Vous connaissez tous l’histoire de ce petit village peuplé d’irréductibles Gaulois qui se gavent de potion magique et résistent encore et toujours à l’envahisseur Romain. Il suffit de le transposer dans le XVIIIe arrondissement de Paris pour obtenir le McOmar.
Situé au 11 rue de Chartres, en plein cœur de la Goutte d’Or, le fast-food se dresse un peu comme le patelin d’Astérix et Obélix. Il faut simplement remplacer la potion magique par un « sandwich complet » et les camps romains de Petitbonum, Babaorum ou Laudanum par McDonald’s, Starbucks ou la Brasserie Barbès.
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En vrai, le McOmar, ce sont deux snacks jumeaux qui se font face. On y trouve toujours quelques têtes venues se régaler ou passer un bon moment. Pourtant, l’endroit ne paie pas de mine avec sa signalétique un peu barrée – enseigne LED, écriture en flamme et devanture bleue.
Comme toutes les bonnes adresses d’un quartier en perpétuel changement depuis dix ans, le lieu a évidemment une histoire particulière. Omar – le boss – a pris possession de la première boutique dans les années 2000. Il y tenait d’abord un magasin de couture. Vestige de cette époque, un panneau « Retouches » surplombe l’échoppe.
En 2004, Omar décide de s’orienter vers la restauration rapide. Il ouvre une première adresse : Le Restaurant Méditerranée. Les années passent et la réputation des lieux grimpe en flèche. Devant ce succès, le patron rebaptise le rade. « Dans la rue, même les gens que je ne connaissais pas disaient ; ‘On va chez Omar’. Du coup c’était plutôt amusant de renommer les lieux », se justifie-t-il dans un sourire. Logique aussi.
En pleine croissance, alors que les clients affluent chaque jour, Omar veut se doter d’une seconde boutique pour répondre à la demande. Elle sera située juste en face de la précédente. Toujours dans cette rue qui fait un trait d’union entre Barbès et La Chapelle. Un peu plus grande, elle permet à Omar, son fils Samy et leurs équipes d’avoir plus de place pour travailler. Et de doubler leur rendement.
Depuis, le McOmar continue de faire vaillamment la nique aux plus Américains de tous les envahisseurs : McDo. Plus qu’un pied de nez, c’est d’abord un clin d’œil visuel. Comme le souligne Samy, « le M est exactement le même que celui du géant du fast-food ».
« En fait, c’est plus un hommage qu’un concept anti-McDo », ajoute-t-il. Certains clients ne l’ont même pas remarqué. « C’est marrant, j’avais pas fait attention. En même temps quand je viens ici c’est surtout pour les sandwichs, je ne regarde pas vraiment ce qu’il se passe autour », dit Farid* concentré sur sa bouffe. Jusqu’à nouvel ordre, jamais Omar et sa team n’ont eu de soucis concernant le logo.
Pour servir tout ce beau monde qui passe ou s’entasse devant les deux boutiques, 7 personnes travaillent main dans la main de 9h à minuit. Organisée, souriante et bien rodée, l’équipe enchaîne les sandwichs. La plupart des clients sont des habitants du quartier – beaucoup sont d’origine algérienne comme Omar – mais certains ont fait du chemin assure Samy : « On a beaucoup de clients qui viennent de banlieue pour manger nos sandwichs et notre karantika ». Ce flan à base de farine de pois chiches est une des spécialités de la maison.
Des produits algériens viennent ajouter une forme d’authenticité : pizzas feuilletées, bricks œuf et viande hachée et mhajebs.
Parfois, des passants s’arrêtent, curieux de voir tant de monde traîner devant l’échoppe. C’est que la carte propose, en plus de tout ce qu’on pourrait trouver dans un snack traditionnel (burger, sandwich, panini ou pizza), des produits algériens qui viennent ajouter cette once d’authenticité : pizzas feuilletées à la tomate, bricks œuf et viande hachée et mhajebs – ces crêpes à la semoule, farcies de tomates et d’oignons.
Tout est fait sur place avec des produits frais. Et pas mal de passion à voir Samy, concentré un max, préparer un sandwich comme s’il allait le manger lui-même, du mélange sur le gril à la sauce dans le pain.
Si McDo a fait une bonne partie de sa réputation avec son BigMac, le sandwich qui a fait celle du McOmar c’est le « complet ». Pour 4 euros, vous avez votre demi-baguette blindée de viande hachée, d’œuf et de frites avec la sauce de votre choix. Une sorte de Tacos en baguette, sans la sauce fromagère – une sorte de sandwich américain revisité sans chichis. Un peu sec à la première bouchée, il se dévoile ensuite. Bilan : c’est bon et ça blinde. Satisfaction.
Samy insiste sur la fraîcheur et marque sa différence. Il ne veut « travailler qu’avec des produits de première gamme » contrairement à ceux – comme McDo – qui « préfèrent les steaks qui ressemblent à des palets de hockey sur glace plutôt que de la bonne viande hachée qui ne coûte pas vraiment plus cher » souligne Samy.
« Si on est dans la restauration, c’est pour faire ça le mieux possible. C’est d’ailleurs la qualité qui fait notre réputation », souligne-t-il. Au McOmar, vous n’aurez jamais de mauvaise surprise. Pas de frite à moitié congelée ou trop molle. Ici, elles sont faites maison tout comme la pâte à pizza. Dans un quartier aussi populaire, les tarifs se devaient d’être abordables. Les prix ne dépassent donc pas les 6 euros pour les menus. Pour moins de 3 euros, vous pourrez même repartir avec votre sandwich fait dans un khobz eddar, ce pain algérien rond au sésame.
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Chez Omar, on a un peu l’impression que le temps s’arrête. Même s’il n’y a pas de salle, la plupart des clients prennent leur commande et restent dans la zone – soit sur le trottoir, soit autour de la seule table installée devant la première boutique. Quand on en discute avec Samy, il nous dit que c’est sûrement culturel ; les gens prennent le temps de manger, de discuter et d’échanger.
En proposant des produits frais, bons, authentiques et variés à des prix abordables, le McOmar contrecarre l’image négative qu’on peut avoir sur les snacks de quartier à la devanture répétitive. Et même si c’est involontaire, ce fast-food algérien est un joli middle finger à McDo.