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Sur les traces du tireur fou qui a terrorisé Paris hier matin

Les Français ne sont pas du tout habitués aux tueurs de masse.

Hier matin, vers 10h15, un forcené d'une quarantaine d'années, armé d'un fusil habituellement utilisé pour dégommer des sangliers et chargé de balles « grosses comme le pouce », pénétrait dans le hall de la rédaction du journal Libération. Le mec a pris la fuite après avoir ouvert le feu à deux reprises et blessé grièvement au thorax et à l'abdomen C., un assistant photographe de 23 ans et collaborateur du journal, qui vient juste de sortir du coma.

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Une heure et demi plus tard, nous apprenions que trois coups de feu venaient d'être tirés à l'entrée du siège de la banque Société Générale, à l'ouest de Paris, dans le quartier d'affaires de la Défense, sans faire de blessés.

Peu de temps après, un automobiliste se faisait connaître de la police, affirmant qu'il venait de se faire prendre en otage dans le secteur par un homme « lourdement armé ». L'automobiliste aurait été forcé par son effrayant passager de le conduire aux Champs-Elysées, avant de se voir libérer de sa voiture dans le haut de l'avenue, au niveau de l'Arc de Triomphe. Hier soir, l'otage était entendu par la police, qui se trouve sur le qui-vive et fortement mobilisée depuis le début de l'affaire.

Durant plusieurs heures, un hélicoptère a même survolé Paris à la recherche du mec et certains secteurs de la capitale se sont retrouvés complètement bouclés. La sécurité a aussi été renforcée autour des locaux de plusieurs grands médias et la Maison de la Radio s'est retrouvée en état d'alerte pendant une demi-heure, après le signalement d'un suspect à proximité. Presque tout le monde à Paris - et particulièrement les journalistes -, se sont chiés dessus en pensant aux prochains coups que le forcené était en mesure d'imaginer.

Immédiatement, dès l'attaque à Libé, la police française a fait le lien avec un événement moins médiatisé survenu vendredi dernier, le 15 novembre, tôt dans la matinée. Ce jour-là, un homme armé d'un fusil à pompe avait fait irruption à la rédaction de la chaîne d'information BFM TV. Il avait alors menacé l'un des rédacteurs en chef, essayé de tirer et sorti une réplique de type : « La prochaine fois, je ne vous raterai pas. »

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D'après la police judiciaire et les témoignages reçus, il s'agirait du même forcené dans l'affaire BFM TV de vendredi et dans celles d'hier matin.

Suite à l'agression de vendredi matin, le type, gardant son arme sur lui, a quitté les lieux comme si de rien n'était en empruntant les transports en commun. Filmé par une caméra de vidéo surveillance, on le voit ici attendre tranquillement le tramway. Plusieurs experts de la police judiciaire ont annoncé sur I-Télé qu'« à en juger par la manière dont il se déplace avec son arme, on pourrait avoir à faire à un braqueur de banques. »

Comme tous les Français, je me suis demandé quelle serait l'éventuelle prochaine cible et quelles étaient les motivations de cet homme déterminé mais pas très doué. Pour tenter de trouver une réponse, hier j'ai décidé de participer à la chasse à l'homme organisée par la Police Nationale et de partir sur les traces du tireur à travers la ville.

A mon arrivée sur les Champs-Elysées en milieu d'après-midi - le dernier endroit où aurait été aperçu le tireur avant qu'il prenne le métro et que la police perde sa trace -, j'ai été frappé par le peu de dispositif policier présent sur place. Alors que plusieurs radios présentaient la zone comme « totalement encerclée par la police », j'ai été assez étonné de voir que tout était finalement aussi chiant qu'à l'habitude dans le quartier. A la recherche de - au moins - une meute de journalistes, j'ai descendu un peu l'avenue, avant de comprendre qu'en définitive, la seule attraction du quartier était son Marché de Noël, ses marrons chauds et ses touristes américains. J'ai alors sauté dans le premier taxi et pris la direction des Tour Société Générale de la Défense où le tireur s'était illustré quelques heures plus tôt.

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Une fois arrivée, il m'a fallu peu de temps pour réaliser que la situation était la même que celle que je venais de quitter : rien ne semblait se passer et, là encore, aucun policier ne se trouvait dans les parages. Je me demandais vraiment où était déployé le « grand dispositif » annoncé par Hollande et Valls. Sur le perron de la tour, dont le hall venait de rouvrir, se trouvaient quelques gens sortis pour fumer des clopes et prendre des photos de l'impact de balle avec leurs iPhone.

L'impact de balle sur la vitre étant minuscule et difficilement identifiable, j'ai mis quelques instants avant de le trouver et de me rendre compte de l'état de la vitre. Je me suis aussitôt demandé ce que le tireur avait essayé de faire en tirant à cet endroit, à environ 3 mètres de hauteur. Avait-il essayé de tirer sur quelqu'un et s'était-il complètement foiré ou avait-il juste voulu terroriser la Société Générale et ses employés ? Dans les deux cas, il prouvait au monde qu'il existait, comme le premier gros bébé égocentrique venu.

Intrigué, je suis parti à la rencontre des agents de sécurité présents en nombre dans le hall. Avant de me faire aussitôt fait rembarrer sous le prétexte que la Société Générale n'avait « rien à dire aux journalistes quels qu'ils soient. »

Après plusieurs minutes à tourner en rond, j'ai réussi à trouver un mec avec lequel discuter. Présent dans les étages au moment des coups de feu, il m'a expliqué n'avoir « rien entendu » et avoir été prévenu « quelques instants après les tirs par un mail en interne ». Comme moi, il n'arrivait pas à comprendre quelles pouvaient être les motivations du tireur fou et s'interrogeait sur les mobiles politiques possibles du tireur.

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Ma destination suivante : la rédaction de Libération (Paris III), où le forcené a tiré sur un jeune homme sans raison apparente dans la matinée. Dans le taxi, j'ai trouvé sur Internet les premières images disponibles du débilos. Il est presque 17h. Son profil de loser éternel typique m'est apparu dans toute son évidence. Et, malgré l'horreur dont il était la cause, je n'ai pas réussi à ne pas le trouver hilarant.

À mon arrivée à Libé, les bureaux étaient vides, le personnel se réunissant au même moment à l'étage pour une réunion de crise en interne. Là encore, ne se trouvait aucun policier ou agent de sécurité à l'entrée du bâtiment ou alentour. Je me suis alors dirigé vers les standardistes de l'accueil (un homme et une femme) qui, comme les agents de sécurité de la Société Générale, m'ont invité à dégager le plus tôt possible.

« Nous avons des ordres et nous ne sommes pas autorisés à répondre à la moindre question », m'a dit l'homme.

- Etiez-vous présent ce matin ? j'ai dit.

- Non, je suis arrivé à 15h. Tout le monde était en état de choc, comme on pouvait s'y attendre. Mais je ne peux pas répondre aux questions.

-OK. Où est-ce que -

- Maintenant partez s'il-vous-plaît », m'a répondu la femme, assez sèchement.

Vu le peu de coopération de nos confrères de Libé, je suis allé parler au commerçant de l'autre côté de la rue. Il s'appelle Tarek, a 30 ans et son job consiste à vendre des pulls mauves aux gens. Il se trouvait à l'entrée de sa boutique lors de la fusillade, et, bien qu'il ait « vu toute la scène », il n'a « rien entendu ». « Je pense que le tireur a utilisé un silencieux », m'a-t-il-dit.

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Quand je l'ai rencontré, il témoignait devant caméras de BFM TV pour la vingtième fois de la journée. « Je ne comprends pas comment j'ai fait pour rater le moment où le tireur s'est enfui », il a ajouté.

Tarek m'a décrit la situation de la journée comme « très tendue et agitée, particulièrement lors de la venue de deux ministres en début d'après-midi ». Contemplant le calme plat de la rue au moment de notre discussion, c'était dur à imaginer. Je suis resté quelques minutes supplémentaires, le temps de fumer une cigarette avec les quelques journalistes de l'AFP et caméramans encore présents sur place à 18h, avant de me tirer.

À la fin de cette étrange journée de chasse à l'homme, en rentrant chez moi, je n'ai pu m'empêcher de m'interroger sur la façon dont les médias avaient tenu à sensationnaliser l'histoire. Alors que tous annonçaient un dispositif policier de très grande ampleur, il ne se passait en définitive pas grand-chose et - à part celle des bureaux de Libération -, pas la moindre rue ne s'est retrouvée bloquée plus d'une heure.

J'ai également eu une pensée pour l'équipe de Libé toujours sous le choc de l'attaque et au jeune homme grièvement blessé dans la matinée. Aux dernières nouvelles, il se serait réveillé du coma artificiel dans lequel les médecins l'avaient plongé et « irait un peu mieux » selon le Figaro, bien que son pronostic vital restait toujours engagé.

@GlennCloarec

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