La responsable d’une tente de réduction des méfaits de Vancouver n'attend pas la permission avant d'aider

Des seringues, des chaises, de la naloxone, quelques employés avec une formation RCP et un abri imperméable. Ce sont les éléments de base d'un site d'injection supervisée de fortune, dit la responsable d'une tente de réduction des risques sanitaires récemment installée dans le quartier Downtown Eastside à Vancouver.

La cofondatrice Sarah Blyth, qui dirige aussi avec d'autres le marché de rue de Downtown Eastside, affirme qu'elle a choisi le site en fonction de l'épidémie de surdose d'opiacé dans le quartier. Elle dit aussi qu'elle et d'autres travailleurs de première ligne ont voulu offrir des services plus complets dans la rue après avoir reçu des demandes d'aide.

« On est au milieu de ça, on voit des surdoses et on ne peut pas croire qu'il n'y a pas plus d'aide », dénonce-t-elle.

« À notre marché, on entend des personnes crier depuis la ruelle. » Elle court chercher la naloxone, l'antidote aux surdoses d'opiacé que la province avait récemment autorisé, pour aller l'administrer à la personne en surdose. « On fait vite, on ne veut pas arriver en retard pour ce genre de chose. »

Ses services couvrent les zones dont ne s'occupe pas Insite, le site d'injection supervisée de Vancouver, qui, selon Sarah, est rempli et incapable de répondre aux urgences dans la rue.

Vancouver Coastal Health s'est engagé à ouvrir deux nouveaux sites d'injection supervisée d'ici l'an prochain, mais Sarah n'attend pas le gouvernement. « Quand on s'occupe d'urgences comme celles-là, on n'a pas le temps d'attendre que la bureaucratie du gouvernement fasse son travail. »

Sarah Blyth a mis sur pied sa tente avec la fondatrice de Vancouver Area Network of Drug Users Ann Livingston la semaine dernière. Jusqu'ici, la Ville et les autorités sanitaires n'ont pas causé de problèmes. Même quand le cirque royal est passé dans Hastings Street, tout près, avec une forte présence policière autour du marché, elle a pu continuer à offrir ses services de réduction des risques sans interruption.

Depuis, Ann Livingston et elle ont supervisé des injections et distribué des instruments de réduction des risques de 10 h à 16 h tous les jours et ont reçu de 25 à 40 visites par jour : certains pour des injections, d'autres pour emporter des instruments. Le jour de la distribution des chèques de l'aide sociale, elles ont travaillé jusqu'à 21 h.

Le jour de l'ouverture, le coroner de la Colombie-Britannique a rendu publiques de nouvelles statistiques qui montrent que le fentanyl a fait son apparition dans les drogues récréatives, ainsi que dans les opiacés vendus dans la rue. Cet opiacé synthétique super-puissant a causé plus de 60 % des décès par surdose dans la province cette année. Depuis janvier dernier, les surdoses ont entraîné près de 500 décès.

Sarah Blyth dit que le fentanyl a rendu les surdoses plus mortelles, forçant les travailleurs de première ligne à intervenir plus rapidement. Quand un lot de mauvaise drogue est en circulation, elle ajoute que les ruelles autour de Hastings se transforment en zones de guerre, dans lesquelles des personnes perdent conscience les unes après les autres, parfois à quelques minutes d'intervalle.

« Leurs pertes de conscience sont beaucoup plus fortes, et c'est plus difficile de les ramener. On a besoin de plus de Narcan [le nom commercial de la naloxone], beaucoup plus, explique-t-elle. Tout peut se jouer en quelques minutes : ils peuvent se retrouver aux soins intensifs ou dans une situation beaucoup plus grave. »

« Avec l'héroïne, on leur donne du Narcan et un peu d'air, et ils vont bien, mais là, après deux, trois doses, ils sont toujours inconscients. »

Comme on ne semble pas en voie de sortir de la crise des opiacés au pays, Sarah Blyth suggère que sa tente d'aide soit dupliquée dans d'autres secteurs durement touchés.

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