Un inventaire exhaustif de l’armoire à pharmacie de l'ISS

Pour vivre dans l'espace, il faut se confronter à un éventail impressionnant de dangers et risques potentiels. Sans accès rapide à une ambulance ou à des soins hospitaliers, les astronautes à bord de la Station spatiale internationale (ISS) doivent être prêts à affronter n'importe quelle urgence médicale au pied levé.

Ce lundi, des détails fascinants sur les protocoles médicaux orbitaux ont été révélés dans un document obtenu grâce au Freedom of Information Act (FOIA) américain à la demande du site web governmentattic.org. La requête d'origine, soumise le 28 décembre 2015, adresse sept points principaux : les procédures d'urgence dentaire, l'appendicectomie, la cholécystectomie, les manuels médicaux d'urgence, l'inventaire du kit médical de l'ISS, le manuel d'utilisation du kit médical, et enfin, la procédure officielle de la NASA pour s'occuper d'un cadavre dans l'espace.

Selon Jessica Cordero, l'employée du Johnson Space Center qui a répondu à la requête FOIA, « des recherches approfondies » ont été menées pour documenter les points en question, mais « aucun éclaircissement ne peut être donné pour les éléments 2, 3, 6 et 7. Dommage. Tout le monde se demande comment se passe un enterrement en orbite.

Les éléments 1, 4 et 5, cependant, nous offrent tout de même un aperçu intéressant de ce à quoi ressemble une armoire à pharmacie de l'espace, ainsi que de la façon dont on peut opérer quelqu'un dans le confort somme toute limité de l'ISS. Cela vaut le coup de parcourir les quelques 62 pages d'organigrammes, de photos d'opérations dentaires abominables, de tableaux pharmaceutiques, etc. Mais au cas où l'envie n'y serait pas, Motherboard vous a concocté une synthèse du document.

Attention aux vols d'aiguilles en micropesanteur. En cas d'insuffisance respiratoire sévère ou de choc, les membres d'équipage de l'ISS sont invités à administrer à l'astronaute en détresse une injection intra-osseuse. Mais la réalisation de cette procédure s'accompagne bien sûr de quelques risques, comme celui-ci : « Avertissement : l'aiguille pourrait être éjectée par mégarde et devenir un projectile dangereux. »

Comme si la chirurgie de l'espace n'était pas assez difficile comme ça, elle fait donc intervenir des objets pointus qui peuvent être éjectés de leurs boites pressurisées à tout moment en direction de vos yeux, de vos parties génitales ou de votre cou. C'est bon à savoir.

La manœuvre de Heimlich se déroule de la même façon sur Terre et dans l'espace. Les compressions abdominales n'ont pas besoin de gravité pour fonctionner parfaitement.

Si vous avez besoin de lubrifiant, l'ISS a ce qu'il vous faut. Apparemment, on y trouve cinq types de produits lubrifiants différents : chirurgical, intranasal, et pas moins de trois marques de gouttes lubrifiantes pour les yeux. L'un de ces produits est appelé « Larmes de la Nature, » ce qui est un peu paradoxal puisqu'il est sensé imiter artificiellement les larmes organiques.

Le matériel médical de l'ISS possède des codes couleurs très sophistiqués. On peut y voir le paroxysme du raffinement organisationnel de la station.

Il existe probablement quelque part une série de photos d'astronautes malades absolument géniales : en effet, les instructions du manuel chirurgical stipulent d'utiliser l'appareil photo Nikon D4 de la station pour documenter l'état et les progrès des patients tout au long du traitement ou de l'opération chirurgicale. Les photos sont envoyées sur Terre à des médecins et chirurgiens faisant de l'assistance à distance.

Toutes ces photos sont jointes au dossier médical de chaque membre de l'équipage, datées par horodatage GMT, et transmises à la Terre pour être évaluées par le personnel médical concerné. Bien qu'il n'y ait encore jamais eu d'opération chirurgicale invasive dans l'espace, les blessures mineures sont nombreuses, ainsi que les infections et les symptômes gênants divers et variés.

L'ISS est remplie d'antipsychotiques, d'antidépresseurs et de médicaments contre l'anxiété. Vivre dans l'espace peut être très éprouvant pour l'esprit comme pour le corps. Les astronautes ont donc besoin des médicaments ci-dessus pour lutter contre les troubles de l'humeur.

Les femmes astronautes peuvent prendre la pilule contraceptive. Norgestrel et Ethinyl Estradiol sont stockés sur l'ISS par plaquettes de 21 comprimés. Bien sûr, ces informations contribuent à alimenter les rumeurs sur la sexualité débridée des astronautes dans l'espace.

Pourtant, le document FOIA ne mentionne l'usage de la pilule contraceptive que dans le cadre de traitements contre « la pression artérielle élevée, les maux de tête, les étourdissements, la nervosité, les nausées, les crampes abdominales, les caillots de sang, les troubles de l'appétit, les ballonnements et les mammaires. » Des millions de femmes sont traitées par pilule contraceptive pour les mêmes symptômes ; il n'est donc pas surprenant que l'on en trouve sur l'ISS. De plus, certaines femmes astronautes prenaient déjà la pilule avant de partir pour l'espace.

Les procédures médicales ISS ont de quoi faire rêver tous les survivalistes. Les équipages de l'ISS n'ont pas accès à un grand nombre d'équipements médicaux spécialisés, aussi, en cas d'urgence, ils dépendent avant tout de leur esprit pratique et de leur débrouillardise. Sacs Ziploc, drinks bags, ruban adhésif, gaze et ibuprofène : c'est là la base du matériel avec lequel ils devront composer.

Par exemple, les astronautes sont chargés d'utiliser des sacs Ziploc comme sachets à échantillons qui seront étudiés plus tard, sur Terre. Ceux-ci servent aussi de sacs poubelles. Les drinkbags sont utilisés pour l'hydratation, et pour décontaminer les parties du corps qui seraient entrées en contact avec des substances toxiques.

Si la perspective d'un futur post-apocalyptique dans un bunker souterrain vous préoccupe, vous aurez sans doute usage de ce document comme inspiration. Il n'y a rien de plus difficile que de se soigner avec trois bouts de ficelle.