Je suis sobre depuis à peine deux ans maintenant, mais j’ai déjà atteint mon quota de personnes offensantes, irrespectueuses ou simplement bizarres par rapport à mon abstinence d’alcool. J’ai pris l’habitude de détourner le malaise en faisant de mauvaises blagues pour que les gens ne me posent pas de questions et n’insistent pas pour que je partage une tournée avec eux.
Voilà comment cela se passe généralement : vous dites que vous ne buvez pas, l’autre personne vous dit « Allez, juste un verre », vous dites « non » à nouveau, et l’autre personne dit « Allez » encore une fois, et cela continue ainsi comme deux Alexa qui s’activent mutuellement. Tôt ou tard, cela se termine, soit parce que l’autre décide de respecter votre choix, soit parce qu’il se lasse, soit parce qu’il se rend compte qu’il devient casse-couilles au bout du sixième « non ».
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Parmi les techniques des évangélistes de l’alcool, la plus difficile à traiter est l’interrogatoire. Vous refusez le verre, ou commandez une eau gazeuse, un coca ou un cocktail non alcoolisé super élaboré, et l’autre personne vous demande pourquoi vous ne voulez pas boire quelque chose d’alcoolisé (la raison ne la regarde évidemment pas, que vous soyez en sevrage, enceinte ou que vous n’ayez pas envie de boire ce soir-là).
« C’est pourquoi, si un premier « je préfère ne pas entrer dans les détails » n’incite pas la personne à cesser de vous ennuyer, vous avez ma permission d’offrir n’importe quelle excuse ici, qu’elle soit vraie ou non »
J’ai dû répondre à cette question ennuyeuse des dizaines de fois, et je n’ai jamais compris ce que les gens veulent entendre. « Ah tiens, je ne m’étais jamais demandé pourquoi je ne buvais pas, merci de m’avoir sorti de cette cage mentale, cette tournée est pour moi » ? Je ne peux pas imaginer que quelqu’un a vraiment envie de m’entendre dire « je lutte contre mon alcoolisme », une réponse qui gâche un peu l’ambiance dans un bar, mais l’alternative que j’utilise souvent, « je n’ai pas envie », a pour seul résultat de rendre mon interlocuteur encore plus insistant.
Quelle que soit la réponse à la question « pourquoi », elle ne sera jamais suffisante. Les gens voudront savoir pourquoi vous avez arrêté de boire, ou pourquoi vous n’avez jamais essayé, ou si vous ne vous sentez pas bien ce soir-là – parce que si vous avez un petit rhume, vous pouvez toujours prendre un grog. Toute réponse ne fera que susciter d’autres questions. Ce type de contrainte est agaçant et extraordinairement manipulateur, même si votre inquisiteur maintient un ton amical ou intéressé, comme s’il était important pour lui de comprendre votre relation avec l’alcool pour mieux vous connaître. Ce n’est pas un ami, c’est une plaie !
C’est pourquoi, si un premier « je préfère ne pas entrer dans les détails » n’incite pas la personne à cesser de vous ennuyer, vous avez ma permission d’offrir n’importe quelle excuse ici, qu’elle soit vraie ou non. Dites que vous êtes sous antibiotiques et que vous ne pouvez pas les mélanger avec l’alcool, ou que vous devez vous lever tôt le lendemain pour honorer un engagement, ou que vous avez une prise de sang à faire, ou que vous êtes fatalement allergique à l’alcool.
Bien sûr, dans la plupart des cas, le mensonge crée plus de problèmes qu’il n’en résout. Mais de la même manière que de nombreuses femmes déploient la carte du « J’ai un petit ami » pour convaincre un homme de les laisser tranquilles, raconter des conneries pour vous débarrasser de quelqu’un permet de réduire les risques, dans la mesure où cela vous évite de boire quand vous ne voulez pas, de vous sentir mis sur la sellette ou de dire à votre interlocuteur d’aller jouer aux billes sur l’autoroute.
La crédibilité de votre excuse peut varier en fonction de la dynamique du pouvoir en jeu. Si vous vous sentez en faute, ou si vous êtes dans un contexte professionnel, il est probablement préférable de dire la vérité. Si vous voulez juste détourner le malaise que vous ressentez, alors allez-y, dites à cette personne que le gin vous rend aussi petit qu’Alice au pays des merveilles et que vous avez peur d’être piétiné comme elle piétine votre vie privée.
Quelle que soit votre décision, l’objectif est de changer de sujet, par tous les moyens nécessaires. N’oubliez pas que c’est l’autre qui est grossier, vous avez donc raison de répondre d’un certain ton !
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