Sortir manger au restaurant et commander une bonne bouteille de vin sont probablement les deux plans les plus hédonistes et honorables qu’il est jamais été donné à l’Homme d’accomplir. Mais comme tout dans la vie, chaque petit plaisir a un coût. Je veux parler de cette très longue minute de solitude qui accompagne le moment où le serveur vous tend la carte des vins d’un air inquisiteur. Le nez dans ce qui ressemble souvent à un grimoire en simili cuir d’une centaine de pages, l’air complètement affolé, c’est cet instant gênant du repas où — même si on touche un peu sa bille en vin — on se prend un inévitable gros coup de pression. Et comme personnellement, j’adore le vin mais je déteste les coups de pression, je vous ai préparé quelques conseils simples et utiles pour vous aider à faire les bon choix quand vous aurez à choisir entre deux bouteilles de vins aux noms très compliqués.
Quel est le programme ?
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Le vin doit intervenir comme le prolongement délicieux de ce qui se trouve dans votre assiette. C’est important de garder ça en tête quand vous vous apprêtez à passer commande. Si vous n’y connaissez vraiment rien, voici une règle qui vous sortira de bien des embarras : les volailles et les viandes blanches vont avec le vin blanc, les viandes rouges avec le vin rouge. Pourquoi ? Car associer la couleur de ce que vous allez boire avec la couleur de ce que vous allez manger c’est souvent la meilleure chose à faire (sauf si vous êtes confrontés au cas particulier des plats épicés, pour lesquels je conseillerai toujours un riesling blanc). Une autre bonne chose à savoir est que les vins acides permettent de casser le gras avec les plats assez riches mais qu’à contrario, ces mêmes vins acides peuvent devenir très amer si on les accorde avec des plats trop salés. Dernières recommandations, en vrac : les bons vieux plats vont très bien avec les bons vieux vins, les plats amidonnés fonctionnent avec à peu près n’importe quel vin et les choux de Bruxelles ne s’accordent avec absolument rien, donc ne vous y risquez même pas.
Enfin, si vous êtes là avant tout pour picoler, la tâche s’avère beaucoup plus aisée : laissez tomber les considérations solides et commandez directement la bouteille de pinard qui vous fera le plus plaisir.
Où est-ce que vous avez foutu les pieds ?
Simple logique vous me direz, mais si le restaurant dans lequel vous vous trouvez propose une carte composée à 95% de vins italiens, vous avez sûrement intérêt à commander du vin italien. Les trois Bordeaux qui se battent en duel sur la carte ne sont là que pour satisfaire les couples chiants qui « ne jurent que par le Bordeaux » et vous pouvez être sûr que ces vins là n’épateront qu’eux. Pour résumer : le type de vin le plus présent à la carte est probablement le vin auquel l’établissement porte le plus d’attention et donc, par extension, celui que vous devriez prendre.
Laissez parler le sommelier qui sommeille en vous
Vous vous rappelez d’un vin qui vous a particulièrement marqué ? Vous aimeriez renouveler ce genre d’expérience gustative hors du commun ? Laissez parler vos émotions et profitez-en pour exprimer vos envies directement au serveur ou au sommelier. Les bonnes questions à se poser : quel est le genre de vin qui vous plaît, quelle serait la couleur de sa robe, quels sont les arômes ou les textures que vous préférez ? N’hésitez pas à formuler des envies un peu étranges, comme ça vous vient, genre : « je voudrais un super rouge un peu poivré », « je me laisserais bien tenter par un blanc à la fois vif et fleuri » ou encore « un rosé pas super ouf, mais bon quand même ». C’est l’assurance d’obtenir des conseils au plus près de vos envies, mêmes farfelues. Et puis, vous passez maintenant pour quelqu’un de curieux mais pas complètement ignorant. C’est ce qui permet, en théorie, d’éviter que l’on vous refourgue de la piquette.
Oubliez la fameuse « seconde bouteille la moins chère »
Tout le monde pense que c’est un truc infaillible mais en réalité, c’est tout sauf une bonne idée : la seconde bouteille la moins chère est souvent la pire. Les restaurateurs les plus fourbes savent que vous ne voulez pas paraître radins en prenant la bouteille la moins chère, donc quand ils se retrouvent avec un lot de bouteilles bon marché sur les bras, ils les mettent volontairement en avant-dernier sur la carte pour écouler leur stock. Morale : quitte à paraître un peu radin, il vaut encore mieux prendre la bouteille la moins chère.
Mettez-vous le serveur dans la poche
Ce serait mentir de dire que le prix du vin n’entre pas en compte dans la prise de décision. Essayez donc d’être le plus transparent possible quant à vos intentions. Une technique de vieux briscard consiste à ouvrir la carte des vins et à demander au serveur « quelque chose qui ressemble à ce vin là » en pointant discrètement le prix d’une bouteille qui rentre dans votre budget. Vos convives penseront que vous êtes en train de montrer un Côte-du-rhône ou que vous avez déniché un petit vin « de derrière les fagots ». Mais le serveur, lui, aura très bien compris votre manège. Vous prenez le risque de tomber sur un petit malin qui en profitera pour dénoncer votre radinerie au grand jour, mais la plupart du temps, les serveurs souriront d’un air convenu et vous orienteront vers une superbe bouteille, juste dans la bonne fourchette de prix.
Restez vous-même
Le choix du vin se fait aussi souvent à l’instinct. En conséquence, ne retenez aucunes de vos pulsions. Si à la lecture de la carte vous vous rendez compte qu’ils ont justement ce petit chablis avec lequel vous vous êtes cuité pour la première fois et qui a largement contribué à votre éveil à la vie entre les jambes de Marina, votre correspondante russe, alors n’hésitez plus : prenez ce putain de vin, illico. Vous en mourez d’envie de toute façon.
Lancez-vous
Alors ça va vous paraître assez débile, mais le plus simple quand on ne sait pas quel vin choisir, reste finalement de demander conseil au serveur ou au sommelier : ils sont censés connaître leur carte sur le bout des doigts. Faîtes de votre ignorance un atout charme et laissez vous guider par les conseils de professionnels. Ma phrase préférée : « Écoutez, je n’ai jamais bu aucun de ces vins. Je vais prendre celui que vous préférez du moment qu’il ne me coûte pas un million d’euros ». En général, le serveur comprend tout de suite votre côté à la fois bout-en-train et amateur de vin : c’est l’assurance qu’il vous serve ensuite une bouteille avec le meilleur rapport qualité prix.
Conclusion : En fait, vous savez quoi ? Laissez tout tomber. Improvisez, soyez-fous, faîtes preuve d’originalité, commandez n’importe quelle bouteille de vin. Vous êtes majeurs et vaccinés et c’est votre dîner après-tout, hein ?
Marissa ne possède aucune qualification particulière pour écrire sur le vin, mais elle en parle très bien sur son blog.