Cet article a été rédigé en partenariat avec Allianz dans le cadre du projet Playmakers et a été créé indépendamment de la rédaction de MUNCHIES.
Si vous n’avez pas passé les dernières années complètement déconnecté des réseaux sociaux, vous avez forcément entendu parler de Jimini’s, la principale start-up française vous permettant de pimenter vos apéros à coup de grillons. Bastien Rabastens, l’un des fondateurs de la boîte, nous a expliqué quelle mouche les a piqués pour se lancer dans ce secteur qui paraissait a priori peu porteur… mais ça, c’était avant.
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Salut Bastien ! Tu faisais quoi, avant de vendre des insectes ?
Bastien Rabastens : J’étais en train de finir mes études de droit et j’allais passer le barreau !
Et comment un futur avocat a subitement l’idée de tout plaquer pour se lancer dans le business des criquets ?
L’idée nous est venue un soir en regardant Koh-Lanta avec Clément [Scellier, co-fondateur de Jimini’s]. On était en train de faire le point sur plein de choses et on a vu à la télé ces types qui devaient manger des insectes et on s’est dit que ça avait l’air marrant. Donc on a voulu se procurer des insectes à goûter nous-mêmes – à l’époque, on ne trouvait rien de vraiment prévu pour la consommation humaine, c’était donc assez sommaire. On ne pensait pas à en faire une entreprise à ce moment-là mais c’est vraiment lors de cette soirée qu’a germé l’idée de Jimini’s. Mais ça a beaucoup évolué depuis puisqu’on est désormais plus qu’un site internet qui vend des insectes.
Comment le délire entre potes s’est transformé en vrai business plan ?
La boîte a été créée le 09 octobre 2012 et on avait commencé à sérieusement bosser dessus six mois avant ça. On se voyait le soir après le boulot ou nos cours pour discuter du projet – une fois par semaine, puis deux fois par semaine, puis tous les jours… Jusqu’au moment où on s’est dit « bon allez, maintenant soit on le fait soit on ne le fait pas mais on se décide. »
Ce qui nous a vraiment motivé pour nous consacrer corps et âme à ce projet, c’était qu’on était jeunes et donc assez libres : on n’avait pas de prêt à rembourser, pas trop de charges, pas de gros loyers… Et on se disait que dans le pire des pires, ça ferait quand même une super expérience.
Arrêter de bonnes études de droit pour des insectes, tes parents l’ont pris comment ?
C’est vrai que je n’ai finalement jamais passé le barreau. Ils ont plutôt accepté l’idée en pensant que ça me donnerait de l’expérience. Ils devaient se dire « il est gentil, on va voir ce que ça donne. » Disons que je leur ai bien pitché l’affaire. Ce n’était clairement pas le meilleur oral de ma vie mais c’est passé. Et aujourd’hui, ça a bien changé puisque mes parents adorent ce que l’on fait, ils se sont même inscrits sur Facebook juste pour pouvoir nous suivre…
Jimini’s, c’est quoi pour vous ?
Pour le consommateur, c’est l’invitation à une société décomplexée et qui s’amuse. Plus largement, on est pour une alimentation raisonnée. Et pour nous qui y travaillons, Jimini’s, c’est aussi un cadre malgré tout sérieux. Nous sommes quatorze, tous assez jeunes. L’un de nos slogans, « Eat smaller, think bigger » résume bien la pensée de notre marque.
On entend souvent dire que les insectes, c’est la viande du futur et qu’on en mangera tous. Les insectes, tu penses que c’est plus qu’une niche ?
Pour moi, c’est une source alternative de protéines. Notre but n’est pas d’envahir le marché mais de faire découvrir les insectes. Je ne pense pas que d’ici dix ans tout le monde en mangera. Ça reste une niche, mais très intéressante à développer.
Et pour vous aider à monter ce projet, comment vous vous y êtes pris avec Clément ?
On a tous les deux mis un peu d’argent de notre poche pour commencer à financer le projet. Ensuite, on a fait un crowdfunding fin 2013 pour nous permettre de lancer notre premier stock et surtout pour nous faire connaître. Ensuite, on a enchaîné pas mal de concours – j’ai carrément tout un document qui les répertorie. Mais si je devais n’en retenir qu’un, ce serait vraiment celui du MOOVJEE, le Mouvement pour les Jeunes et les Etudiants Entrepreneurs. C’est plus qu’un concours, c’est une véritable association, une communauté tout à fait formidable pour les jeunes qui se lancent. C’est eux qui nous ont mis vraiment le pied à l’étrier.
Et du coup finalement, ton bagage en droit…
…M’a bien servi, notamment pour toute la paperasse qui entoure la création d’entreprise ! Ça nous a permis d’économiser pas mal de frais d’avocat. Je suis le premier à conseiller l’usage d’un avocat si nécessaire, et ne pas prendre d’avocat, ce n’est pas forcément la bonne solution…mais pour monter sa boîte, ça reste faisable. Ensuite, concernant la législation qui entoure la consommation d’insectes en France, ça m’a aussi permis de bien débroussailler les choses, d’identifier les autorités compétentes, d’aller les voir pour discuter…mais actuellement la situation est en train de se simplifier avec le règlement européen Novel Foods. Au final, moi qui pensais totalement abandonner le droit, je me suis spécialisé dans un tout petit domaine d’expertise.
Et Clément, avec qui tu as fondé Jimini’s, je suppose qu’il apporte d’autres compétences avec lui ?
Effectivement, puisqu’il a fait une école de commerce spécialisée en web-marketing. Aujourd’hui il est toujours là et on mène toujours la barque ensemble.
Et si tu devais donner un conseil à un jeune qui veut se lancer ?
Je citerai Maître Yoda : « Do. Or do not. There is no try. » Ça veut dire qu’il ne faut pas avoir peur. On voit beaucoup de gens qui ont des idées mais qui finalement y vont à moitié parce que « tu comprends, j’ai mon boulot à côté ». Mais si on le fait à moitié, c’est foutu d’avance.
Un autre truc essentiel quand on démarre, c’est de bien gérer son temps. Parce que le truc qu’on a à foison au départ, ce n’est pas l’argent, c’est son temps. Donc c’est ça qu’on investit. Savoir s’organiser, ne pas se laisser déborder. Se donner à fond mais de manière raisonnée. Si je pouvais revenir quatre ans en arrière, je me donnerais pour conseil d’être vraiment nickel sur mon organisation. Mais bon, il y a aussi des gens qui réussissent très bien dans l’entreprenariat sans avoir cette rigueur. Je ne pense pas qu’il y ait de conseil absolu valable pour tous.
Parmi toute la multitude d’insectes sur la planète, Jimini’s a quand même choisi de commencer avec une offre assez réduite de cinq produits. Tu peux m’expliquer où vous en êtes aujourd’hui ?
On a triplé cette offre avec notamment une nouvelle gamme de barres énergétiques à base de farine d’insectes et de fruits secs disponible aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Belgique…pas encore en France, mais c’est pour des raisons juridiques et ce serait un tout un autre sujet. Et d’ici trois à quatre ans, on prévoit encore plusieurs nouveautés. [toute nouvelle gamme lancée dimanche 16 octobre – article à mettre à jour d’ici là]
Si on avait dit au Bastien de 2010 qu’il serait bientôt à la tête d’une entreprise leader dans le créneau de la consommation d’insectes, il aurait halluciné ?
Ça aurait bien fait marrer le Clément et le Bastien de 2010, c’est clair ! Clément aurait sans doute été moins étonné que moi, cela dit…
Et le Bastien de 2020, toujours dans les insectes ?
Oui, toujours avec Clément et toujours à la tête de Jimini’s. Aujourd’hui on est déjà n°1 en France, donc l’objectif est maintenant de devenir leader européen le plus rapidement possible. Et à terme, leader mondial pour développer toutes les applications alimentaires de cette source de protéines.
Eh bien c’est tout ce que je vous souhaite ! Merci Bastien.