Drogue

Le stéréotype du « stoner paresseux » est un mythe

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Le stoner paresseux a longtemps servi de stéréotype habituel pour représenter les consommateurs de cannabis dans les médias grand public, tout en faisant office de pilier pour pas mal de campagnes antidrogue. Mais une nouvelle étude suggère que présenter les consommateurs de weed comme paresseux et démotivés pourrait être le fruit d’une fainéantise en soi.

L’étude, menée par des scientifiques de l’université de Cambridge, de l’University College London et du King’s College London, et publiée le mois dernier dans l’International Journal of Neuropsychopharmacology, a examiné si les personnes qui consomment du cannabis présentaient des niveaux plus élevés d’apathie (perte de motivation) et d’anhédonie (perte d’intérêt ou de plaisir lié aux récompenses) que les personnes qui n’en consomment pas. Elle a aussi examiné si ces personnes étaient moins disposées à fournir un effort physique pour recevoir une récompense.

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« Nous sommes tellement habitués à voir des “stoners fainéants” sur nos écrans qu’on ne s’est jamais vraiment demandé si c’était une représentation juste de la réalité ou pas. Notre travail implique qu’il s’agit en soi d’un stéréotype lui-même paresseux, et que les personnes qui consomment du cannabis ne sont pas plus susceptibles de manquer de motivation ou d’être plus fainéantes que celles qui n’en consomment pas », a déclaré Martine Skumlien, l’une des auteures de l’étude.

Évidemment, le cannabis peut être associé à d’autres effets psychophysiques, en fonction de facteurs tels que la variété de la plante et les caractéristiques uniques de la personne qui la consomme. Mais une meilleure compréhension de ce que génère et ne génère pas le cannabis peut conduire à une meilleure compréhension des personnes qui en consomment, et à de meilleures façons de parler de la plante en général.

L’étude a porté sur 274 adolescents et adultes ayant consommé du cannabis au moins une fois par semaine et en moyenne quatre jours par semaine au cours des trois derniers mois, ainsi que sur un groupe de personnes n’ayant pas consommé de cannabis, appariées par âge et par sexe. Afin de mesurer l’apathie et l’anhédonie, les participants ont classé des énoncés tels que le plaisir qu’ils éprouvaient à être en famille ou avec des amis, l’intérêt qu’ils portaient à l’apprentissage de nouvelles choses et la probabilité qu’ils aillent jusqu’au bout d’une tâche.

Les chercheurs ont constaté que les personnes qui consommaient du cannabis ne faisaient pas état d’une plus grande apathie ou anhédonie que les personnes qui n’en consommaient pas.

En fait, les consommateurs de cannabis ont obtenu un score légèrement inférieur à celui des personnes clean en ce qui concerne l’anhédonie, ce qui suggère que les premières sont plus à même de prendre du plaisir dans les activités mentionnées que les secondes. Selon les auteurs de l’étude, cela pourrait s’expliquer par le fait que les personnes qui ont tendance à rechercher le plaisir sont également plus susceptibles de consommer du cannabis. Mais les auteurs ont cependant prévenu que la différence constatée était minime et devait être interprétée avec prudence.

« Les participants à notre étude comprenaient des consommateurs quotidiens, et ils n’étaient pas plus susceptibles de manquer de motivation que les autres »

Les adolescents, qu’ils aient consommé de l’herbe ou non, ont signalé une plus grande apathie et une anhédonie plus importante que les adultes. Cela suggère que les adolescents ne seraient pas plus vulnérables aux effets négatifs perçus du cannabis que les adultes.

Les chercheurs n’ont pas non plus trouvé de lien entre la fréquence de consommation de cannabis et l’apathie ou l’anhédonie.

« Nos données indiquent que la consommation de cannabis ne semble pas avoir d’effet sur la motivation des usagers récréatifs. Les participants à notre étude comprenaient des consommateurs quotidiens, et ils n’étaient pas plus susceptibles de manquer de motivation que les autres », a déclaré Barbara Sahakian, une autre auteure de l’étude.

Cependant, Sahakian a également noté que leur étude ne pouvait pas exclure la possibilité qu’une consommation plus importante de weed, comme chez les personnes souffrant d’un trouble de la consommation de cannabis, puisse affecter la motivation.

Les chercheurs ont également évalué la relation entre la consommation de cannabis et la volonté de faire des efforts pour obtenir ou désirer une récompense.

Un peu plus de la moitié des participants ont effectué un certain nombre de tâches comportementales. La première mesurait leur volonté de fournir des efforts pour obtenir une récompense. Les participants avaient la possibilité d’appuyer sur des boutons afin de gagner des points qu’ils pouvaient ensuite échanger contre des bonbons à ramener chez eux. Il y avait trois niveaux de difficulté et trois niveaux de récompense, et des points étaient attribués aux participants qui acceptaient et accomplissaient certaines tâches. Plus il avait de points, plus le participant était disposé à faire des efforts pour obtenir une certaine récompense.

La deuxième tâche a permis de mesurer le plaisir que les participants retiraient des récompenses. Les participants ont d’abord été invités à estimer le niveau d’intensité de leur désir pour chacune des trois récompenses (30 secondes de leur chanson préférée, un morceau de chocolat ou un bonbon, et une pièce de 1 £, soit environ 1,15 euro) sur une échelle allant de « je n’en veux pas du tout » à « je le veux intensément ». Ils ont ensuite reçu les récompenses et ont été invités à évaluer le plaisir qu’ils en avaient retiré sur une échelle allant de « je n’ai pas du tout aimé » à « j’ai adoré ».

Pour ces deux tâches, les chercheurs n’ont constaté aucune différence significative entre les personnes qui consommaient du cannabis et celles qui n’en consommaient pas, ni entre les groupes d’âge. Cela suggère que les personnes qui consomment du cannabis sont tout aussi disposées à faire des efforts pour obtenir des récompenses et tout aussi susceptibles de désirer et d’apprécier des récompenses que les personnes qui ne consomment pas de cannabis.

Il convient de noter que même s’ils avaient récemment consommé, les participants n’étaient pas défoncés pendant l’étude et qu’il est possible que la motivation diminue lorsque les gens sont sous l’emprise du cannabis. Il est également probable que les consommateurs de cannabis aient voulu paraître plus motivés lors de cette étude afin, justement, de réfuter le stéréotype du stoner paresseux.

Plus tôt cette année, la même équipe de chercheurs a publié une étude qui a utilisé l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle afin de démontrer que les systèmes de récompenses des consommateurs de cannabis génèrent des réponses similaires à ceux des personnes qui n’en consomment pas.

« Les hypothèses infondées peuvent être stigmatisantes et faire obstacle aux messages relatifs à la réduction des risques », a déclaré Skumlien. « Il est primordial de favoriser l’honnêteté et la franchise lorsqu’on parle des conséquences néfastes de la consommation de drogues. »

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