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Culture

Tout ce que l’on sait sur le géant de la porno MindGeek

Une enquête de La Presse jette une lumière sur l'empire montréalais du XXX.
Photo : Pixabay

Un « boys club », à la tête du l'entreprise porno la plus influente du monde. MindGeek, le géant qui possède entre autres YouPorn, PornHub, RedTube, Brazzers et Men.com, est une entreprise au modèle d'affaires agressif et souvent controversé, si ce n'est carrément douteux.

Une enquête rigoureuse de La Presse fait la lumière sur cet empire pornographique, mais de grandes zones d'ombre demeurent. Nous en résumons ici quelques-uns des points saillants.

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Un « boys club » aux commandes

Lorsqu'on lit les témoignages recueillis par La Presse, il est difficile de ne pas penser aux fastueux dirigeants de la Stratton Oakmont, tels que dépeints dans le film Wolf of Wall Street.

Plusieurs sources décrivent les patrons de MindGeek comme les membres d'un club exclusif, très nanti, qui n'hésite pas à dépenser des dizaines et même des centaines de milliers de dollars pour faire la fête. « Les dirigeants, c'est un boys club, ils se connaissent tous, ils sont tous amis, témoigne une source. Pour quelqu'un comme moi, ça semble presque impossible de rejoindre ce club. Mais s'ils ont cette attitude de boys, la plupart sont extrêmement brillants. Ils prennent leur job très sérieusement. » Une autre source qui a quitté l'entreprise fait état d'une mentalité « presque sectaire ».

Un monopole qui a des conséquences

Ça fait des années que le commun des mortels n'a plus à attendre patiemment Bleu Nuit sur les ondes de TQS pour consommer gratuitement du contenu pornographique. Désormais, il est très facile de se vider la bourse sans vider ses poches, car l'internet regorge de contenu gratuit. Les « tubes » XXX, comme YouPorn et PornHub, offrent gratuitement une grande sélection de vidéos provenant de sources diverses.

C'est là le modèle d'affaires de MindGeek : elle offre de la porno gratuite, et remplit son coffre grâce à la publicité et à la redirection vers des sites payants (qui lui appartiennent).

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La Presse explique que les « tubes » XXX n'ont mis que quelques années à bousculer le modèle d'affaires de l'industrie du porno. Des dizaines de studios qui vendaient des DVD pornographiques ou qui offraient sur le web du contenu payant ont fait faillite, tandis que d'autres ont été rachetés, certains par MindGeek.

Alec Helmy, président et éditeur d'XBIZ, un des principaux magazines sur l'industrie de la porno, croit que l'influence de MindGeek, qu'il qualifie de quasi-monopole, aurait contribué à diminuer la valeur des contenus et à détériorer les conditions de travail des actrices porno, dont le salaire aurait diminué de moitié, passant de 400 $ à 200 $ par scène.

Une sombre fiscalité

MindGeek fait-elle de l'évitement fiscal ? Impossible de le confirmer. La fiscalité du géant de la porno baigne dans le mystère.

Son siège social est situé au Luxembourg… mais personne n'y travaille, affirme par interphone la réceptionniste. Dans le bureau, c'est le calme plat en plein après-midi, observe de l'extérieur le journaliste de La Presse. En fait, la plupart des employés de l'entreprise sont basés à Montréal.

Les experts consultés avancent que la compagnie tire probablement des avantages de l'emplacement de son siège social. Omri Marian, professeur en droit fiscal à l'Université de la Californie à Irvine, indique que « [l]es sociétés utilisent fréquemment des entités au Luxembourg pour diriger leurs activités de financement, de façon à réduire leurs revenus dans les juridictions où elles font des affaires. »

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Mais ça ne s'arrête pas là. La société qui exploite le site YouPorn est établie à Curaçao, dans les Caraïbes, une île avantageuse sur le plan fiscal. Et MindGeek a des filiales dans une dizaine de territoires, dont Chypre et l'Irlande, qui sont aussi réputés pour leurs régimes fiscaux attrayants.

Et si les bureaux américains de MindGeek sont situés à Los Angeles et Miami, la filiale américaine, elle, est établie au Delaware. Elle se trouve dans un bâtiment anonyme, où sont également établies plus de 200 000 entreprises, dont Google, Coca-Cola et Apple. Un expert du HEC suggère que le manque de transparence entourant les entreprises basées au Delaware explique sa popularité en tant que « paradis fiscal ».

MindGeek fait l'objet d'une enquête… encore

En 2012, MindGeek a été reconnue coupable d'avoir illégalement financé une campagne contre la « Mesure B » qui « visait à rendre plus strictes les lois entourant le port du condom par les acteurs porno dans le comté de Los Angeles ». La mesure a été adoptée, malgré un investissement de près de 270 000 $US de la part de MindGeek.

La California Fair Political Practice Commission confirme que Mindgeek est à nouveau sous enquête depuis deux semaines, car on observe des « irrégularités » pour un cas « connecté » au précédent. Une nouvelle mesure, la « Proposition 60 », va être votée par les électeurs de la Californie le 8 novembre prochain. Elle vise à imposer aux studios XXX une réglementation encore plus sévère, pour qu'ils respectent les lois sur le port du condom.