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Culture

12 choses qu’on a appris du retour d’Ai Weiwei à New York

L’artiste chinois était invité au Brooklyn Museum, à l’occasion de son retour aux États-Unis depuis que son passeport lui avait été confisqué en 2012.
Photo courtesy of Ellen Qbertplaya

Le week-end dernier, Ai Weiwei s’est posé au Brooklyn Museum avec l’artiste cubaine Tania Bruguera pour discuter de politique, d’art et d’exil. C’est la première fois que Weiwei, qui a vécu dix ans aux États-Unis, revient à New York depuis que son passeport avait été saisi en 2012. Bruguera, qui est à cheval entre New York et La Havane, a récemment été choisie pour une résidence au Department of Immigrant Affairs de la Ville de New York. Voici ce qu’on a retenu de cette rencontre.

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Le militantisme sur les réseaux sociaux est plus fort qu’on ne le croit
Souvent sous-estimé dans les pays occidentaux, cette forme de protestation a du sens à Cuba ou en Chine par exemple, où la censure est forte. « Quand il n’y a pas de liberté d’expression, il n’y a pas de liberté », dit Weiwei. « Depuis que j’ai appris à poster, je ne veux plus dormir. » En effet, le dissident chinois tweete quasi quotidiennement et compte plus de 338 000 followers.

La peur est un héritage
« Il y a tellement de générations de gens effrayés, que la peur commence chez soi », explique Bruguera. « Ça commence quand votre mère vous dit de ne pas faire quelque chose pour vous protéger. »

Les médias occidentaux peuvent — et vont — déformer vos propos
Quand Weiwei a été présenté à Bruguera comme « artiste d’avant-garde », le principal intéressé a rétorqué : « L’avant-garde est un titre donné à mon art par les médias occidentaux. »

La censure est précise, assidue et vicieuse
Bruguera a décrit les méthodes du gouvernement cubain pour la réduire au silence. Cela va de l’isolation artistique, par le contrôle, ou même la propagation de rumeurs comme quoi elle serait au service de la CIA. « Ils ont beaucoup de ressources. J’ai été interrogée quatre fois. Ils n’ont rien d’autre à faire ? Ils dépensent tellement d’argent là-dedans. À Cuba, il y a une liste d’artiste “officiels”. Si vous dites quelque chose qui déplaît, vous êtes rayé de cette liste. Du coup, personne [aux États-Unis] ne verra le travail de ces artistes lorsqu’ils viendront à Cuba. »

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L’art est plus un « geste » qu’un objet
C’est du moins la définition que donnent Weiwei et Bruguera. Quand Weiwei a lâché une urne de la dynastie Han en 1995, la photo est restée cachée pendant plus de deux ans. L’artiste s’explique : « Ça m’a pris, en tant que personne sérieuse, un bon moment pour en faire une blague. »

Le changement est annoncé par la température
Bruguera et Weiwei ont débattu un long moment pour savoir si le changement devait venir du haut ou du bas. Weiwei a fini par conclure qu’essayer de comprendre d’où vient le changement revient à « parler de quand le printemps arrive. Ça vient d’une rivière gelée, ou quand les glaces commencent à fondre, ou quand la cime des arbres deviennent verte. Mais ça vient en fait de la température. C’est quand vous sortez de l’ombre de votre maison et que vous dites “Oh, il fait si beau aujourd’hui”. »

Pour changer le futur, vous devez prendre conscience que le futur c’est maintenant
Bruguera a insisté à plusieurs reprises sur l’importance de l’agitation pour améliorer les choses. « Le futur de Cuba, c’est maintenant », dit-elle. « C’est ainsi que l’on change le futur. » Weiwei a ajouté : « Tous les jours, vous devez vous poser cette même question : “Pouvons-nous vraiment tolérer ce type de société ?” Il n’y a pas d’excuse pour taire votre voix, quelles que soient les circonstances. »

Ne sous-estimez le pouvoir de vous lancer des fleurs
Pendant son assignation à résidence, Weiwei était surveillé en permanence par des caméras. En forme de protestation, il a quotidiennement placé un bouquet de fleurs dans un panier de vélo pendant 600 jours jusqu’à ce qu’il obtienne l’autorisation de pouvoir voyager à nouveau. « Ils n’avaient aucune raison de stopper cette action car il n’y avait pas de véritable menace », explique Weiwei. « Ils m’ont dit “Weiwei, peux-tu arrêter ?” J’ai répondu que c’était impossible. Je mets juste mes fleurs fraîches là… C’est comme ça qu’on négocie. Ça peut être aussi bête que ces fleurs. »

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Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon d’interpréter l’art
Avec l’un de ses derniers projets, où il pose comme sur la fameuse photo du petit Aylan Kurdi, Weiwei a essuyé de violentes critiques. Quand Bruguera lui demande de commenter, il répond : « Je suis un artiste, par un prêtre. Mon art n’est pas censé être bon ou mauvais. Vous le prenez comme il est ou vous allez vous faire foutre. »

Si vous voulez faire une déclaration, prenez une douche
Au moment des questions-réponses, une étudiante en art a demandé quelles actions elle pourrait faire pour faire une déclaration politique. Ce à quoi Weiwei à répondu : « Prenez une douche. Ouvrez la fenêtre. Assurez-vous de pouvoir cuisiner aujourd’hui. » Comprenez ce que vous voulez.

L’art est toujours lié à la politique
« Tout art doit être politique, sinon ce n’est pas de l’art. Je ne dis pas que je suis un artiste politique parce que je pense que c’est une insulte. L’esthétique est toujours liée à la morale et à notre philosophie », dit Weiwei.

Ai Weiwei préfèrerait prendre des selfies
Avant que le micro soit passé au public pour les questions-réponses, Weiwei a dit : « Si nous en finissons avec ça, on peut tous aller dehors et je prendrai des selfies avec vous. »

Ai Weiwei a quatre expositions prévues à New York le mois prochain : « Laundromat » à la galerie Deitch Projects, « Roots and Branches » à la galerie Lisson et dans les deux antennes de la galerie Mary Boone. Vous pouvez retrouver le travail d'Ai Weiwei en cliquant ici.