où les émanations de nucléides seraient converties en molécules extranucléaires de bien-être.

Les flux de synthétiseurs en apesanteur semblent décidément de plus en plus prisés par la guilde des

noisenicks

à hoodie qui traînent leurs guêtres dans les soubassements de la société du divertissement. Dernier maillon de cette chaîne neo-kosmisch, Mandelbrot & Skyy est un binôme formé de Daren Ho (Racoo-oo-oon, Driphouse) et Jeff Witscher (Rene Hell, Secret Abuse, Cuticle) qui reconfigure à lui seul toute la scène électronique du moment. Leur EP OD-Axis est une tuerie intersidérale. Au moment où je vous parle, leur coulée de gel synthétique m’envahit d’une furieuse envie de stopper net mes élans d’écrivaillon en rush de bouclage pour me donner envie de peindre de gigantesques toiles abstraites où s’enchevêtreraient des formes géométriques aux reflets chromés. En réalité, je ne fais que décrire la pochette de leur disque, mais vous voyez.

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À l’autre extrémité du diagramme de la haine, du punk-rock renoi. Des années avant que la techno d’Underground Resistance ne vienne s’implanter au cœur de Detroit, le groupe afro-américain Death mettait les pieds dans le plat en jouant un garage uptempo radical dans la lignée des Stooges et du MC5. Enregistré en 1974,

For the Whole World to See

s’en prenait aux tenants du nouvel ordre mondial et anticipait déjà le hardcore des Bad Brains. De ces morceaux

catchy

au son rocailleux, on retiendra surtout le brûlot bruyant « Politicians in Your Eyes », un hymne anarchiste contre l’hypocrisie et la corruption du pouvoir. Et qui défonce une fois de plus l’équation manichéenne petite bourgeoise du Noir = funk.

De là, on pourra aussi démentir une autre équation stupide, à savoir punk = Blanc. Pour preuve, la house

back to basics

de Violence FM, un duo de Boulogne-Billancourt qui a déjà signé deux maxis pour Mathematic Recordings, le label mythique de Jamal Moss (le mec derrière Hieroglyphic Being). Leur EP

To Live & Die

, fidèle au patrimoine techno, ressuscite à merveille le groove coldfunk et les beats chaloupés des hordes de Dreciya. La description pose l’ambiance : « Roman noir et science-fiction, dérive des sentiments, matériel de fortune et rythmes sorciers habitent leurs compositions. » À quoi j’ajouterais : échangeur autoroutier, virée nocturne éclairée par une rampe de néons, romantisme urbain, rétrofuturisme techno et ruines du futur.

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Et puisqu’on donne ces jours-ci dans le revival acid-house, permettez-moi d’attirer votre attention sur Maurice Donovan, qui n’est autre que l’alter ego fictif de Ramadanman. Sa recette est simple, mais efficace : une 808 bien lubrifiée, des gimmicks house à l’ancienne et tout plein de petits feulements queer. La pochette pastiche tous les codes graphiques des maxis de house

circa

1989, une époque lointaine où les labels comme Dance Mania et Strictly Rhythm prospéraient en toute indépendance.

Bareback to the Future

, huh.

BEE MASK – Canzoni Dal Laboratorio Del Silenzio Cosmico (Spectrum Spools)

NACKT INSECTEN – Reality Bridge (Blackest Rainbow)

MANDELBROT & SKYY – OD-Axis (Digitalis)

DEATH – …For the Whole World to See (Drag City)

VIOLENCE FM – To Live & Die EP (Premier Sang)

MAURICE DONOVAN – Satisfied/Babeth (SSSSSS)