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Crime

En images - Les minorités d’Irak qui fuient l’organisation État islamique

Des minorités irakiennes réfugiées se sentent manipulés à des fins politiques par les Kurdes irakiens.
Photo par Frederick Paxton

Les membres des minorités ethniques et religieuses d'Irak qui s'étaient réfugiés au Kurdistan irakien pour échapper à l'avancée des djihadistes ont du fuir une fois encore après de récents combats. Désormais hébergés dans un ancien entrepôt de la banlieue d'Erbil, la capitale de la région, certains d'entre eux ont confié à VICE News se sentir impuissants et manipulés à des fins politiques par les autorités Kurdes.

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L'État islamique s'est emparé d'une large partie du nord de l'Irak en juin, dont Mossoul, la deuxième ville la plus grande du pays, ce qui a provoqué un exode des populations non-sunnites qui craignaient de se faire massacrer. Beaucoup d'entre eux se sont sauvés dans des camps de réfugiés à la frontière interne au Kurdistan irakien, notamment dans le camp de Khazir, sur la route de Mossoul. Mais l'assaut un mois plus tard de l'État islamique contre les troupes peshmerga Kurdes a provoqué l'évacuation des camps de réfugiés.

Beaucoup de ceux qui ont fui se sont retrouvés à Baharka - un campement de fortune à la périphérie d'Erbil qui entoure un entrepôt abandonné. Les habitations de fortune sont séparées les unes des autres par des bâches en plastique. À l'extérieur, il fait plus de 45 degrés et des rangées de tentes s'étendent dans la poussière.

Comment l'État islamique a conquis les territoires peshmerga avec une telle facilité. Article en Anglais.

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Baharka devait être un camp de transit, pour héberger d'urgence les déplacés irakiens avant qu'ils ne se rendent dans différentes provinces. Pourtant, il héberge maintenant 2 500 personnes et les réfugiés ne cessent d'arriver, d'après son directeur, Muhammed Bindian.

Muhammed Bindian, qui travaille pour la Fondation Barzani précise que les habitants du camp sont parmi les populations les plus vulnérables d'Irak, parmi lesquelles des Yézidis, Assyriens, Turkmènes, Shabaks et des Kakaïs. La plupart d'entre eux sont arrivés du camp de Khazir, et ont fui devant l'avancée de l'État islamique.

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Jiyan, 20 ans, a raconté à VICE News qu'elle s'était enfuie quand la rumeur a couru d'un assaut de militants sunnites imminents, et que même la sécurité du camp est partie en courant. « Les peshmerga se sont repliés très vite, alors on a couru nous aussi », se souvient-elle.

 « L'État islamique : le reportage complet ». À regarder ici

Photo par VICE News/Frederick Paxton

La crise humanitaire provoquée par l'avancée de l'État islamique en territoire Yézidi est à l'origine de l'intervention internationale, dont les bombardements américains et les livraisons d'armes aux forces Kurdes.

L'idée que les peshmerga pourraient récupérer dès demain le territoire autour de Mossoul s'ils le voulaient, mais qu'ils ne le font pas parce qu'ils espèrent utiliser les réfugier comme monnaie d'échange pour avoir plus d'armes et de soutien, est largement répandue parmi les réfugiés.

« Je pense que tout est commandé par des intérêts politiques », explique à VICE News Sami Abdullah Ismael, un Shabak de 44 ans. « On sait que les peshmerga sont maintenant bien équipés et qu'ils pourrait regagner des territoires, surtout grâce aux bombardements… La seule chose que je veux c'est que notre région soit libérée et qu'on puisse regagner nos maisons ».

Un Arabe chiite de 63 ans, arrivé de Khazir le 5 août dernier (il n'a pas voulu nous donner son nom), se fait l'écho de ce sentiment. « Le tout n'est pas de savoir ce qui est arrivé, ni comment c'est arrivé, mais bien par quel moyen nous allons récupérer nos maisons », a-t-il dit à VICE News. « On a des tentes, et de l'eau, mais ce n'est pas une vie. On veut que les peshmerga reconquièrent nos maisons et nos terres, avec l'aide de la communauté internationale ». « Tout ça ce ne sont que des stratégies politiques », intervient un autre homme. « À cause de ces stratégies, ce sont nos vies qui sont détruites ».

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Partout, c'est l'État islamique : sur la route avec les combattants du YPG. Article en Anglais. 

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Baharka est géré en coopération entre de nombreuses ONG internationales - dont le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et l'agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) - et les autorités locales, qui fournissent chaque famille d'un ensemble de produits essentiels comme des draps, des couverts, de la nourriture. Certaines de ces denrées ont même été acheminées en voiture par des civils.

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Mais il y a aussi des doléances. Jiyan dit avoir atteint le camp de nuit avec sa famille après avoir quitté Khazir, mais n'a pas pu rentrer immédiatement car les autorités la soupçonnaient d'être une habitante d'Erbil venue faire l'aumône. Ce n'est que le lendemain, après qu'elle a passé la nuit dehors avec ses enfants, qu'on l'a laissé rentrer. Muhammed Bindian se justifie en expliquant qu'il faut étudier le cas de tous les nouveaux arrivants pour éviter que certaines personnes en profitent.

D'autres se plaignent que chaque famille recoive la même quantité de nourriture peu importe leur taille. « Il y a une mauvaise gestion de l'aide et un manque d'organisation », se plaint Daoud, un Kakaï de 51 ans. « Chaque famille reçoit la même aide qu'ils soient trois ou 12 », explique-t-il à VICE News. Muhammed Bindian se dit au courant du problème et travaille avec la PAM à la mise en place d'une aide alimentaire plus juste.

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L'homme qui dormait quand l'État islamique s'est emparé de sa ville. À lire ici. 

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Il arrive que parfois ces tensions soient à l'origine de violences. VICE News a été témoin d'une dispute entre deux familles à propos de la place de leurs tentes, et les gérants du camp ont fait appel aux peshmerga pour calmer le jeu. D'autres habitants du camp rapportent une altercation entre des groupes Shabak et Kakaï pendant la distribution de nourriture. Mais dans l'ensemble, les relations entre les différents groupes semblent plutôt amicales.

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Beaucoup de réfugiés racontent qu'ils ont tenté de sauver leur village contre l'État islamique. Un homme de 33 ans, d'origine Kakaï, assis au bout d'un lit en métal monté sur des blocs de béton et couvert de cartons, confie à VICE News qu'avec sa famille et ses amis, ils s'étaient alliés avec des villageois Shabaks et Turkmènes pour créer une force de défense au début de l'été, pour se battre aux côtés des peshmerga. Cependant, d'après lui quand l'État islamique a attaqué, les peshmerga ont battu en retraite, et seuls ils n'avaient aucune chance de repousser l'ennemi.

Comment les militaires Kurdes ont combattu l'État islamique avec succès. Article en Anglais. 

Photo par VICE News/Frederick Paxton

Il espère désormais que les irakiens mettront leurs différences de côté pour combattre l'État islamique et que les politiques feront de même au sein du nouveau gouvernement. « On a besoin d'unité. Le peuple est uni, mais pas les groupes armés, ni les hommes politiques. Si nous pouvons régler nos différences et nous unir, alors on pourra reprendre notre pays. »

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Photo par VICE News/Frederick Paxton

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Photo par VICE News/Frederick Paxton

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